Longtemps considérée comme étant un pays de transit, l'Algérie est désormais exportatrice de harraga, des personnes qui, pour une raison ou une autre, préfèrent laisser le peu qu'elles ont et tenter de rejoindre les côtes européennes clandestinement. Un parcours risqué puisque c'est la mort qui guette souvent ces aventuriers, ces suicidaires. Des chiffres avancés par le commandement des forces navales algériennes affirment, en effet, que ce phénomène prend de l'ampleur, en Algérie. Ils démontrent que, 1 530 émigrés clandestins ont été arrêtés en 2007, dont 1.485 sont des Algériens. Des arrestations qui englobent l'arraisonnement en mer (1 377 personnes) et le débarquement au niveau du port (153). Dans une déclaration faite à l'APS, le lieutenant-colonel Slimane Defaïri, responsable de la cellule de communication au commandement des forces navales, a indiqué que ces chiffres sont en hausse comparativement aux deux dernières années : 335 harraga interceptés en 2005 et 1 016 en 2006. Des statistiques qui n'incluent pas les morts et les disparus ou ceux qui ont pu arriver à "bon port". Puisque, un autre décompte recense le repêchage de 83 corps sans vie de candidats à l'émigration clandestine, et ce, depuis 1er janvier à ce jour. "60 % des corps repêchés, qui étaient dans un état de décomposition très avancé, n'ont pas été identifiés", a précisé le lieutenant-colonel Defaïri, ajoutant que la plupart des autres cadavres (identifiés) sont de nationalité algérienne. Le nombre de cadavres repêchés connaît, ainsi, une certaine augmentation depuis deux ans, passant de 29 corps en 2005 à 73 en 2006. C'est dire que le phénomène de l'émigration clandestine a pris des proportions alarmantes mais pas seulement en Algérie. Conscientes de l'importance de ce problème, les autorités algériennes sont déterminées à prendre des mesures à même de juguler, dans une certaine mesure, ce fléau. La dernière rencontre gouvernement-walis du mois d'octobre 2007 a été consacrée au thème de la jeunesse. En ce sens, le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, a annoncé, lors de cette rencontre, l'élaboration d'une "nouvelle politique d'intégration" de la jeunesse. Cette politique tend, en fait, à "améliorer l'efficacité des actions engagées et à rénover les méthodes de travail". La question des harraga a aussi fait l'objet d'une rencontre-débat ayant réuni des experts de différents horizons et nationalités. Cette rencontre a été organisée à Alger par le ministère de la Solidarité nationale, le mois de septembre dernier, et avait porté sur les causes contraignant les jeunes à émigrer au péril de leur vie. Une rencontre au cours de laquelle l'accent a été particulièrement mis sur la nécessite d'intégrer la communication au cœur de la stratégie nationale visant la prise en charge du phénomène des harraga. Un travail qui doit se renforcer à travers la consolidation du dispositif juridique encadrant la lutte contre l'émigration clandestine. Un dispositif jugé "assez clément" dans sa forme actuelle, selon certains observateurs. Alors que d'autres appellent à améliorer la situation des jeunes et à mettre leurs préoccupations au cœur de toutes les stratégies.