Un attentat suicide a fait au moins huit morts et une quarantaine de blessés au Pakistan où la première rencontre prévue entre les négociateurs des rebelles talibans et du gouvernement a été annulée, renforçant les doutes sur le processus de paix. Le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif avait annoncé la semaine dernière son intention de donner une autre chance aux pourparlers de paix avec les insurgés qui avaient capoté en novembre dernier après le meurtre du chef des talibans pakistanais du TTP Hakimullah Mehsud par un drone américain. Le gouvernement et les talibans ont annoncé au cours des derniers jours la composition de leurs équipes de négociateurs qui devaient se rencontrer mardi à Islamabad. Mais la rencontre escomptée n'a jamais eu lieu et le pays a plutôt eu droit à un nouvel attentat suicide devant un hôtel dans un quartier de la minorité musulmane chiite de Peshawar, grande ville du nord-ouest du pays, près de la frontière afghane. " Je dînais avec mon cousin lorsque j'ai vu une boule de feu, puis j'ai entendu un énorme 'bang', j'ai senti le sang de mon cousin gicler sur mon visage , a déclaré Muhammad Shah, 27 ans. Je suis tombé sur le sol, lorsque j'ai repris conscience j'étais à l'hôpital et ne pouvais croire que j'étais encore en vie, contrairement à son cousin, décédé ", a-t-il ajouté. Des sources hospitalières ont fait état d'au moins huit morts et de 42 blessés dans cet attentat suicide. Le kamikaze avait six kilos d'explosifs sur lui. Il s'est fait exploser précisément entre l'hôtel et l'imambargah, nom donné aux mosquées chiites au Pakistan, a précisé Shafqat Malik, chef des démineurs de la police de Peshawar. Plus tôt dans la journée, un haut responsable de la communauté chiite, Haji Sardar Ali, avait été assassiné dans ce même quartier de Peshawar, selon les autorités. M. Ali était le chef local à Peshawar du Tehreek-e-Nafaz-e-Fiqah-e-Jafaria (TNFJ), un parti chiite, minorité constituant environ 20% de la population de ce pays de 180 millions d'habitants et qui est dans le collimateur de groupes sunnites armés.
Un rendez-vous manqué " Les talibans pakistanais ont nié mardi soir toute implication dans ces violences, a déclaré leur porte-parole, Shahidullah Shahid. Cette attaque n'a pas été perpétrée par les talibans pakistanais, malgré le départ raté des pourparlers avec le gouvernement ", a-t-il dit. La délégation gouvernementale ne s'est pas présentée mardi à sa première rencontre avec les trois médiateurs des talibans affirmant avoir encore des interrogations sur la composition de ce groupe et son pouvoir réel. Cette absence montre à quel point le gouvernement est sérieux à propos de ces pourparlers. Ils font de ces pourparlers une vraie farce et se moquent de tout le pays, a réagi dans un entretien le mollah Sami ul-Haq, chef de la délégation mandatée par les talibans. " Il y a une troisième force qui cherche à faire dérailler ce processus de paix et veut faire couler encore plus de sang à travers le pays. Les talibans et le gouvernement doivent analyser attentivement la situation ", a prévenu Shaukat Yusafzaï, ministre de la Santé du Khyber Pakhtunkhwa, province du nord-ouest dont Peshawar est la capitale.
Scepticisme Les commentateurs demeuraient sceptiques mardi sur la possibilité de voir cette nouvelle initiative se traduire en paix réelle pour le Pakistan, pays endeuillé chaque semaine par des attentats. Le ballon des pourparlers de paix va se dégonfler rapidement, pronostiquait mardi le quotidien The News, soulignant l'ambiguïté et la confusion entourant cette énième initiative qui intervient alors que l'incertitude plane sur la région à l'approche du retrait à la fin de l'année des forces de l'Otan en Afghanistan voisin.