Des milliers de manifestants agitant des drapeaux libanais et scandant "Révolution !" se sont rassemblés samedi à Beyrouth pour dénoncer le gouvernement d'union nationale du Premier ministre libanais Tammam Salam, qu'ils jugent incompétent et corrompu. La paralysie politique et l'impuissance du gouvernement, conséquences des rivalités politiques et communautaires exacerbées par les crises au Proche-Orient et notamment par la guerre civile en Syrie, suscitent au sein de l'opinion publique une colère croissante. Plusieurs manifestations, parfois violentes, ont ainsi eu lieu ces dernières semaines contre la crise du ramassage des ordures ménagères. Exaspérés par cette question, les habitants de la capitale libanaise ont lancé une opération baptisée "You Stink" ("Tu pues") visant directement le gouvernement. Sous le regard des forces de sécurité, les protestataires, parmi lesquels des familles et des gens de tous les âges, ont chanté et joué de la musique dans le quartier de la place des Martyrs, qui fut le théâtre de manifestations de masse en 2005 après l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafik al Hariri. "Les gens veulent la chute du régime", scandaient quelques groupes en reprenant un slogan du "printemps arabe" de 2011. Pour les contestataires, les amas de détritus nauséabonds qui jalonnent les rues de la capitale libanaise sont le reflet des échecs d'un Etat pourri selon eux par la corruption. Samedi, Amnesty International a invité les autorités à ouvrir une enquête sur la violence des forces de l'ordre la semaine dernière lors de la dispersion d'une manifestation à Beyrouth et a invité le gouvernement à la retenue.
"Il faut une révolution" Selon l'ONG, qui cite des chiffres de la Croix-Rouge, 343 personnes ont été soignées pour des blessures et 59 autres ont été hospitalisées. Les manifestants réclament la démission du ministre de l'Environnement, l'organisation d'élections législatives anticipées et la résolution de la crise des ordures. Ils exigent également une amélioration de la qualité des services publics dans un pays où les coupures d'eau et d'électricité sont fréquentes. "Il faut une révolution pour nous libérer de ces hommes politiques", a déclaré Hani Abu Hamdan, un ingénieur de 23 ans au chômage. "Nous voulons du courant, nous voulons de l'eau, nous ne voulons pas d'ordures dans les rues." "Nous demandons depuis la semaine dernière aux Libanais pauvres et accablés et à ceux qui ont besoin de travail et de soins de nous rejoindre aujourd'hui pour cette manifestation", a dit pour sa part Khaldoun Jaber, un militant libanais qui a campé toute la nuit devant le siège du gouvernement. "Peut-être pourrons nous bâtir le Liban dont nous rêvons." Un manifestant brandissait une pancarte avec les photos des chefs des six des principaux groupes politiques du pays avec l'inscription: "Jamais plus nous ne voterons pour vous". Salah Noureddine, venu de Londres pour participer à la manifestation, a jugé que l'heure était venue d'éliminer "le système corrompu hérité de la guerre civile". "Je demande à tous les expatriés et à tous les Libanais de toutes les confessions de participer à cette manifestation. Si vous ne venez pas, nous ne réussirons pas. Si nous restons à la maison, ils gouverneront pendant encore 25 ans ou davantage."