Bien née, la nouvelle Mégane tient tête à la référence Peugeot 308 en termes d'agrément. Mais lorsqu'elle s'équipe de roues arrière directrices, on ne connaît pas de rivale à sa mesure. Unique. Asa sortie en 2008, la Renault Mégane III se targuait de mettre à la portée de la bourse du bon père de famille un niveau de protection équivalent à celui dont il aurait bénéficié au volant d'une limousine Mercedes-Benz Classe S vendue dix fois plus chère. Sept ans plus tard, la Mégane quatrième du nom décroche à son tour les meilleures notes aux tests Euro NCAP mais personne n'en a cure. Ce qui créait l'événement à l'époque où Barack Obama recevait l'investiture du Parti démocrate relève de l'évidence maintenant qu'il approche de la fin de son second mandat de Président des Etats-Unis. Les choses évoluent très vite aussi en matière d'aides électroniques à la conduite. Un temps réservés aux voitures de luxe, ces équipements sont en passe de se généraliser à tous les échelons du marché. A telle enseigne que la Renault Mégane ne fait que combler son retard sur ses concurrentes en s'équipant de l'affichage tête-haute, de la caméra de recul, du stationnement automatique, de l'alerte de franchissement de ligne, de la reconnaissance des panneaux avec alerte de survitesse, du régulateur de vitesse couplé au radar et de la détection des obstacles associée au freinage d'urgence automatique. Pire, en choisissant de ne pas livrer d'office ce dernier équipement sur toutes ses versions (option à 400 euros sur Zen et Business ; indisponible sur Life), la Mégane se prive de précieux points auprès d'Euro NCAP. Parce qu'elle est plus généreuse, sa rivale Opel Astra est réputée plus sûre. CQFD. Non, décidément, il fallait trouver autre chose que la sécurité ou les aides à la conduite pour faire parler de la nouvelle Mégane. En 2009, sa toute jeune devancière faisait étalage de sa modernité grâce à son petit écran couleurs de 5,8 pouces, command é par une molette intégrée entre les sièges. A l'époque, le nec plus ultra pour pas cher. Aujourd'hui, la Mégane IV agite les 8,7 pouces de sa spectaculaire tablette tactileR-Link 2 tel un paquet de bonbons sous le nez d'un enfant. Les technophiles la trouvent proprement irrésistible et Monsieur Tout-le-Monde se flatte d'en avoir une plus grande que son voisin. Irrésistible. Gageons que ses amis seraient moins épatés par les 7 pouces de l'écran livré sur la Mégane de milieu de gamme (version Zen). Et moins encore par la lucarne de 4,2 pouces qui équipe la Mégane Life d'entrée de gamme. Car il faut débourser 600 euros pour bénéficier de la tablette Renault R-Link 2 (de série dès le troisi ème niveau d'équipement Business). Un tarif raisonnable pour cet écran tactile plus vaste, plus lisible et plus réactif que tout ce qui existe par ailleurs sur une berline familiale compacte. Merci, LG Automotive & Vehicle Components ! D'une Mégane à l'autre, la mesure du progrès est donnée par l'évolution de la taille de son écran à cristaux liquides. C'est en effet le géant coréen de l'électronique qui fournit à Renault l'écran et son interface. Sans doute ne lui en réservera-til pas longtemps l'exclusivité, puisque chaque équipementier a vocation à diffuser sa technologie auprès du plus grand nombre possible de constructeurs. En revanche, le système de roues arrière directrices (appelé Châssis 4Control) est une création de Renault à 100 %. Et le constructeur au Losange y voit l'argument ultime pour distinguer la Mégane de ses concurrentes. Aucune ne dispose de ce genre de raffinement technique. Nous avons déjà partagé notre admiration pour ce châssis 4Control qui aide le Renault Espace et la Renault Talisman à faire oublier leurs mensurations en ville. Sur route sinueuse, elles se conduisent comme deux ballerines. Mais même dépourvue de cet artifice (- 35 kg), la Mégane à châssis conventionnel se délecte des parcours sinueux. La version Intens à moteur Diesel 1.6 dCi 130 mise à notre disposition a fait preuve d'une agilité inattendue qui rend plus inévitable encore la comparaison avec la Peugeot 308, sa rivale toute désignée. Nous ne manquerons pas d'organiser une confrontation directe mais, en attendant, il nous a semblé que la Renault est plus progressive dans ses réactions. Il n'est pas nécessaire d'aborder un virage aussi vite qu'avec la 308 pour sentir son arrière pivoter. Ce retard rend la Peugeot plus brusque et plus pointue à mener à train d'enfer. Distinguo subtile, s'il en est. Plus nette est la diffé- rence entre la direction de ces deux rivales françaises. Celle de la Mégane se montre presque aussi incisive, et on se demande si elle ne comblerait pas le petit déficit d'information dont elle souffre si elle était associée à un volant de diamètre réduit, similaire à celui de la 308. Ce dernier traduit mieux le travail accompli par les pneumatiques. Et de travail, ils n'en manquent pas dès lors que la route se fait sinueuse ! Contre toute attente en effet, le train avant de la Mégane GT glisse volontiers, malgré l'aide que lui apporter le système 4Control. Ce dernier confère une telle confiance au conducteur qu'il n'est pas rare d'aborder trop vite un virage serré. Un léger sous-virage s'ensuit. Remarquez, on pèche tout aussi aisément par excès de prudence. Les premiers temps, on se surprend à braquer systématiquement trop tôt et trop fort, avant de s'apercevoir que la Mégane GT répond mieux qu'anticip é. Encore manqué ! LES ROUES ARRIÈRE DIRECTRICES REPOUSSENT LES LIMITES DES BERLINES SIMPLES TRACTIONS Certains voient dans les dérobades du train avant de la Mégane GT la preuve d'un roulis excessif et d'une suspension trop souple, pas assez amortie. Cependant Renault Sport voulait en faire une version plus polyvalente que sa devancière, connue pour martyriser les vertèbres sur les pavés. "L'efficacité du syst ème 4Control soulage les trains roulants et les pneus d'une part du travail qu'ils accomplissent d'ordinaire", explique André Abboud, Directeur de Programme Segment C. "Nous avons ainsi pu doter la Mégane GT d'une valeur de débattement de ressorts et d'amortisseurs très proches de celle de la Mégane Diesel, pour compenser l'augmentation de 15 % du tarage." Avec des ressorts plus fermes et des pneumatiques plus larges (voire avec un amortissement piloté), le niveau d'adhérence et de performance monterait certes d'un cran, mais ces raffinements resteront l'apanage d'une probable version Mégane Renault Sport. Conduire rapidement la Renault Mégane GT oblige à revoir ses habitudes. Tout au moins lorsqu'on règle au plus incisif le système 4Control. Car le reste du temps et aux allures paisibles, son action se fait totalement oublier : ne reste que la sensation extraordinaire - quoique fugace - de braquer dans un mouchoir de poche (10,4 m de diamètre de braquage, au lieu de 11,2 m sur une Mégane conventionnelle). SUSPENSION DOUCE ET HABITACLE SILENCIEUX A rythme paisible, c'est le confort et la fluidité qui l'emportent sur toutes les impressions de conduite. Seule la commande de boîte manuelle pèche par un levier parfois accrocheur, aux débattements trop longs. La Mégane profite des mêmes fauteuils que ses grandes surs Talisman et Espace. La position de conduite se règle en tous sens et la visibilité s'avère dans la moyenne, sans plus. Car si les montants de pare-brise sont moins avancés que chez la Focus et l'Astra, les panneaux de custode ne laissent pas voir grandchose vers l'arrière. On apprécie la caméra de recul, logée dans le cur du Losange. Le sentiment de confort est encore renforcé par l'excellente insonorisation. Les bruits de roulement nous ont paru plus présents au volant de la version 1.5 dCi de 110 chevaux brièvement essayée. Elle ne souffre que d'un manque d'allonge par rapport à la version 1.6 dCi 130 au volant de laquelle nous avons couvert près de 200 kilomètres. Moyenne relevée : 6,5 l/100 km sur un terrain varié, parfois très accidenté, au lieu des 5,3 l/100 km officiels. De bon augure. La consommation s'est établie à 10,8 l/100 km au volant de la Mégane GT de 205 chevaux à boîte manuelle robotisée à double embrayage et à sept rapports EDC. Si nous ne nous étions laissé prendre au jeu de ce bref galop d'essai sur routes escarpées, il aurait été aisé de gagner un litre. Mais de là à égaler les 6 litres de moyenne officiels Dans le courant de l'ann ée 2016, Renault s'essaiera à l'hybridation avec une Mégane Diesel assistée d'une machine électrique donnée pour 76 g/km de CO2. Soit un gain de 10 à 13 % de consommation par rapport à la dCi 90 de 3,6 l/100 km. Son surcoût est inconnu pour l'heure mais Renault en attend des volumes de vente importants. BANQUETTE VASTE MAIS SANS ASTUCE La quatrième génération de la Mégane s'allonge de 64 mm pour atteindre 4,36 mètres de long. La hauteur diminue de 25 mm pour s'établir à 1,45 mètre, par souci d'élégance comme de finesse aérodynamique. Si les voies s'élargissent sensiblement, c'est sur l'insistance des designers. Les ingénieurs nous assurent que ce n'est pas une contrainte hérit ée de la plateforme CMF-C/D partagée avec la Talisman et l'Espace. La largeur aux épaules est parmi les meilleures du segment (1.441 mm à l'avant, 1.390 mm à l'arrière) et les plus de 1,80 mètre trouveront la garde-au-toit tout aussi généreuse que dans l'ancienne Mégane. Par contre, ils auront du mal à caser leurs orteils sous les sièges avant, trop bas. Le coffre avale 384 litres de bagages, à mi-chemin entre celui de la Ford Focus (363 litres) et de la Citroën C4 (408 litres). Au chapitre du portefeuille, Renault a réussi son coup en affichant un ticket d'entrée inférieur de 2.500 euros à celui de sa devancière. Mais c'est parce qu'elle étrenne une version dégonflée du 4-cylindres essence 1.2 TCe (ramené de 130 à 100 chevaux). Le reste de la gamme semble calqué à cent ou trois cents euros près sur celle de la Peugeot 308, à équipement équivalent. Ce qui laisse un avantage de presque deux mille euros à l'Opel Astra toute récente.