Le pétrole et la Chine: ces deux leitmotivs des marchés depuis la fin 2015 ont encore dominé Wall Street cette semaine, lui donnant plutôt du soutien, et devraient rester au premier plan les prochaines séances, puisque l'actualité économique américaine sera limitée. Lors des quatre dernières séances, lundi ayant été férié aux Etats-Unis, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a gagné 2,62% à 16 391,99 points et le Nasdaq, à dominante technologique, 3,85% à 4 504,43 points. Jugé le plus représentatif par de nombreux investisseurs, l'indice élargi S&P 500 a avancé de 2,84% à 1 917,78 points. "Il ne faut pas se voiler la face, la corrélation avec l'énergie est toujours là", a reconnu Gregori Volokhine, de Meeschaert Financial Services. "L'énergie remonte, les marchés remontent fortement, l'énergie rebaisse, les marchés rebaissent." Plus précisément, les cours du pétrole, qui avaient fini la semaine précédente sur un bond après avoir chuté au plus bas depuis 2003, sont parvenus à continuer à avancer après l'annonce d'un accord de gel de la production entre l'Arabie saoudite et la Russie, même si un net repli vendredi montre que le marché de l'or noir reste très incertain. "Le pétrole continue à donner le ton sur les marchés", a renchéri Tom Cahill, de Ventura Wealth Management, pour qui cet accord "n'est qu'un début". "Tant qu'il n'y aura pas de stabilisation du pétrole, les marchés resteront instables", a-t-il prédit. Autre grande inconnue à l'entame de la semaine, la Chine, dont les marchés étaient restés fermés plusieurs séances pour le nouvel an local, s'est avérée un facteur encourageant lorsque les investisseurs américains sont revenus d'un week-end de trois jours. "Le marché avait peur de deux choses en ouvrant mardi matin, c'était que les Bourses asiatiques et chinoises plongent et que le yuan soit attaqué", a rappelé M. Volokhine. "Ce qui a été une très bonne surprise, c'était l'indication que la Chine soutient le yuan." La banque centrale chinoise (PBOC) a rassur é dès dimanche en affirmant qu'il n'y avait pas de raison pour que le yuan se déprécie encore, et assuré qu'elle continuerait d'utiliser ses gigantesques réserves de changes pour défendre son cours. DIVIDENDES EN BAISSE Dans ce contexte, "la semaine prochaine semble un peu légère en matière d'actualité économique" aux Etats-Unis, a prévenu M. Cahill, rappelant tout de même que serait donnée vendredi une nouvelle estimation de la croissance américaine au dernier trimestre 2015. "Comme il n'y a pas grand-chose à regarder, les investisseurs vont continuer à surveiller le pétrole et le yuan", a-t-il commenté, estimant que les interrogations sur la politique de la Réserve fédérale (Fed) passaient au second plan. Les responsables de la banque centrale multiplient les propos témoignant de leur réticence à augmenter les taux américains lors de sa réunion de mars, ce qu'a semblé confirmer mercredi le compte-rendu de leur précédente rencontre en janvier, même si des chiffres corrects sur l'inflation ont un peu relancé en fin de semaine les spéculations sur ce thème. M. Cahill estimait tout de même que l'attentisme sensible dans le compte-rendu de mercredi avait donné du baume au coeur à un marché déprimé par "des résultats d'entreprises amé- ricaines qui ne sont absolument pas encourageants". Une grande majorité des groupes du S&P 500 ont annoncé leurs résultats du dernier trimestre et, en moyenne ils témoignent d'une baisse de quelque 5% de leurs bénéfices sur un an, selon les chiffres de M. Cahill. De plus, selon des données publiées par Howard Silverblatt, analyste chez S&P Dow Jones Indices, on assiste à un bond du nombre d'entreprises qui baissent leur dividende, un élément sensible à Wall Street car il représente une récompense pour les actionnaires, même si le montant total des versements continue à augmenter. Désormais, bien que la saison des résultats s'achève, "la semaine prochaine ne sera pas inintéressante car on va avoir de bonnes indications sur la consommation avec des groupes majeurs comme Home Depot, Target, Macy's ou Gap", a pré- venu M. Volokhine. Reste qu'il est "dur de faire le lien entre le comportement du marché" et l'actualité économique américaine, a-t-il conclu, mettant lui aussi l'accent sur l'influence dominante de la situation internationale. UNE BONNE SEMAINE Wall Street a fini la semaine sans tendance vendredi, tiraillée par les performances divergentes de plusieurs secteurs, ce qui lui a permis de conserver les gains effectués le reste de la semaine: le Dow Jones a perdu 0,13% mais le Nasdaq a pris 0,38%. "On fait face à une situation mitigée sur le plan économique et c'est ce que reflète la séance incertaine d'aujourd'hui", a résumé Jack Ablin de BMO Private Bank, évoquant "une attitude attentiste". Premier élément notable du jour, les cours du pétrole qui avaient connu une embellie en début de semaine ont pesé sur le secteur de l'énergie par une nette rechute, sans actualit é particulière si ce n'est un retour des investisseurs à la prudence face au niveau élevé de l'offre. Seconde actualité dominante, l'annonce de chiffres meilleurs que prévu sur l'inflation américaine de janvier, qui a pris une pente ascendante en dépit de la poursuite de la baisse des prix de l'énergie, n'a guère donné de direction aux indices. "Avec cette statistique, l'inflation est un tout petit peu revenue dans les esprits, et cela met la pression sur des secteurs comme les groupes de télécommunications ou les services aux collectivités, qui avaient le mieux résisté" à un début d'année difficile, "dans l'idée que la hausse des prix n'existait plus", a tout de même remarqué Gregori Volokhine, de Meeschaert Financial Services. Plus généralement, ce chiffre remet sur la table une hausse des taux directeurs par la Réserve fédérale (Fed) en mars, alors que les responsables de la banque centrale s'étaient récemment montrés très prudents quant à la poursuite de la réduction des mesures de soutien à l'économie. Quoi qu'il en soit, Wall Street "achève une semaine de hausse, pendant laquelle les Bourses européennes asiatiques ont aussi monté", ont mis en avant les experts de Charles Schwab, même si d'autres observateurs, comme M. Ablin, craignent que la tendance à la baisse, observée pendant tout le début de l'année, ne soit pas terminée. APPLIED MATERIALS MONTE Parmi les victimes de la baisse des cours de l'or noir, les groupes pétroliers Devon et ConocoPhillips ont respectivement perdu 2,46% à 32,87 dollars et 5,33% à 18,65 dollars, alors que les majors Chevron (- 0,27% à 86,50 dollars) et ExxonMobil (+0,06% à 82,50 dollars) ont mieux résisté. Le groupe internet Yahoo! a gagné 2,11% à 30,04 dollars après la mise en place d'un comité indé- pendant pour l'aider à trouver les meilleures options afin de se relancer. Pour le reste, le marché faisait face à des résultats plutôt décevants, comme ceux du constructeur Deere, qui a perdu 4,15% à 77,00 dollars après un déclin trimestriel de ses ventes mondiales, expliqué par "la faiblesse des marchés internationaux d'équipements agricoles et de construction". Egalement dans le secteur, Fluor a baissé de 2,32% à 45,38 dollars, après avoir lui aussi annoncé un net déclin de son chiffre d'affaires au dernier trimestre, au cours duquel ses comptes se sont inscrits dans le rouge. La chaîne de grands magasins Nordstrom a chuté de 6,73% à 49,17 dollars après une nette baisse de son bénéfice net trimestriel. Aussi dans la distribution, la chaîne de vêtements VF Corporation, dont les ventes ont baissé de 5% au dernier trimestre, a perdu 4,41% à 58,55 dollars. Rare bonne surprise, le fabricant de semiconducteurs Applied Materials, dont les bénéfices ont dépassé les attentes, a soutenu le secteur technologique en bondissant de 7,05% à 18,38 dollars. Le march é obligataire reculait légèrement. Vers 21H30 GMT, le rendement des bons du Trésor à dix ans montait à 1,754% contre 1,735% jeudi soir, et celui des bons à 30 ans à 2,614%, contre 2,607% précédemment. De son côté, l'euro valait 1,1131 dollar contre 1,1105 dollar jeudi vers la même heure. La monnaie europ éenne se repliait face à la devise nippone, à 125,36 yens contre 125,76 yens jeudi soir. Le dollar reculait face à la monnaie japonaise, à 112,62 yens contre 113,24 yens la veille au soir. Sur le London Bullion Market, l'once d'or a terminé à 1 231,15 dollars vendredi au fixing du soir, contre 1 239,75 dollars le vendredi pré- cédent. L'once d'argent a clôturé à 15,37 dollars, contre 15,64 dollars il y a sept jours.