Le groupe EADS a annoncé mardi qu'il serait obligé de licencier s'il ne parvenait à négocier des gains de productivité avec les syndicats européens au terme d'une restructuration de ses activités Défense et Espace. Nous devons agir maintenant, a lancé Tom Enders, le patron du futur groupe Airbus, en défendant les 5 800 suppressions de postes sur trois ans annoncées lundi passé et qui affecteront pratiquement à égalité l'espace et les activités de défense. Les commandes militaires sont en baisse et la compétition internationale sur les marchés émergents s'accentue. Ne rien faire serait irresponsable et entraînerait une situation beaucoup plus grave pour nos employés et pour la performance du groupe d'ici deux ans, a-t-il averti lors d'une conférence de presse téléphonique. Le directeur des ressources humaines Thierry Barril a précisé que 1 300 contrats temporaires ne seraient pas renouvelés en 2014. De plus, 500 postes seront supprimés dans les fonctions centrales du groupe et, au sein des divisions, approximativement 2 000 en Allemagne, 1 260 en France, 557 en Espagne, 450 en Grande-Bretagne, et 180 dans le reste du monde. Après les mesures de reclassement au sein du groupe, les retraites anticipées et les départs volontaires, la direction s'attend à 1 000 à 1 450 licenciements secs. D'après le directeur de la Stratégie Marwan Lahoud, 6 à 700 personnes seraient mises à pied en Allemagne et 300 en France. Mais ces mesures pourraient être évitées selon lui en négociant avec les syndicats, pays par pays, des gains de productivité en aménageant le temps de travail, les règles salariales ou les avantages sociaux. Si d'ici la mi-2014, nous n'avons pas d'accord (de compétitivité), nous serons obligés de procéder à des licenciements, a-t-il déclaré. Le ministre français du Travail Michel Sapin et son collègue au Redressement productif Arnaud Montebourg ont demandé au futur Groupe Airbus d'éviter tout licenciement sec. Le ministère allemand de l'Economie l'a appelé à procéder à sa restructuration en douceur et à ne pas la faire peser exclusivement sur les sites allemands.
Plan inadmissible Je suis très détendu face aux réactions politiques, a déclaré Tom Enders, expliquant que les gouvernements espagnol, français, britannique et allemand (dont les pays forment la base industrielle du groupe) avaient été prévenus des réductions de postes. Les syndicats ont critiqué le projet qu'ils voient dicté par la seule logique financière, estimant que le groupe devait être capable d'équilibrer ses effectifs en interne. Nous avons entendu les mêmes critiques lors de la restructuration d'Airbus il y a sept ans, a rappelé Tom Enders, mais ce plan, baptisé Power 8 et qui a supprimé 7 900 postes, a été un succès, selon lui. Jürgen Kerner, d'IG Metall, a annoncé que son syndicat, le plus grand d'Europe, voulait s'assurer que la restructuration ne se ferait pas sur le dos du personnel. La restructuration verra la fusion des divisions Astrium (espace), Cassidian (défense) avec l'activité avions de transports militaires d'Airbus, pour former une seule division Airbus Defense and Space. Cette activité n'est pas rentable du tout, a affirmé à propos de l'espace le patron de la nouvelle division, Bernhard Gerwert, soulignant que l'américain SpaceX lance des satellites pour 30% moins cher que la fusée européenne Ariane. Pour Marwan Lahoud, le manque de compétitivité se manifeste dans tous les pays d'Europe, aussi bien sur l'avion de combat Eurofighter que sur les lanceurs ou les satellites. Sur les satellites de communication, on n'est pas compétitifs, on perd des affaires ou on les gagne à perte, a-t-il même affirmé. La liste de tous les sites à fermer n'est pas encore connue et le détail des fermetures et des cessions d'activités ne sera pas arrêté avant plusieurs mois, a prévenu la direction. Si EADS avait pu fusionner avec le fabricant d'armes britannique BAE Systems l'année dernière, nous aurions eu moins de réductions de postes que dans la situation où nous devons le faire seuls, a estimé M. Enders. Le gouvernement allemand avait opposé une fin de non-recevoir à ce projet l'année dernière.
Suppression de 5 800 postes en Europe EADS a annoncé, lundi dernier, la suppression de 5 800 emplois sur trois ans dans ses activités défense et espace en Europe. Une source industrielle a précisé que l'Allemagne était le pays le plus touché avec environ 2 600 postes supprimés, contre environ 1 700 en France, 700 au Royaume-Uni et 600 en Espagne. Ces chiffres sont des approximations, d'où un total différent du total officiel. D'après le syndicat français FO, 1 300 sont des postes d'intérimaires et 4 500 des emplois à temps plein, selon un communiqué diffusé sur son site internet. La direction a justifié ces suppressions de postes par le besoin de gagner des marchés dans les pays émergents, mais FO a dénoncé une course à la rentabilité financière. Compte tenu de la décroissance de nos marchés traditionnels, nous devons d'urgence améliorer notre accès aux clients internationaux et aux marchés en croissance. Pour cela, il nous faut réduire les coûts, éliminer les duplications de produits et de ressources, créer des synergies dans nos opérations et notre portefeuille de produits, et mieux cibler nos efforts de recherche & développement. C'est précisément ce que vise le plan de réorganisation et d'intégration de notre pôle Défense et Espace, a déclaré M. Enders dans le communiqué. FO a pour sa part dénoncé ces suppressions d'emplois, affirmant que le groupe EADS se porte bien financièrement et que ses carnets de commandes sont bons, voire importants. Le syndicat dénonce une logique purement financière avec comme seule volonté affichée, un taux de rentabilité à 10% et exige que le groupe EADS ne procède à aucun licenciement sec. Le directeur exécutif du groupe, Tom Enders, avait rendez-vous lundi près de Munich (sud) avec le comité d'entreprise européen, à qui il avait déjà annoncé, par voie de presse, des mesures draconiennes, surtout dans les activités de défense en Allemagne. Les réductions de commandes militaires, notamment en Allemagne, ne pourront pas rester sans conséquence pour l'activité et les emplois, avait-il prévenu récemment dans un entretien à un magazine allemand. Selon la direction d'EADS, la restructuration est inévitable pour rendre le groupe plus efficace et performant dans la compétition sur les marchés émergents.