L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a réduit légèrement, vendredi dernier, ses prévisions de croissance de la demande mondiale de pétrole pour cette année et la suivante, afin de refléter l'abaissement des perspectives économiques établies par le FMI. Pour 2013, l'AIE table désormais sur une hausse de 895 000 barils par jour de la demande planétaire d'or noir, à 90,8 millions, alors qu'elle prévoyait une augmentation de 930 000 en juillet, détaille-t-elle dans son rapport mensuel sur le marché pétrolier. Et pour 2014, elle continue à tabler sur une accélération de la demande, laquelle devrait toujours atteindre un nouveau sommet à 92 millions de barils par jour, mais un peu moins forte qu'auparavant. Elle estime désormais la croissance de la consommation de brut à 1,1 million de barils par jour en moyenne, contre 1,2 million précédemment. L'Agence a justifié ce léger abaissement par la révision à la baisse des prévisions de conjoncture du Fonds monétaire international, intervenue en juillet. Le FMI ne prévoit plus actuellement qu'une croissance de 3,1% de l'économie mondiale cette année, contre 3,3% en avril, et de 3,8% en 2014, au lieu de 4%. En outre, si l'AIE a relevé son estimation pour la consommation pétrolière américaine à court terme, du fait de la reprise économique à l'œuvre aux Etats-Unis, elle a abaissé sa prévision pour la demande japonaise, pour refléter l'intention affichée du gouvernement de recourir de nouveau à l'énergie nucléaire.
Réduction de la divergence entre OCDE et non OCDE Globalement, ces changements ne bouleversent pas les grandes forces à l'œuvre sur le marché pétrolier, où les pays émergents continuent à donner le la, face à des pays développés dont la demande tend à se réduire depuis des années, sous les effets conjugués de la crise et de politiques de réduction de la consommation d'énergies fossiles. Ainsi, "des signes semblent pointer vers une réduction de la divergence de tendance pour la demande entre l'OCDE (qui rassemble les principaux pays développés) et les pays hors OCDE, puisque la croissance dans les pays émergents et en développement et la contraction de l'économie dans les pays développés se sont chacune modérées", commente l'Agence établie à Paris, qui défend les intérêts des grands consommateurs d'énergie. "Néanmoins, les pays hors OCDE resteront le moteur de la demande pétrolière mondiale, tandis que la consommation des pays de l'OCDE continue à décliner", et "la demande hors OCDE devrait dépasser celle de l'OCDE au 3e trimestre 2013", souligne-t-elle. Côté production, l'AIE souligne que si beaucoup d'observateurs s'interrogent sur l'impact pour l'Opep de la production nord-américaine de pétrole non-conventionnel (pétrole de schiste et pétrole léger dit "compact", dont l'extraction nécessite également le recours à la fracturation hydraulique), en plein développement, le cartel pétrolier a pour le moment plus de soucis en interne. "En ce moment, le principal défi de l'Opep est moins une demande affaiblie (pour son propre brut, du fait de l'essor de la production nord-américaine) que les difficultés pratiques qu'elle rencontre", indique l'AIE. "La production de l'Opep le mois dernier a reculé de 1,1 million de barils par jour sur un an (à 30,4 millions de barils par jour) pour des raisons qui n'ont rien à voir avec l'offre nord-américaine, et tout à voir avec des événements internes à plusieurs de ses membres", ajoute l'Agence internationale de l'énergie. En Libye, les exportations de brut sont tombées à leur plus bas niveau "depuis la guerre civile de 2011", avec une production tombée à 1 million de barils par jour en juillet et 400 000 barils début août, du fait de conflits sociaux et d'un regain de violence. Parallèlement, l'Irak a vu sa production chuter sous les 3 millions de barils par jour, et ses exportations (qui étaient de 2,27 millions de barils par jour en juillet) devraient diminuer encore de 500 000 barils par jour en septembre du fait de travaux sur les infrastructures. Si ces travaux sont présentés comme temporaires, l'AIE évoque la crainte d'une perturbation prolongée vu la mauvaise réputation du pays en matière d'exécution de projets. Sans oublier le bras de fer entre Bagdad et la province autonome du Kurdistan irakien, qui pèse également sur le secteur.
La production du brut iranien reste en berne mais la flotte de pétroliers croît Le secteur pétrolier iranien continue à pâtir des sanctions internationales contre Téhéran, mais l'Iran a renforcé sa flotte de navires pétroliers, ce qui pourrait l'aider à trouver de nouveaux débouchés pour son brut, a indiqué l'AIE. Dans son rapport mensuel sur le marché pétrolier, l'Agence internationale de l'énergie a estimé que la production de pétrole brut de l'Iran avait reculé à 2,65 millions de barils par jour (mbj) en juillet, soit 50 000 barils par jour (b/j) de moins qu'en juin. Les importations de brut iranien sont quant à elles remontées à 1,16 mbj de barils, contre 960 000 b/j en juin. Cette progression est largement due à un rebond des importations chinoises, remontées à 660 000 b/j en juillet contre 385 000 b/j en juin, où elles avaient été limitées par une saturation du trafic portuaire en Chine. Il s'agit d'estimations préliminaires non-officielles, calculées par l'AIE à partir de différentes sources. L'AIE rapporte par ailleurs que "seuls cinq pays ont déclaré avoir importé du brut d'Iran en juillet: la Chine, le Japon, la Corée du Sud, la Turquie et les Emirats arabes unis", contre 16 en janvier 2012. Par ailleurs, l'Inde, qui avait importé 200 000 b/j de brut iranien en moyenne depuis le début de l'année, a apparemment cessé ses imports en juillet, ce qui serait lié à l'impossibilité d'assurer les cargaisons en raison des sanctions internationales mises en place notamment par les Etats-Unis et l'UE. Mais l'AIE ajoute que l'Iran "continue d'étendre sa flotte de transport de pétrole pour tenter de maintenir ses ventes de brut" et contrer les sanctions. Ainsi, le groupe NITC, qui gère la flotte iranienne de navires pétroliers, "a pris livraison de 4 VLCC (pétroliers de très grande capacité) supplémentaires depuis mai, qui s'ajoutent aux trois navires entrés en service cette année, dans le cadre d'une commande de 12 navires chinois pour 1,2 milliard de dollars qui avait été signée en 2009", souligne-t-elle. Cela porte la flotte de pétroliers iranienne à 51 navires (dont 37 VLCC et 14 de moindre taille), d'une capacité combinée de 76 millions de barils, "ce qui devrait donner à la compagnie pétrolière nationale plus de souplesse pour commercialiser son brut ou le stocker", avance l'agence.