Les cours du pétrole continuaient de baisser hier matin en Asie, le baril coté à New York passant sous la barre symbolique des 50 dollars, pénalisé par la vigueur du billet vert. Le cours du baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en août, qui avait déjà fait plusieurs incursions sous le seuil des 50 dollars en séance, perdait 16 cents dans les échanges asiatiques, à 49,99 dollars. Le baril de Brent pour livraison en septembre cédait 11 cents à 56,54 dollars. "La tendance sur le marché pétrolier est essentiellement imprimée par la force du dollar" qui dissuade les opérateurs d'acheter du brut dont les échanges sont libellés dans cette monnaie, a noté Daniel Ang chez Phillip Futures à Singapour. Le dollar, proche de son plus haut niveau depuis trois mois face à l'euro, s'apprécie au gré de l'embellie entrevue de l'économie aux Etats-Unis, premier consommateur mondial d'or noir, embellie qui devrait pousser la Réserve fédérale (Fed) à relever ses taux directeurs, rendant alléchants les rendements d'investissement sur la monnaie américaine. "La Grèce travaillant finalement avec ses créanciers sur un troisième programme d'aide, l'attention des marchés se reporte sur les écarts de politique monétaire" entre Washington et la zone euro notamment, selon la DBS Bank. Les analystes de Capital Economics avancent que "la vigueur du dollar va perdurer pendant un an et demi à la lumière du contraste entre les politiques monétaires des Etats-Unis et de ses principaux partenaires commerciaux". Les cours du pétrole sont aussi freinés par l'excédent structurel du marché malgré l'actuel pic saisonnier de la demande de brut et de produits pétroliers, et alors que la demande des économies émergentes donne des signes de faiblesse. L'accord entre Téhéran et les grandes puissances, qui prévoit un contrôle du programme nucléaire iranien en échange d'une levée progressive des sanctions internationales frappant le pays, ouvre la voie à l'augmentation des exportations de pétrole de ce pays membre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). Lundi, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté à l'unanimité une résolution ouvrant la voie à la levée des sanctions. Or cette perspective "ajoute aux pressions baissières alors que le marché tente d'évaluer la quantité de brut attendue" en provenance d'Iran d'ici la fin de l'année, a souligné Daniel Ang. La veille, le pétrole a terminé en baisse pour la quatrième séance consécutive à New York, cédant à des inquiétudes renouvelées sur la surabondance de l'offre alors que le dollar reste à un niveau élevé. Le cours du baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en août a perdu 74 cents à 50,15 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), après plusieurs brèves incursions sous le seuil des 50 dollars, sous lequel il n'a plus terminé depuis le 2 avril. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en septembre a perdu 45 cents à 56,65 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE). "Le marché est à la recherche d'un niveau plancher", a résumé Gene McGillian, chez Tradition Energy. Le niveau de clôture le plus bas de l'année pour le WTI remonte au 17 mars, à 43,46 dollars. Selon M. McGillian, "avec le dollar qui monte, le marché est en train de chercher le prix qui permette de prendre en compte l'idée qu'on pourrait avoir du pétrole supplémentaire sur le marché" dans les mois qui viennent, à la suite de la levée attendue des sanctions économiques visant l'Iran. En matinée, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté à l'unanimité une résolution ouvrant la voie à la levée des sanctions internationales contre l'Iran, suite à l'accord que la République islamique a conclu la semaine dernière avec les grandes puissances sur son programme nucléaire. "On dit que l'Iran dispose d'une cinquantaine de millions de barils prêts à être exportés dès que les sanctions seront levées", ce que l'accord rend envisageable pour décembre, avait expliqué à la veille du week-end Bart Melek, de TD Securities. De son côté Tim Evans, chez Citi, a souligné que le ministre iranien du Pétrole Bijan Namdar Zanganeh avait annoncé que son pays visait une production de 4,7 millions de barils par jour à terme, contre 2,85 mbj estimés en juin. M. Zanganeh aurait également affiché son intention de regagner des parts de marché quel que soit le niveau des cours. Cette perspective a stoppé le mouvement de hausse dans lequel le marché s'était embarqué au printemps, "semblant ignorer la situation globale de l'offre, en essayant de se convaincre qu'on verrait baisser la production nord-américaine", a expliqué M. McGillian. Or la production américaine reste proche de ses sommets, donc "cette offre supplémentaire plombe le marché", a-t-il précisé. La plupart des analystes constataient que le marché demeurait excédentaire, et ce malgré l'actuel pic saisonnier de la demande de brut et de produits pétroliers, et alors que la demande des économies émergentes donne des signes de faiblesse. Selon les analystes du courtier PVM, les ventes de diesel en Chine, le premier importateur de pétrole au monde, ont chuté de 10% en juin par rapport à la même période l'année précédente, tandis que les ventes d'essence ont également décliné. "La demande chinoise a aidé à absorber une partie de l'offre cette année et son ralentissement ajoute un peu plus de morosité sur les marchés", notaient les analystes de Citi. Enfin le pétrole, comme toutes les matières premières, souffrait du dollar fort, la présidente de la Réserve fédérale, Janet Yellen, ayant redit la semaine dernière son intention de rehausser les taux directeurs dès cette année. Une hausse du dollar pénalise en effet les acheteurs munis d'autres devises en rendant les achats de brut, libellés en dollars, moins attractifs car plus onéreux. Plus généralement, a estimé Tim Evans, chez Citi, "les marchés mondiaux du pétrole participent au déclin général des prix des matières premières, avec l'or qui est tombé lundi au plus bas en cinq ans".