Wall Street, qui sort d'une semaine incertaine face à des éléments contradictoires sur la consommation américaine, restera probablement dominée lors des prochaines séances par les incertitudes sur la santé de l'économie des Etats-Unis. Depuis le week-end précédent, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a perdu 1,16% à 17 535,32 points, le Nasdaq, à dominante technologique, 0,39% à 4 717,68 points, et l'indice élargi S&P 500 0,51% à 2 046,61 points. "Difficile de parler de cette semaine", a reconnu Hugh Johnson, de Hugh Johnson Advisors. "Il n'y avait pas de tendance et c'était très erratique, sans actualité susceptible d'imposer une direction." Les investisseurs ont dû attendre la dernière séance avant le week-end pour prendre connaissance de l'indicateur majeur de la semaine, un chiffre sur les ventes de détail d'avril, qui s'est avéré franchement favorable et donc de bon augure au moment où les observateurs prêtent une attention particulière à la consommation américaine. "Cela met dans une bonne disposition pour la semaine prochaine", a estimé M. Johnson. "En ce moment, la grande question c'est si l'on va assister à un rebond de l'économie américaine au second trimestre, et le chiffre sur les ventes de détail y a en partie répondu." Pour l'heure, Wall Street semble pourtant être restée en retrait face à ce chiffre, comme à une forte hausse favorable du moral des ménages ce mois-ci, elle aussi encourageante pour la consommation. "C'est difficile à comprendre car on a pris connaissance cette semaine de nombreux résultats catastrophiques dans la distribution", a expliqué Tom Cahill, de Ventura Wealth Management. "Cela envoie des signaux contradictoires sur la solidité de la consommation américaine." Principale victime de ces mauvaises performances, la chaîne de grands magasins Macy's, qui a nettement révisé en baisse ses prévisions annuelles, a chuté de quelque 17% sur la semaine.
Minutes de la Fed "Comment résoudre cette contradiction ?", a commenté Gregori Volokhine, de Meeschaert Financial Services. "C'est une semaine qui a révélé le changement de style de consommation des Américains: les achats sur internet commencent à atteindre un nouveau secteur, celui des vêtements." Lus à cette aune, les mauvais résultats des grands magasins ne seraient donc pas si inquiétants pour l'ensemble de la consommation, puisqu'elle se déporte vers des groupes comme Amazon, en hausse de plus de 5% sur la semaine. "Et quand quelque chose commence aux Etats-Unis, cinq ans après on le retrouve en Europe", a insisté M. Volokhine. "Le problème de Macy's aujourd'hui, ce sera celui des Galeries Lafayette ou du Bon marché dans cinq ans." Après des éléments aussi contrastées, Wall Street risque de manquer la semaine prochaine d'éléments susceptibles de répondre à ses interrogations sur un éventuel rebond de l'économie, car aucun indicateur ne sera aussi décisif que la bonne surprise des ventes de détail ou le rapport mensuel publié début mai sur l'emploi, qui s'était lui révélé décevant. Les investisseurs prendront tout de même connaissance de chiffres sur l'immobilier (lundi et mardi) ainsi que sur l'inflation (mardi) et, même si la saison trimestrielle des résultats d'entreprises est largement terminée, certains groupes comme Home Depot (mardi) et Wal-Mart (jeudi) doivent encore publier leurs chiffres, qui aideront à préciser plus avant l'état du secteur de la distribution. "Même s'il n'y aura pas d'indicateur très passionnant, tout cela contribuera à donner une idée de ce que la Réserve fédérale (Fed) pourrait faire de ses taux", a conclu M. Cahill. "Bien sûr, le plus important, ce sera la publication du compte-rendu de la réunion d'avril de son comité de politique monétaire." La banque centrale américaine, qui se montre peu encline à agir depuis le début de l'année pour réduire son soutien à l'économie, publiera mercredi ces "minutes" et les investisseurs, qui pour le moment ne redoutent guère qu'elle monte ses taux dès sa prochaine réunion en juin, y chercheront des indices quant à ses intentions.
Sans énergie malgré de bons chiffres Wall Street a fini la semaine en baisse malgré de bons chiffres sur la consommation, cédant à un marché du pétrole en baisse et des résultats d'entreprises mitigés: le Dow Jones a perdu 1,05% et le Nasdaq 0,41%. "On voit une lassitude s'installer", a commenté Chris Low, chez FTN Financial, et "depuis qu'on a touché le sommet de l'année le 20 avril, on a du mal à rester en hausse". En début de matinée, les indices avaient tenté de monter, encouragés par de bonnes statistiques. Les ventes de détail, considérées comme un révélateur clé de l'appétit de consommation des Américains, principal pilier de l'économie, ont affiché leur plus forte hausse en treize mois en avril, à raison de 1,3%. Parallèlement les prix à la production ont rebondi, certes un peu moins qu'attendu (+0,2%). Puis le moral des ménages évalué par l'Université du Michigan est apparu en forte hausse en mai. Mais cette série de bons chiffres, au lendemain de déclarations de responsables de la Réserve fédérale favorables à un resserrement monétaire, "donne de quoi réfléchir" selon M. Low. Mace Blicksilver, chez Marblehead Asset Management, estimait aussi que les investisseurs modéraient leur enthousiasme devant les indicateurs, d'une part parce que la progression des ventes de détail profite plus au commerce en ligne qu'aux magasins, et "parce qu'on a toujours le souci que la Réserve fédérale puisse rehausser les taux d'intérêt" prochainement si elle estime l'économie en suffisamment bonne santé. Enfin, les cours du pétrole sont restés en baisse toute la séance, pesant sur le secteur de l'énergie, tandis que de mauvaises performances parmi des distributeurs plombaient les valeurs liées à la consommation.
L'informatique se reprend La chaîne d'habillement JC Penney a cédé 2,82% à 7,58 dollars après des pertes moins graves que prévu, mais assorties de chiffres de ventes décevants et de prévisions revues en baisse. Les grands magasins Nordstrom ont dégringolé de 13,42% à 39,16 dollars après un bénéfice inférieur de presque moitié aux attentes, un chiffre d'affaires décevant et des prévisions revues à la baisse. Leur concurrent Dillard's a perdu 1,29% à 59,86 dollars, pénalisé par des bénéfices et des ventes décevantes. La chaîne de restauration rapide Shake Shack a bondi de 9,75% à 37,60 dollars après des résultats meilleurs que prévu, avec notamment un bond de presque 10% des ventes à périmètre constant, et des prévisions relevées. Le fabricant de semi-conducteurs Nvidia s'est envolé de 15,21% à 40,98 dollars après des résultats en hausse qui ont heureusement surpris, grâce à l'engouement des amateurs de jeux vidéo pour ses composants haut de gamme. Apple, qui était passé provisoirement sous la barre de 90 dollars l'action la veille pour la première fois depuis presque deux ans, a gagné juste 0,20% à 90,52 dollars après avoir annoncé un investissement d'un milliard de dollars dans un service de voitures avec chauffeur en Chine, Didi Chuxing. Le joailler Tiffany's a perdu 2,92% à 64,43 dollars après l'annonce du départ imprévu de son directeur financier Ralph Nicoletti, débauché par Newell Brands (-2,16% à 47,49 dollars), fabricant des stylos Parker et des boîtes alimentaires en plastique Rubbermaid.
Tokyo finit en baisse L'indice Nikkei de la Bourse de Tokyo, pourtant en hausse vendredi en début de séance après déjà quatre jours positifs, s'est finalement replié de 1,41%, affecté par l'instabilité du yen et certains résultats de sociétés. Le Nikkei des 225 valeurs vedettes a perdu 234,13 points en clôture, à 16 412,21 points, après avoir changé de direction à la mi-séance. L'indice élargi Topix de tous les titres du premier tableau a abandonné pour sa part 1,28% (17,08 points) à 1 320,19 points. Sur les 225 composantes du Nikkei, 190 ont baissé, 28 augmenté et 7 baissé. Plusieurs actions retenaient plus particulièrement l'attention, parmi lesquelles celle du constructeur d'automobiles Nissan qui avait annoncé jeudi une prise de participation de 34% dans Mitsubishi Motors en proie à un vaste scandale de maquillages de données relatives à la consommation énergétique de ses véhicules.
Nissan grimpe, Mitsubishi Motors baisse L'action Nissan a in fine réalisé la 5e meilleure performance du jour parmi les valeurs du Nikkei, avec un gain de 4,09% à 1.028,50 yens, après avoir gagné plus de 7% en début de séance. Mitsubishi Motors a perdu au contraire 1,74% à 565 yens alors que les autorités nippones ont conduit de nouvelles perquisitions dans des locaux du groupe vendredi matin, selon les médias. Toyota a lâché de son côté 1,78% à 5.454 yens et Honda Motor, qui a annoncé ses résultats annuels vendredi après-midi après la clôture, a fléchi de 2,17% à 2.956,50 yens. Les investisseurs s'intéressaient aussi à Sharp (+2,31% à 133 yens, après un gain de près de 7% en journée). Le groupe a fait état jeudi d'une perte nette massive de quelque 2 milliards d'euros en 2015/16, pour la deuxième année de suite mais les investisseurs voient peut-être d'un bon œil le fait qu'il pourrait supprimer jusqu'à 7.000 emplois sur des effectifs de 43.000 salariés dans le monde, selon la presse. L'agence Bloomberg a précisé qu'il avait adressé une lettre à Sharp pour préciser qu'une réduction de la main-d'œuvre était une nécessité, sans donner de nombre. Toujours dans le domaine de l'électronique, Sony s'est distingué par une augmentation de 1,65% à 2.897 yens. Le groupe a pris des dispositions face à la hausse du yen et n'est désormais plus pénalisé si la devise nippone s'envole. Panasonic a au contraire perdu 3,59% à 918,90 yens. Quant à Toshiba, qui a annoncé ses résultats calamiteux jeudi, il a pris 1,44% à 226,10 yens, ayant promis un retour dans le vert dès cette année comptable qui sera bouclée en mars 2017.