La tenue de la 22e session des Journées de l'entreprise qui vient de se dérouler à Tunis, dans le cadre des "relations du Maghreb avec l'Asie", a été mise en exergue par l'Institut arabe des chefs d'entreprise (IACE), dirigé par le Tunisien Chakib Nouira pour s'interroger si la région du grand Maghreb devrait se préparer à recueillir des opportunités ou "plutôt à faire face à des défis, découlant de l'expansion des pays asiatiques sur tous les marchés, y compris le plus important pour les économies émergentes", à l'instar des cinq pays de l'UMA (Mauritanie, Maroc, Algérie, Libye et Tunisie). Mettant en relief la "dure concurrence" venant de l'Asie, le président de l'IACE a noté que "l'ouverture des économies asiatiques ouvrait des opportunités aux entreprises maghrébines". L'intervention du Premier ministre tunisien, M. Mohamed Ghanouchi, est allée dans le même sens, rappelant l'ampleur de la puissance économique et commerciale acquise par l'Asie, il a souligné le déferlement sur les marchés européens et américains de produits asiatiques, jadis de qualité très moyenne, et aujourd'hui très bons sur ce plan. Les questions qui se posent n'ont pas trop été éludées par M. Ghanouchi : "les intérêts de l'entreprise maghrébine sont-ils en contradiction avec ceux des pays asiatiques ? Est-il possible de profiter du développement de ces pays ?". Il estime à cet effet qu'"on doit à l'objectivité de dire que les pays maghrébins ont tiré profit" de l'émergence économique des pays asiatiques sur la scène internationale. Cela de trois manières : "d'abord nos pays ont pu obtenir des équipements technologiquement modernes à des prix raisonnables. L'intérêt manifesté par les pays asiatiques pour certains de nos appels d'offres nous a permis d'avoir des prix intéressants", énumère encore le Premier ministre tunisien pour qui, le développement asiatique a eu des retombées au Maghreb à travers le partenariat noué entre entreprises maghrébines et asiatiques.M. Ghanouchi, tempère en disant que "Les pays maghrébins ont également souffert du jaillissement économique de l'Asie sur la scène internationale, et plus particulièrement en Europe. La concurrence asiatique, on le sait, a fait très mal à plusieurs secteurs industriels". Il cite notamment le secteur du textile, le cuir et les chaussures. "En somme, la position des pays asiatiques s'est renforcée en Europe au détriment de plusieurs pays, dont les nôtres", constate M. Ghanouchi. Et même si, rappelle le Premier ministre, à titre d'exemple, "nos exportations textiles vers l'Europe ont connu une reprise en 2007, en raison des restrictions imposées par les autorités européennes, la crainte demeure pour les années à venir, en raison de la fin des restrictions concertées sur les exportations chinoises, à partir du 1er janvier 2008".S'interrogeant sur la manière de dissiper les craintes des pays maghrébins de permettre à leurs entreprises de sauvegarder leur place sur les marchés local et européen, et de profiter du développement de l'Asie, qui a permis à la Chine et à l'Inde, par exemple, d'enregistrer un taux de croissance respectivement de 10 à 8 %, le Premier ministre tunisien lance une mise en garde : "Il serait erroné de croire que le développement de l'Asie se fait au détriment de nos pays (entendre les pays de l'UMA). C'est là une vision sclérosée qui ne reflète pas la réalité et qu'il faut rectifier". La lecture que propose M. Ghanouchi est la suivante : "le développement de l'Asie donne la possibilité aux pays qui, comme la Tunisie, ont ouvert leurs économies et poussé leurs entreprises à améliorer leur productivité", d'avoir leur part de gâteau de la croissance mondiale. De plus, "le durcissement de la concurrence incite à améliorer la production, à tenir compte des besoins et exigences du consommateur, etc.". Mais pour recueillir ces fruits indirects du développement de l'Asie et du durcissement de la concurrence pour les entreprises maghrébines, le Premier ministre tunisien juge nécessaire "d'améliorer notre compétitivité, de consacrer la culture de la qualité, du travail, de l'initiative et de l'excellence, de bien exploiter nos avantages comparatifs". Et le plus important de cet avantage est "notre proximité du plus grand espace économique au monde, doté du plus grand pouvoir d'achat".