Le 26 décembre 2013, le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, a effectué avec impudence une visite au Sanctuaire Yasukuni, où sont honorés des criminels de guerre de classe A de la Seconde Guerre mondiale. Cet acte du dirigeant japonais a suscité de vives critiques dans le monde entier. Le ministre chinois des Affaires étrangères wang Yi, a convoqué l'Ambassadeur du Japon en Chine pour faire des représentations solennelles et exprimer une forte protestation au nom du gouvernement chinois à l'égard de la visite au Sanctuaire Yasukuni du Premier ministre japonais Shinzo Abe. Le Conseiller d'Etat, Yang Jiechi, a fait une déclaration, condamnant vivement l'acte du Premier ministre Abe. Cet acte de Shinzo Abe a suscité des critiques de la communauté internationale. Le gouvernement de la Corée du Sud manifeste sa colère contre cette visite qui, selon lui, montre la vision erronée des dirigeants japonais face à l'histoire d'agression tout en faisant obstacle à la préservation de la paix et de la coopération en Asie de l'Est. A cela s'ajoute une longue liste des pays, comme en témoignent les Etats-Unis, la Russie, l'Allemagne et le Singapour, ainsi que les personnalités comme, entre autres, le Secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et le Haut Représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton, qui ont tous présenté un profond sentiment de regret et de déception. Les médias internationaux, tels que Le Washington Post et Le Wall Street Journal, ont publié des articles pour critiquer M. Abe. A l'intérieur du Japon, il y a également des critiques. Des partis politiques, même l'allié au pouvoir de M. Abe, ont exprimé leur mécontentement à propos de la visite de M. Abe au sanctuaire Yasukuni. Pourquoi cette indignation et ces critiques dans le monde entier ? Il faut d'abord savoir l'histoire d'agression du Japon. Durant des années bien précédentes à la Seconde Guerre mondiale et surtout pendant celle-ci, conduit par un esprit extrêmement militariste, le Japon a envahi plusieurs pays asiatiques et infligé d'énormes misères et souffrances aux peuples victimes de l'agression japonaise. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Chine a perdu 18 millions de ses enfants. 300 000 citoyens chinois ont été cruellement massacrés lors du massacre de Nankin. Environ 100 000 philippins ont été massacrés par les Japonais lors du Massacre de Manille en 1945. Les Coréens, colonisés par le Japon pendant 36 ans, ont subi également de lourdes pertes et souffrances. Il faut ensuite connaître le sanctuaire Yasukuni. Ce sanctuaire, vénérant les âmes de 2 466 532 morts japonais lors de conflits militaires, glorifie ouvertement la guerre du Japon surtout par l'ajout, en octobre 1978, à la liste des personnes " déifiées ", des condamnés lors des procès de Tokyo, notamment de 14 criminels de guerre de classe A, en tant que " martyrs de Sh?wa ", dont le Premier ministre Hideki Tojo, ou le chef d'état-major de l'Armée, Yoshijiro Umezu. Parmi ces quatorze condamnés, sept ont d'ailleurs été condamnés à mort et exécutés. Le musée du sanctuaire, le Yushukan, impute les guerres d'agression japonaise contre ses pays voisins à la " provocation " et à l' " oppression "des Etats-Unis, du Royaume-Uni, voire de la Chine et présenter les guerres comme une guerre sainte pour la défense nationale. Il escamote également le massacre de Nankin. Il faut enfin savoir que le Sanctuaire Yasukuni est un symbole de guerre utilisé par le militarisme japonais pendant la Seconde Guerre mondiale et un outil spirituel de l'aile d'extrême droit du Japon. En foulant aux pieds le sentiment des peuples asiatiques concernés, la visite du dirigeant japonais à ce sanctuaire constitue, par nature, une tentative d'embellir l'histoire de l'agression et de la colonisation militariste japonaise, de renverser le verdict de la justice internationale sur le militarisme japonais et de défier les résultats de la Seconde Guerre mondiale et l'ordre international d'après-guerre. En allant à contresens de l'histoire, ces agissements du dirigeant japonais ne peuvent qu'éveiller une haute vigilance et une vive inquiétude des pays voisins asiatiques et de la communauté internationale sur le chemin que va prendre le pays à l'avenir. La présidente sud-coréenne, Park Geun-hye, a indiqué qu'un pays ne pouvant pas regarder en face son histoire, même s'il est fort en économie, ne peut pas être considéré comme un pays de première classe. C'est donc seulement en regardant en face son histoire d'agression, en s'en repentant et en tirant véritablement les leçons du passé que le Japon pourra développer des relations " tournées vers l'avenir " avec ses pays voisins asiatiques.
Analyse de Bernard Brizay La Chine et la Corée du Sud crient avec raison à la provocation du Japon, dont le Premier ministre Shinzo Abe a effectué le 26 décembre 2013 une visite au sanctuaire Yasukuni. Car ces visites sont tout simplement "des actes délibérés de révisionnisme", a indiqué Bernard Brizay, historien et journaliste français, auteur du livre Le Sac du Palais d'Eté,?dans une récente interview exclusive accordée à l'agence de presse Xinhua (Chine nouvelle). Il n'en reste pas moins que ces provocations renouvelées hérissent à juste titre le patriotisme et le nationalisme chinois. Les Chinois se souviennent des 20 millions de morts causés par l'invasion japonaise (1937-1945) et du massacre de Nankin (1937), a ajouté Bernard Brizay. Selon lui, la provocation japonaise - car il s'agit bien de cela - s'explique par deux raisons. Pour une raison d'actualité également. On sait que la question des îles Senkaku/Diaoyu empoisonne les relations nippo-chinoises, les deux nations se disputant leur appartenance. Le gouvernement japonais entend ainsi montrer sa fermeté et sa détermination sur cette question, a estimé Bernard Brizay. "Qu'il me soit permis d'évoquer un souvenir personnel. En septembre 2005, j'ai parcouru la Chine à l'occasion de la publication en chinois de mon livre Le Sac du Palais d'Eté, le pillage et l'incendie du Yuanming Yuan par les troupes anglo-françaises en 1860. C'était l'époque où la Chine était en émoi après une visite officielle du Premier ministre japonais, Junichiro Koizumi, au sanctuaire Yasukuni", a rappelé l'historien et journaliste français. La presse chinoise n'a pas manqué d'opposer deux attitudes : celle d'un historien occidental, qui condamnait la destruction de cette merveille unique au monde qu'était le Yuanming Yuan, et qui s'excusait du crime commis par ses compatriotes, tandis que le chef du gouvernement japonais faisait acte de révisionnisme, en refusant de reconnaître les crimes de son pays. Que faire face à ces actes condamnables du révisionnisme japonais, qui se refuse à condamner les criminels de guerre ??La réponse n'est pas simple. Toujours est-il que le gouvernement chinois a raison de s'en offusquer, a conclu Bernard Brizay. Par ailleurs, Céline Pajon, une chercheuse de l'Institut français des relations internationales (IFRI) et spécialiste du continent asiatique, a indiqué dans une récente interview accordée à l'agence Xinhua qu'en se rendant au controversé sanctuaire Yasukuni le 26 décembre dernier, le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, a souhaité manifester de manière hautement symbolique ses convictions nationalistes. Il semble également indiquer la direction que prendra son mandat : l'idéologue Abe semble avoir pris le pas sur le pragmatique Abe. Cette visite "regrettable" a encore accru les tensions diplomatiques dans la région, et a provoqué l'inquiétude de l'allié américain qui a exprimé son "désarroi", a poursuivi Mme Pajon. Cette décision personnelle du Premier ministre Abe se fait "au détriment" de l'image internationale du Japon, et renvoie l'impression fausse que la majorité de la population japonaise partage ses opinions révisionnistes, ce qui n'est pas le cas. Selon un récent sondage, 70% des Japonais souhaitent que le Premier ministre prenne en considération des sensibilités régionales concernant les questions historiques, a précisé Mme Pajon. Objet de controverses récurrentes, le sanctuaire de Yasukuni est dédié à la mémoire des soldats japonais morts au combat, dont 14 criminels de guerre de classe A condamnés en 1945, ce qui en fait un symbole du passé impérialiste du Japon. L'année prochaine marque le 70e anniversaire de la victoire de la Guerre mondiale antifasciste. La Seconde Guerre mondiale, déclenchée par les fascistes, a infligé aux peuples du monde des souffrances indicibles et désastres monstrueux qui constituent toujours une page douloureuse de la civilisation humaine, même trop pénible à évoquer. Selon les statistiques, plus de 35 millions de Chinois ont perdu la vie ou été blessés pendant la guerre d'agression déclenchée par les militaristes japonais. Durant la Seconde Guerre mondiale, les peuples des pays africains, y compris le peuple malien, ont combattu côte à côte avec les pays alliés. Les Africains tombés sur le champ d'honneur ont sacrifié leur vie pour la victoire finale de la guerre, pour la sauvegarde de la paix mondiale, et pour que la justice l'emporte sur le mal.