L'année 2007 aura été marquée par le défi qu'a lancé l'Amérique du Sud au FMI et à la Banque mondiale, par la création de la Banque du Sud regroupant sept pays (Venezuela - Argentine - Brésil - Bolivie - Equateur et Paraguay), et dont l'objectif premier est de s'affranchir de la tutelle de ses deux vénérables institutions financières internationales pour ensuite s'adonner à son rôle de développement économique. Cette nouvelle institution régionale, qui sera opérationnelle à partir de 2008, c'est-à-dire dans quelques jours, financera en priorité des projets d'infrastructures dans les sept pays initiateurs du projet. La création de la banque sur une idée du président vénézuelien Hugo Chavez, constitue une victoire pour ce dernier et pour le Tiers-monde. Le président du Venezuela, leader de la gauche latino-américaine, qui en 2006 s'est fixé une alternative aux deux institutions financières internationales, accusées d'être alignées sur Washington et d'imposer aux pays en développement des potions libérales, a réussi, sans peine, à convaincre son homologue argentin Nestor Kirchner. La Bolivie, l'Equateur et le Paraguay, parents pauvres du continent ont suivi. Donc, l'astuce mise en œuvre par le président Hugo Chavez pour contrer le FMI et la BM et plus largement l'influence financière de Washington s'est concrétisée par la naissance de la Banque du Sud. L'idée de Chavez consiste à profiter de la bonne santé de l'économie régionale pour affronter les secousses financières et financer les besoins en infrastructures. La banque est dotée à son départ d'un capital de 7 millions de dollars. Le premier financement à l'étude est celui d'un gigantesque gazoduc de 12 500 km qui doit relier Caracas, la Paz et Buenos Aires et permettre de régler les problèmes énergétiques de la région. L'institution est surtout financée par les réserves internationales des pays de la région, dopées par la hausse des exportations de matières premières, aujourd'hui placées dans les banques et les institutions financières du Nord ; ces réserves seraient ainsi réorientées vers l'Amérique du Sud, afin de financer son développement. Et cela sans les exigences requises par les institutions actuelles qui, en échange de leur secours financier, infligent un véritable châtiment aux peuples et interviennent dans les décisions économiques des pays, selon Hugo Chavez. Une allusion bien nette au FMI qui exige des pays qu'il assiste dans la conduite de leur politique économique un excédent budgétaire pour rembourser le service de leur dette. L'initiative réussie du président Chavez avec la banque Del Sur, reflète bien le sentiment vis-à-vis des institutions de Bretton Woods, le FMI et la BM. Elles sont jugées responsables en grande partie des politiques libérales "sauvages" des années 80 et 90 qui ont mené plusieurs pays latinos à la banqueroute. "Nous sommes tous des enfants des crises causées par le FMI" dénonçait le président vénézuélien Hugo Chavez. Au cours de l'année 2007, le Brésil, l'Argentine, le Venezuela et l'Equateur ont soldé leur dette vis-à-vis du FMI afin de ne plus avoir à lui rendre des comptes. Chaque remboursement témoigne de la même volonté de se libérer de l'intrusion de l'organisme dans les choix économiques des pays sud-américains. La désignation du Français Dominique Strauss Kahn à la tête du FMI a montré que ce poste revient toujours à un Européen par tradition. Les Sud-américains n'apprécient pas ce mécanisme qui, d'après eux, exclut une bonne partie du monde. "El Banco Del Sur, un pied du nez au FMI, prouvera qu'elle est une institution utile au développement de la région et non une simple structure bureaucratique", clame Hugo Chavez. Concrètement, la création de cette institution commune entre les sept pays latino-américains témoigne de la fin d'une époque en matière économique. Alors que les années 1990 ont été marquées par le consensus de Washington avec le FMI comme grand ordonnateur, et par le rejet de ses recettes par la majorité des pays d'Amérique latine, cette nouvelle étape marque que la région cherche à recouvrer son autonomie. L'accumulation des réserves de change par les banques centrales de la région s'inscrit dans le même processus et témoigne de la volonté de ces pays à commencer à imaginer leurs propres solutions, après avoir constaté que les exigences des organismes de crédits internationaux n'avaient fait qu'exacerber leurs problèmes. En attendant la seconde phase qui a pour finalité le lancement d'une monnaie unique l'un des objectifs de la Banco Del Sur, est de parvenir à un équilibre régional afin que les pays les plus pauvres et qui manquent le plus d'infrastructures puissent réellement se développer et ne dépendent plus des organismes internationaux ni des pressions et des chantages de Washington pour l'obtention des prêts destinés à la production et au développement économique.