L'Etat français a conclu dimanche un accord avec Bouygues pour pouvoir entrer au conseil d'administration d'Alstom dès que l'alliance avec General Electric sera finalisée. Le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg l'a annoncé à la télévision France 2. L'Etat s'est donné environ deux ans pour racheter les 20% du capital qu'il convoite à Bouygues ou sur le marché et devenir le principal actionnaire d'Alstom. Entre-temps, Bouygues lui cède ses droits de vote au conseil d'administration, précisent Bouygues et Bercy dans des communiqués séparés. "Nous avons un accord qui a été conclu cet après-midi et qui permet à l'Etat de devenir le principal actionnaire d'Alstom, à hauteur de 20% comme prévu", a indiqué le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg sur France 2. "Nous avons une option d'achat que Bouygues nous a consentie, qui nous permet d'acheter lorsque le prix sera le plus bas possible car nous ne souhaitons pas dépenser inconsidérément le patrimoine des Français", a-t-il ajouté. L'Etat avait donné vendredi sa préférence à l'offre de GE, validée depuis par le conseil d'administration d'Alstom, à condition d'en devenir le premier actionnaire en rachetant 20% de la société à Bouygues, qui en possède actuellement près de 30%.
On a évité le pire, selon Mélenchon Le co-président du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, a jugé dimanche qu'avec l'alliance entre Alstom et General Electric, on avait évité le pire, qui aurait été la reprise du groupe industriel français par Siemens et Mitsubishi. Invité de l'émission Tous Politiques France Inter/Le Parisien/ France 24, il a estimé que la catastrophe aurait été que Siemens mette la main sur Alstom et finisse de le détruire. On a évité le pire, s'est-il exclamé. Au moins, avec General Electric, qui a une longue présence en France et n'est pas sur les mêmes créneaux, ça ne détruira pas d'emplois, a-t-il poursuivi. Cependant, le député européen ne comprend pas pourquoi on n'a pas nationalisé +sec+ Alstom dont on a besoin pour la transition écologique. Interrogé sur la déclaration du secrétaire général intérimaire de l'UMP, Luc Chatel, selon qui l'Etat est un mauvais actionnaire, il a répondu que c'est l'inverse, c'est l'Etat qui sait faire. En France, c'est l'Etat qui a toujours été stratège et maître du temps long, a-t-il dit. Il y en a par-dessus la tête d'observer que dans tant de cas, l'Etat ne fasse rien. Je ne trouve pas normal que l'on laisse fermer des entreprises rentables. Il y a des tas d'endroits où la réquisition s'imposerait, a-t-il ajouté.
Le patron de Siemens se dit toujours prêt à discuter La patron de Siemens, Joe Kaeser, affirme dans un entretien au journal Bild qu'il est toujours ouvert à des négociations avec Alstom bien que le français ait dit oui au projet d'alliance avec General Electric sur ses activités énergie et repoussé l'offre de l'industriel allemand. Nous sommes toujours prêts à discuter. Les portes sont ouvertes pour Alstom et le gouvernement français, assure le dirigeant de Siemens dans une interview à paraître lundi et dont des extraits ont été diffusés dimanche. Ce n'est pas encore fini!, ajoute-t-il à propos de l'alliance prévue d'Alstom avec l'américain. Le travail commence vraiment maintenant pour GE, Alstom et le gouvernement français, estime M. Kaeser. Les contrats compliqués vont nécessiter des mois (de travail). Ensuite les autorités de la concurrence devront examiner le dossier, détaille-t-il. C'est seulement ensuite que GE et Alstom pourront bâtir leurs entreprises conjointes et il va se passer encore beaucoup de temps avant qu'elles ne soient sur les rails, conclut le patron du groupe de Munich (sud). L'Etat français, qui avait fait monter les enchères sur Alstom, s'était finalement rangé vendredi du côté de l'offre du groupe américain General Electric, repoussant celle de Siemens associé à Mitsubishi Heavy Industries, et a annoncé son entrée au capital du groupe industriel français à hauteur de 20%. Samedi, le Conseil d'administration d'Alstom a unanimement décidé d'émettre un avis favorable à l'offre de GE, pour la vente sous conditions de ses activités énergie valorisées 12,35 milliards d'euros. GE offre de créer trois coentreprises à parité (turbines à vapeur, réseaux et énergies renouvelables) avec Alstom et de lui céder son activité de signalisation ferroviaire. Dans une première réaction vendredi soir, Siemens avait dit comprendre les intérêts nationaux du gouvernement français dans ce dossier.
Bayrou approuve l'intervention de l'Etat, regrette l'absence de solution européenne Le président du Modem François Bayrou a affirmé dimanche qu'il approuvait l'intervention de l'Etat dans le dossier Alstom, qui conditionne l'avenir de l'alliance entre le groupe industriel français et l'américain General Electric, mais a regretté l'absence de solution européenne. J'approuve l'intervention de l'Etat, a affirmé M. Bayrou sur BFMTV. Lorsque vous avez une entreprise dont dépend un élément essentiel de votre système d'énergie et de votre système militaire, vous ne la laissez pas partir à une puissance étrangère, quelque bienveillante qu'elle soit, selon lui. Considérant qu'il y avait une responsabilité d'homme d'Etat sur l'indépendance du pays, cet ancien candidat à la présidentielle de 2002 a déclaré qu'il était violemment opposé à ce que souhaitaient un certain nombre de gens, à savoir qu'on s'en lave les mains et qu'on donne à General Electric -qui est une grande entreprise amicale. Dans le dossier Alstom, M. Bayrou a cependant affirmé qu'il aurait préféré une solution européenne et que dans une vision stratégique, les européens, Siemens et éventuellement d'autres, acceptent de construire une puissance industrielle. Comme on lui demandait si la situation d'Alstom n'était pas liée à des blocages de la Commission européenne, le président du Modem a répondu par la négative, considérant qu'Alstom en est là parce que ses actionnaires l'ont dépouillé à une période cruciale de sa vie par un abus de gestion et car son actionnaire principal Bouygues a été mis en péril par l'échec d'une opération dans le téléphone. Il s'est aussi déclaré un tout petit peu surpris par la chronologie de cette affaire: on annonce officiellement que l'accord est fait avec General Electric et que Bouygues va vendre une partie de ses actions à l'Etat, et on découvre que ce n'est pas bouclé. L'Etat a pris un risque et, à moins qu'il ne l'ait fait volontairement pour débloquer quelque chose, c'est très insatisfaisant, selon le dirigeant centriste. Ce qu'on ne tolèrerait pas pour une PME, voilà que l'Etat dans sa majesté le commet tous les jours, a glissé le maire de Pau.