Après le groupe PSA, c'est au tour de son concurrent Renault d'avancer ses pièces sur le prometteur échiquier du marché automobile iranien libéré des sanctions, en annonçant vendredi un nouvel accord de co-entreprise dans le pays. Le groupe au losange et le gouvernement iranien ont en effet signé en marge du Mondial de l'automobile, à Paris, un "accord stratégique" pour la création d'une nouvelle joint-venture en Iran, selon un communiqué. L'objectif de cet accord est notamment de porter de 200.000 à 350.000 unités la capacité de production de véhicules au losange via une usine qui commencera à fonctionner en 2018, a précisé l'entreprise. "Renault sera actionnaire majoritaire" de cette co-entreprise dont le partenaire sera "IDRO, fonds d'investissement et de rénovation de l'industrie en Iran", a indiqué le groupe français, sans toutefois communiquer le montant de l'investissement consenti. "La joint-venture intègrera d'une part, un centre d'ingénierie et d'achat qui favorisera le développement des fournisseurs locaux, et d'autre part une usine d'une capacité de production de 150.000 véhicules par an dans un premier temps, qui s'ajoutera aux capacités existantes du groupe dans le pays de 200.000 véhicules", selon la même source. De son côté, le ministre iranien de l'Industrie Mohammad Reza Nematzadeh, qui a lui-même signé l'accord à Paris avec le P-DG de Renault Carlos Ghosn, a expliqué que l'accord de co-entreprise prévoyait 60% pour Renault et 40% du côté iranien. A terme, la capacité installée des usines de Renault en Iran atteindra 500.000 unités par an, a poursuivi M. Nematzadeh. "Nous n'étions pas venus [à Paris] pour cela, mais nos équipes ont heureusement réussi à accélérer les négociations", a-t-il commenté. "Avec deux millions de véhicules prévus à l'horizon 2020, le potentiel du marché automobile iranien est indéniable. Cet accord conforte nos choix stratégiques faits en Iran et ouvre une nouvelle ère en permettant à Renault d'occuper une position privilégiée dans le pays", a assuré M. Ghosn, cité dans le communiqué. "Potentiel très important" Le 21 juin dernier, le concurrent français de Renault, le groupe PSA, avait signé un accord final de co-entreprise avec un de ses partenaires historiques, Iran Khodro, pour produire des Peugeot, scellant son retour industriel dans le pays dans la foulée de la levée de sanctions internationales. La co-entreprise PSA-Iran Khodro doit déboucher sur une production de Peugeot 208, 2008 et 301 dès le second semestre 2017. Et fin juillet, PSA a indiqué avoir également signé un accord pour réintroduire sa marque Citroën en Iran via une co-entreprise avec la société Saipa. Le président du directoire de PSA, Carlos Tavares, a prévu de se rendre la semaine prochaine dans le pays pour concrétiser ces engagements, a-t-il confié jeudi. Les sanctions, imposées à l'Iran en raison de son programme nucléaire controversé, avaient contraint PSA à quitter le pays en 2012, un coup très dur pour le groupe automobile à l'époque lié à l'Américain General Motors, alors que l'Iran constituait son deuxième débouché en volume après la France. Renault est de son côté resté en Iran pendant la crise nucléaire. "En 2015, les ventes du groupe ont progressé de 56,1% par rapport à 2014 pour un total de 51.500 véhicules et une part de marché de 4,8%", a fait valoir le groupe vendredi. L'Iran est considéré comme l'un des marchés automobiles au plus fort potentiel de croissance. Le taux d'équipement y est inférieur à 100 voitures pour 1.000 habitants, six fois moins que dans l'Union européenne, et ses consommateurs y sont non seulement solvables mais aussi friands de modèles bien équipés. "L'Iran est un grand pays de l'automobile, qui a beaucoup souffert des sanctions économiques, et il y a une nouvelle ère qui démarre", a commenté Flavien Neuvy, directeur de l'Observatoire Cetelem de l'automobile, en évoquant un "potentiel très important" pour le secteur. "La rente pétrolière va revenir, ce qui va permettre au niveau de vie de la classe moyenne d'augmenter, et on sait très bien que le niveau de motorisation est corrélé au niveau de vie d'un pays", a-t-il indiqué. Renault "déterminé à collaborer" sur le dossier des émissions polluantes Le patron de Renault Carlos Ghosn s'est dit vendredi "totalement déterminé à collaborer à tous les niveaux" sur le dossier des émissions polluantes des voitures diesel, à l'occasion du Mondial de l'automobile. "Je suis totalement déterminé à collaborer à tous les niveaux" et "prêt à ouvrir tout", y compris les logiciels de gestion des moteurs comme l'a demandé la Commission d'experts indépendants nommée par la ministre de l'Environnement, a déclaré M. Ghosn. Le dirigeant de la marque au Losange a fait valoir qu'il n'existe "pas de règles officielles" sur les émissions de diesel et a estimé qu'il appartenait non pas à l'industrie automobile de les définir mais "seulement au gouvernement ou la Commission européenne" dans un souci de "rétablir la confiance" des consommateurs. "Je ne crois pas que l'industrie automobile puisse dire ce qui est acceptable ou pas", a-t-il déclaré, soulignant que "la plupart des pays (où sont menées des enquêtes) disent qu'ils ne trichent pas". A ses côtés, le patron de Daimler, dont la marque Mercedes utilise des moteurs diesel Renault, Dieter Zetsche, a assuré qu'il ne se sentait "pas pris au piège" alors que l'enquête de la Commission présidée par Ségolène Royal, mise en place après le scandale des moteurs diesel truqués chez le constructeur allemand Volkswagen, suit son cours. "Nous sommes également d'accord pour améliorer au maximum nos logiciels en vue d'atteindre la performance que les clients continuent de réclamer", a déclaré M. Zetsche. La commission mise en place à l'automne 2015 pour enquêter sur les émissions polluantes des voitures diesel n'a pas exclu fin juillet que d'autres constructeurs recourent à des logiciels "tricheurs". Elle va poursuivre ses travaux et mener des "tests complémentaires" pour approfondir ses conclusions, a annoncé la semaine dernière Ségolène Royal. La ministre a démenti en août des informations de presse faisant état de l'existence d'omissions dans le rapport de la commission d'enquête, destinées à protéger le constructeur français Renault. Le quotidien britannique Financial Times, citant des sources anonymes, avait affirmé que pendant le déroulement des tests du modèle Renault Captur, le système de dépollution du moteur effectuait des purges comme si le véhicule avait détecté qu'un essai était en cours.