Les Grecs ont défié dimanche l'Europe, en rejetant massivement le référendum sur le plan des créanciers internationaux de leur pays. Le résultat du scrutin pose la question du maintien de la Grèce dans la zone euro et accentue le fossé avec les "institutions". Le "non" l'a emporté avec 61,31%, contre" 38,69% crédités du "oui", indiquent les résultats définitifs fournis par le ministère grec de l'Intérieur. Selon un sondage diffusé par la chaîne de télévision Antenna, 67% des bulletins de vote "non" ont été glissés par des jeunes âgés de 18 à 34 ans. Le taux de participation a atteint 62,5%. Alors que des milliers de partisans du non manifestaient bruyamment leur joie à Athènes, Berlin, d'un côté, et Paris et Rome, de l'autre, ne semblaient pas en phase sur la réaction à apporter. Le gouvernement grec faisait mine, lui, de ne voir aucun problème à son retour dès lundi à la table des négociations.
Sommet de la zone euro aujourd'hui La chancelière allemande Angela Merkel et le président français François Hollande étaient néanmoins "d'accord" pour dire qu'il fallait "respecter le vote" des Grecs. Ils ont appelé à un sommet de la zone euro, qui aura lieu aujourd'hui à 18h00 à Bruxelles. La Commission européenne disait aussi "respecter le résultat" du référendum. Alors que Mme Merkel est restée silencieuse, le ministre allemand de l'économie, Sigmar Gabriel, a jugé "difficilement imaginables" de nouvelles négociations avec Athènes dans ces circonstances. Il a même considéré que le premier ministre grec de gauche radicale Alexis Tsipras avait "coupé les derniers ponts" entre son pays et l'Union européenne. Le chef de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, a quant à lui estimé le résultat du vote "très regrettable pour l'avenir de la Grèce". Le ministre slovaque des finances Peter Kazimir affirmait pour sa part que, désormais, une sortie de la Grèce de la zone euro était "un scénario réaliste". Mais M. Tsipras a assuré à ses compatriotes que le résultat du référendum ne marquait pas du tout "une rupture avec l'Europe", mais au contraire "un renforcement du pouvoir de négociation" de son gouvernement. Il a déclaré que "cette fois la dette serait sur la table" de ces négociations. L'incertitude sur la suite des événements est totale. La Grèce n'a plus d'argent, ses banques sont fermées depuis une semaine, et fragilisées par les retraits massifs récents de Grecs anxieux de cette situation.
Nouvelles offres Les ministres des Finances de la zone euro attendent aujourd'hui des autorités grecques qu'elles viennent avec de nouvelles propositions de réformes et d'économies budgétaires, a annoncé l'Eurogroupe hier dans un communiqué. L'Eurogroupe discutera de la situation après le référendum qui s'est tenu en Grèce le 5 juillet. Les ministres attendent de nouvelles propositions de la part des autorités grecques. Les divisions sont fortes au sein des 18 sur comment aider la Grèce, qui a vu son deuxième programme d'assistance financière prendre fin le 30 juin et risque à tout moment de sortir de la zone euro, un scénario aux conséquences imprévisibles. Hier matin, le ministre finlandais des Finances, Alex Stubb, du camp des durs également, a jugé que les négociations ne peuvent reprendre que quand le gouvernement grec sera prêt à coopérer et à s'engager à des mesures pour stabiliser l'économie du pays et mettre en œuvre les réformes structurelles nécessaires à la soutenabilité de la dette. La balle est maintenant dans le camp de la Grèce, a-t-il affirmé sur son blog. L'Espagne, plutôt dure à l'encontre de la Grèce, s'est montrée ouverte à un possible troisième plan d'aide, comme le pays en a fait la demande la semaine dernière. A Paris, le ministre français des Finances, Michel Sapin, a rappelé qu'aucune solution ne pourrait être trouvée s'il y a pas entre Angela Merkel et François Hollande, une conversation en profondeur, en vérité, a-t-il dit alors que les deux dirigeants devaient se voir hier soir. Outre cette rencontre capitale, les discussions se multiplient au plus haut niveau, au lendemain de la victoire du non au référendum en Grèce, qui secoue l'Europe. Le président du Conseil européen Donald Tusk doit tenir dans la matinée une conférence téléphonique avec le patron de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, les présidents de la Commission européenne et de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker et Jeroen Dijsselbloem, ainsi que le patron du fonds de soutien de la zone euro, Klaus Regling.
Aucune base de négociation Berlin a envoyé un message d'absolue fermeté en direction d'Athènes hier, le porte-parole d'Angela Merkel estimant qu'après le non des Grecs au référendum, les conditions pour négocier une nouvelle aide pour la Grèce n'étaient pas réunies. Le gouvernement allemand a pris acte du " non " clair et respecte ce résultat, le gouvernement fédéral reste prêt au dialogue (...) mais compte tenu de la décision d'hier des citoyens grecs, les conditions pour des négociations sur un nouveau programme d'aide ne sont pas réunies, a déclaré lors d'une conférence de presse régulière du gouvernement à Berlin ce porte-parole, Steffen Seibert. Le vote de dimanche est un rejet du principe qui a guidé les aides aux pays (européens en difficultés), le principe selon lequel la solidarité et les efforts sont indissociables, a estimé M. Seibert. Or le gouvernement allemand reste fidèle à ce principe qui selon lui a permis de gros progrès dans d'autres pays de la zone euro. Berlin porte ainsi un coup sévère aux espoirs de trouver rapidement une solution dans de nouvelles négociations avec ses partenaires européens, pour renflouer la Grèce au bord de l'asphyxie financière. L'Allemagne, où l'opinion publique est de moins en moins solidaire de la Grèce, n'est aucunement disposée à discuter d'une restructuration de la colossale dette grecque, une requête pressante d'Athènes. Un allègement de la dette n'est pas un sujet pour nous, a indiqué le porte-parole du ministère des Finances, Martin Jäger. Je ne vois pas de raison de nous lancer à nouveau dans cette discussion, a-t-il ajouté. Pour autant le gouvernement allemand assure ne pas pousser la Grèce hors de la zone euro. Mais il considère que c'est à Athènes de bouger pour rester membre du bloc monétaire. Le pays est membre de la zone euro, il appartient à la Grèce et à son gouvernement de faire en sorte que cela demeure ainsi, a déclaré M. Seibert, ajoutant toutefois que la porte était toujours ouverte pour des discussions. Nous serons toute ouïes pour ce que le Premier ministre grec (Alexis Tsipras) amènera demain à un sommet de la zone euro à Bruxelles, a dit M. Seibert. Avant cette échéance, la chancelière Angela Merkel se rendra à Paris lundi dans la soirée pour rencontrer le président français François Hollande. Il s'agira de prendre le temps d'analyser ensemble les conséquences du référendum et de se concerter ensemble sur les prochaines étapes, a dit M. Seibert. Le porte-parole d'Angela Merkel n'a par ailleurs pas voulu commenter la démission surprise du ministre grec des Finances Yanis Varoufakis. Il s'agit toujours de positions et pas de personnes, a déclaré Steffen Seibert, ajoutant qu'il croyait que cette démission n'avait pas suscité de sentiment particulier chez Angela Merkel.
Varoufakis annonce sa démission Yanis Varoufakis, a annoncé hier qu'il démissionnait de son poste de ministre des Finances. Il a expliqué que les négociations entre Athènes et ses créanciers se dérouleraient mieux sans lui. Dans un communiqué, le futur ex-ministre dit avoir été "informé" que certains membres de la zone euro estiment qu'il n'est plus le bienvenu aux réunions des ministres des finances et que sa démission a été jugée opportune par le Premier ministre grec Alexis Tsipras en vue de la conclusion d'un accord avec les créanciers de la Grèce. "Pour cette raison, je quitte aujourd'hui le ministère des finances", a-t-il indiqué dans un communiqué. Yanis Varoufakis n'a pas hésité à fustiger les créanciers de la Grèce. "J'assumerai avec fierté le mépris des créanciers", a-t-il écrit à l'attention de ses détracteurs. "J'estime qu'il est de mon devoir d'aider Alexis Tsipras à exploiter, comme il le jugera adéquat, le capital que le peuple grec lui a accordé lors du référendum d'hier", a-t-il encore déclaré.
Deux noms évoqués Le nom du remplaçant de Yanis Varoufakis doit être annoncé lundi au terme d'une réunion de responsables politiques qui a commencé à 09h00 à Athènes, a déclaré un porte-parole du gouvernement grec. La presse grecque évoque déjà deux noms. Le premier est Euclide Tsakalatos. Ce dernier est l'actuel coordonnateur des négociations avec les créanciers. Un autre nom a les faveurs de la presse: Georges Stathakis, ministre de l'économie.
Madrid propose une seconde chance L'Espagne est favorable à une négociation pour un troisième plan de sauvetage de la Grèce, qui doit rester dans l'euro, a déclaré hier le ministre de l'Economie Luis de Guindos. Athènes a tout à fait le droit de demander un troisième plan de sauvetage, a aussi déclaré le ministre, au lendemain de la victoire du non au référendum sur le plan de réformes des créanciers de la Grèce. C'est absolument nécessaire compte tenu des circonstances (et) du point de vue des marchés, a-t-il même insisté. Madrid n'envisage absolument pas une sortie de la Grèce de l'euro, a aussi ajouté le ministre, premier membre du gouvernement espagnol à réagir au résultat négatif du référendum en Grèce sur le plan proposé par ses créanciers. Reconnaissant des erreurs commises par la troika (Union européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) dans la gestion de la crise, Luis de Guindos a toutefois insisté sur la nécessité de réformes en Grèce. Je pense qu'il y a eu des erreurs de la part de la troïka, mais il est inévitable que la Grèce fasse ses réformes parce qu'il y a des pays qui l'ont fait et qui sont en train de sortir de la crise, a-t-il déclaré.
Ne pas réduire le financement des banques Le financement par la BCE des banques grecques ne doit pas être réduit, a estimé hier matin le ministre français des Finances Michel Sapin, en jugeant qu'il revient au gouvernement grec de faire des propositions après la victoire du non au référendum. Le niveau des liquidités fournies par la BCE aux banques grecques ne peut pas être abaissé, a-t-il dit, tout en rappelant l'indépendance de la BCE qui doit décider de maintenir ou non les liquidités d'urgence (ELA) qu'elle octroie aux banques grecques au bord de l'asphyxie. Le vote lui-même ne règle rien, a-t-il dit à la radio Europe 1, lors de cette première réaction officielle française sur le référendum survenu dimanche. Ce qui permettra de savoir si la Grèce sort ou reste dans la zone euro c'est la qualité des négociations qui vont s'ouvrir, a-t-il ajouté. Le fil du dialogue est très ténu, a-t-il souligné, estimant qu'il était tenu par la France, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et le président de l'Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem. Aucune solution à la crise grecque ne pourra être trouvé sans dialogue en vérité entre la chancelière allemande Angela Merkel et le président français François Hollande, a-t-il jugé, avant une rencontre lundi soir à la présidence française entre les deux responsables. Le ministre français a estimé que c'est la Grèce qui est plongée dans la difficulté et non l'Europe: L'Europe est devant une difficulté mais elle n'est pas dans la difficulté, a insisté M. Sapin, ajoutant que l'Europe a construit toute une série d'outils, l'Europe va montrer qu'elle est forte d'abord en se protégeant elle-même.
Le Royaume-Uni protègera son économie Le gouvernement britannique a pris acte hier de l'opinion décisive exprimée par les Grecs lors du référendum de dimanche, assurant qu'il fera tout ce qui est nécessaire pour protéger son économie, selon un porte-parole du Premier ministre David Cameron. Le peuple grec a exprimé une opinion décisive lors du référendum. C'est un moment critique dans la crise économique grecque, a écrit le porte-parole dans un communiqué après que le non l'a emporté à 61,31% en Grèce. Nous continuerons à faire tout ce qui est nécessaire pour protéger notre sécurité économique dans cette période d'incertitudes, a-t-il assuré. Nous avons déjà des plans d'urgence en place et plus tard dans la matinée le Premier ministre présidera une autre réunion pour examiner ces plans à la lumière du résultat. Le Royaume-Uni ne fait pas partie de la zone euro, mais son économie, dans laquelle son secteur financier pèse très lourd, est très sensible à la situation de ses voisins de la zone euro.