Le Japon a encore enduré en février un déficit commercial faramineux, son 20e d'affilée, toujours à cause des importations dont le coût est amplifié par la baisse du yen certes jugée bénéfique à maints égards mais dont les effets indésirables sont manifestes. Des économistes disent néanmoins espérer que le trou cesse de s'approfondir. Le mois dernier, la balance commerciale nippone a affiché un solde négatif de 800 milliards de yens (5,6 milliards d'euros), à peine plus élevé qu'un an plus tôt mais assez pour confirmer que l'équation économique du Premier ministre Shinzo Abe ne tombe pas encore juste. D'après les services des douanes, les importations ont augmenté de 9% à 6 600 milliards de yens, essentiellement à cause des achats de gaz naturel liquéfié (+11% en valeur), des semi-conducteurs (+41%) et des automobiles (+81,1%). Toutefois, si la valeur a augmenté, le volume, lui, a un peu régressé, un paradoxe dû aux variations des monnaies, les devises étrangères ayant fortement grimpé face au yen. Dans le même temps, les exportations n'ont certes pas démérité mais n'ont pas suffi à compenser. Elles ont grimpé en valeur de 9,8% sur un an à 5 800 milliards de yens (41,1 milliards d'euros), grâce à la progression des ventes à l'extérieur d'automobiles, de matières plastiques et de produits raffinés. En volume, la hausse des exportations est de 5,4%. Les déficits commerciaux du Japon n'en finissent pas de se creuser depuis la catastrophe atomique de Fukushima en mars 2011. Ce drame a obligé l'archipel à augmenter considérablement ses achats de carburants à l'étranger. Ceux-ci lui coûtent d'autant plus cher que depuis fin 2012 le yen a chuté de l'ordre de 20 à 25% face au dollar et à l'euro du fait de la politique économique instiguée par le conservateur Shinzo Abe arrivé au pouvoir il y a un peu plus d'un an avec l'objectif de redresser l'économie du pays via des largesses budgétaires, une grande souplesse monétaire et des réformes structurelles. Toutefois, cette politique appelée "Abenomics" est encore au milieu du gué, et n'a toujours pas eu les effets escomptés sur les exportations qui, si elles augmentaient fortement grâce à la compétitivité renforcée des entreprises nippones, permettraient de rééquilibrer en tout ou partie la balance commerciale. Pour l'heure, le commerce extérieur nippon reste globalement convalescent. L'archipel a déploré en février un 14e mois de déficit de suite vis-à-vis de l'Union européenne, notamment du fait d'achats de voitures, et un 24e mois envers la Chine d'où il importe des composants électroniques et appareils audiovisuels. Beaucoup d'entreprises de ces secteurs ont transféré une partie de leur production en Chine, afin de réduire leurs frais fixes, mais elles sont du coup forcées d'importer pour vendre dans l'archipel, ce qui rejaillit négativement sur les comptes commerciaux du pays.
Le rouge pourrait s'éclaircir Le Japon se console néanmoins en constatant l'augmentation de 72% de son excédent commercial envers le reste de l'Asie et le maintien d'un solde largement positif à l'égard des Etats-Unis, gros acheteurs d'engins de chantiers et d'équipement de génération d'électricité. Cependant, les facteurs qui ont contribué à des déficits croissants pourraient régresser progressivement, jugent désormais des économistes. "Les effets de la dépréciation du yen semblent s'estomper, comme on le voit dans la façon dont les coûts d'importation sont en train de se stabiliser. Et la croissance du volume des importations semble aussi être passée", analyse Hideki Matsumura de Japan Research Institute interrogé par Dow Jones Newswires. Et le même d'ajouter que la demande de dernière minute avant la hausse le 1er avril de la taxe sur la consommation (équivalent de la TVA française) est partiellement responsable, puisqu'elle tend à élever les importations. Cela devrait donc logiquement se calmer ensuite. "Lorsque l'on considère tout cela, il est probable qu'ait été atteint le sommet des déficits commerciaux, et nous pourrions voir le rouge s'éclaircir progressivement", conclut-il.