L'Allemagne devrait avoir enregistré une croissance confortable au premier trimestre, estiment les analystes au vu de chiffres publiés mardi, prévenant toutefois qu'il sera difficile de maintenir cette dynamique intacte au deuxième trimestre en raison d'inquiétudes pour la production industrielle du pays. L'Office fédéral de statistiques Destatis doit dévoiler vendredi une première estimation de la croissance du Produit intérieur brut (PIB) de la première économie européenne pour la période allant de janvier à mars. "Le premier trimestre s'est déroulé de manière positive en Allemagne en ce qui concerne la conjoncture. La forte production industrielle au début d'année y a sensiblement contribué", estime Stefan Kipar, économiste chez BayernLB. Sur les trois premiers mois de l'année, la production industrielle en Allemagne ressort en hausse de 1,8% par rapport au précédent trimestre, selon des chiffres publiés mardi par le ministère de l'Economie. Un résultat dû essentiellement à un bond de plus de 3% en janvier sur un mois. Après un repli de 0,7% en février, la production s'est tassée de 1,3% en mars. Combinés aux dernières statistiques du commerce extérieur faisant état d'une hausse de 1,9% des exportations en mars, "les chiffres de la production industrielle plaident en faveur d'une forte croissance économique au premier trimestre", estime Ralph Solveen, de Commerzbank. Les analystes interrogés par le fournisseur de services financiers Factset tablent sur une hausse de 0,5% du PIB allemand sur cette période. Au quatrième trimestre 2015, elle avait été de 0,3%.
"Enfant à problèmes" Pour autant, "nous attendons déjà un taux de croissance bien plus faible au deuxième trimestre", ajoute M. Solveen. Les commandes passées à l'industrie allemande ont certes progressé de 1,9% en mars, selon un chiffre publié lundi, mais le coup de mou de la production en février et mars, qui fait suite à un accès de faiblesse fin 2015, alimente les doutes parmi les analystes. "Une partie de ce recul est peut-être liée au timing précoce des vacances de Pâques, mais la tendance de fond n'est pas vraiment prometteuse. (...) Les données d'aujourd'hui sont un nouveau rappel que la production industrielle est devenue une sorte d'enfant à problème de l'économie allemande", souligne Carsten Brzeski, économiste chez ING-Diba. Ces derniers mois, les inquiétudes ont commencé à monter en Allemagne, l'un des pays les plus exportateurs du monde, sur les répercussions sur sa propre économie du ralentissement de la croissance dans plusieurs zones du monde, notamment sur de grands marchés émergents comme le Brésil ou la Chine, et de la chute des prix du pétrole, qui réduit les achats des pays producteurs. Autrefois portée par les exportations, l'économie allemande est désormais soutenue principalement par la demande intérieure, grâce notamment à un marché du travail solide et créateur d'emplois, et des salaires en hausse. Problème, le dynamisme de la consommation intérieure n'a pas encore conduit à un boom de la production de l'industrie du pays, relèvent certains observateurs.
Nouveaux moteurs de croissance Ainsi, si les chiffres de la croissance allemande devraient rester satisfaisants, "un tableau plus alarmant est en train d'émerger sous la surface. L'économie n'est plus tirée par sa vieille formule à succès mais par de nouveaux facteurs: la consommation, la construction et les services, une formule qui n'offre aucune garantie de succès durable", s'inquiète M. Brzeski. Le gouvernement allemand attend cette année une croissance du Produit intérieur brut (PIB) de 1,7%, et 1,5% l'année prochaine. Autre moteur pour la croissance, l'Allemagne, qui a accueilli en 2015 plus d'un millions de demandeurs d'asile, devrait encore profiter des dépenses supplémentaires engagées par l'Etat pour accueillir et intégrer le très grand nombre de réfugiés de guerre arrivant dans le pays. Pour 2017, une enveloppe globale de quelque 10 milliards d'euros est, par exemple, prévue. Face à cet afflux, le Fonds monétaire international (FMI) aimerait voir l'Allemagne agir davantage pour faciliter l'intégration des réfugiés sur le marché de l'emploi, selon un rapport publié lundi qui recommande également d'accentuer réformes structurelles et investissements.