Les prix à la pompe des carburants augmenteront fortement en France au cours des trois prochaines années, mais le secteur mal en point du raffinage ne profitera pas de cette hausse essentiellement due à un alourdissement de la fiscalité, a averti l'industrie pétrolière. A prix du (pétrole) brut constant, il faut s'attendre à une augmentation très significative des prix à la pompe, essentiellement en raison de mesures fiscales, a prévenu le président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip), Jean-Louis Schilansky. En 2016, le gazole, principal carburant vendu à la pompe en France avec plus de 80% des volumes, devrait se renchérir de 8,5 centimes le litre par rapport à 2013, et l'essence de 7,7 centimes, malgré la stabilité attendue des cours du baril de pétrole brut, sauf événement géopolitique majeur. En 2016, c'est 4 milliards d'euros de taxes ou de simili taxes qui seront prélevées sur les automobilistes, a souligné M. Schilansky lors d'une conférence de presse. Principaux responsables de cette hausse, selon l'Ufip, outre l'augmentation du taux principal de la TVA de 19,6 à 20%: la contribution climat énergie ou taxe carbone qui s'appliquera dès 2015 au gazole et à l'essence, et les certificats d'économies d'énergies (CEE), qui auront un impact mécanique direct sur les prix. La taxe carbone, prévue dans le budget 2014 pour financer une diminution du coût du travail, représentera 4 centimes dans l'augmentation attendue du gazole d'ici 2016, et les CEE environ 2,7 centimes. Les vendeurs de carburants français, dont le géant Total et la grande distribution, vont en effet être mis trois fois plus à contribution dès l'an prochain dans le cadre du dispositif des CEE, qui oblige les fournisseurs d'énergie à réaliser ou faire réaliser par des tiers des économies d'énergie, sous peine de pénalités. Dans la mesure où les marges de distribution sont extrêmement réduites, il est impossible pour les opérateurs d'absorber ce surcoût, qui sera donc répercuté au consommateur, a expliqué M. Schilansky. Autres facteurs de hausse, le relèvement de 7 à 7,7% de l'obligation d'incorporation de biogazole et la future obligation d'acheminer une partie des produits pétroliers raffinés importés dans l'Hexagone par des navires sous pavillon français. Ces hausses de prix ne profiteront pas au secteur du raffinage, dont le déclin de la rentabilité ne pourra être enrayé qu'au prix de nouvelles fermetures ou réductions de capacités.
Allègement de charges Le secteur souffre d'une surcapacité structurelle en Europe, mais surtout de plus en plus d'une concurrence accrue des raffineries américaines, qui bénéficient pour leur part d'un avantage compétitif grandissant grâce à l'essor des hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis, qui leur donne accès à des matières premières bon marché. En outre, de nouveaux acteurs font leur entrée au niveau mondial, en Asie et au Moyen-Orient. Toutes les raffineries sont menacées, a dit M. Schilansky. La France a déjà fermé beaucoup de raffineries, qui sont passées de 12 à 8 depuis 2009. C'est donc probablement d'autres pays, où il y a des raffineries plus vulnérables que les raffineries françaises, qui risquent d'être touchés par ce mouvement, tempère-t-il toutefois. Le gouvernement ne peut pas agir sur le coût de l'énergie, mais il peut alléger certaines des charges qui pèsent sur les raffineries, notamment des réglementations, afin de leur donner une bouffée d'oxygène, plaide-t-il. Le nombre de stations-service en France a quant à lui continué à décroître: elles étaient 11 476 l'an dernier, soit 186 de moins par rapport à 2012. Mais pour la première fois, la part de marché des enseignes traditionnelles (gérées par pétroliers comme Total ou des indépendants) a progressé (+1 point à 38%) par rapport aux stations exploitées par des grandes surfaces, grâce à l'émergence des stations d'enseignes à prix bas. Le secteur pétrolier est à la peine aussi dans l'amont, avec le blocage par le gouvernement d'une centaine de demandes de permis de recherche pour des gisements d'hydrocarbures conventionnels (par opposition aux hydrocarbures de schiste). C'est une situation grave non seulement pour l'industrie française, mais aussi pour le message qui est envoyé à l'étranger, a déploré l'Ufip, qui continuera par ailleurs sa campagne en faveur des hydrocarbures de schiste, dont l'exploitation est interdite en France.