Le constructeur automobile français Renault a enregistré une hausse de 3,3% de ses ventes mondiales en 2015 à 2,8 millions d'unités, grâce au dynamisme de son principal marché, l'Europe, a-t-il annoncé hier. Le groupe au Losange (Renault, Dacia et Samsung Motors) a écoulé l'année dernière 1,6 million de voitures particulières et utilitaires sur le Vieux continent, en progression de 10,2% par rapport à 2014, mais dans le reste du monde ses ventes ont reculé de 4,8%, notamment à cause de la déprime persistante en Russie et Amérique latine, a précisé l'entreprise dans un communiqué. Les ventes de la marque Renault ont de leur côté augmenté de 2,4% au niveau mondial à 2,17 millions de véhicules, les utilitaires étant pour beaucoup dans cette hausse avec 13% de progression d'une année sur l'autre. De son côté, Dacia, dix ans après avoir été relancée en visant le segment des véhicules simples et bon marché, réalise 551 000 ventes (+7,7%). Hors Europe, où il détient une part de marché de 10,1%, le groupe dirigé par Carlos Ghosn connaît des situations contrastées. Dans la région "Afrique, Moyen-Orient et Inde", premier marché de Renault hors du Vieux continent avec 360 000 unités, les ventes ont progressé de 16,9% en 2015, avec de bons scores en Algérie (+8,7%) et au Maroc (+11,5%) alors que le taux de pénétration du groupe dans ces pays est de plus de 35%. Autre bonne nouvelle pour Renault, sa petite voiture low-cost Kwid lancée en septembre 2015 en Inde connaît de bons débuts commerciaux, avec 80 000 commandes fermes dont 12 000 livraisons. En revanche, en région Eurasie, qui comprend notamment la Turquie et la Russie, les ventes sont en chute de 8,6% à 356 000 unités même si Renault se targue de gagner des parts de marché. Le marché automobile russe a chuté de 35% en 2015 et les ventes de Renault, qui a dit privilégier une "politique de préservation des marges", ont baissé de 38,1%. Mais le groupe a indiqué avoir réalisé un nouveau record de ventes en Turquie, où il possède une usine (162 000 véhicules). La région "Amériques" (355 000 unités) subit de son côté un revers avec des ventes en baisse de 14,8%, la faute aux crises économiques au Brésil, deuxième marché de Renault par pays après la France, et en Argentine.
Deuxième constructeur automobile de France Renault, dont le cours de Bourse s'effondrait jeudi à l'annonce de perquisitions de la répression des fraudes, est le deuxième constructeur automobile français, à l'histoire étroitement liée à celle du pays. Alliée depuis 1999 au groupe japonais Nissan, dont elle détient 43% et avec lequel elle forme le quatrième groupe automobile mondial en volumes, l'entreprise encore détenue à 19% par l'Etat emploie plus de 117 000 personnes dans le monde et distribue ses véhicules dans 125 pays. En 2014 (derniers chiffres annuels disponibles), le constructeur a vendu 2,71 millions d'unités, réalisé un chiffre d'affaires de 41 milliards d'euros et dégagé un bénéfice net de 1,89 milliard. Il talonne ainsi son éternel rival et compatriote PSA Peugeot Citroën, qui a écoulé 2,9 millions de véhicules la même année, pour un chiffre d'affaires de 53,6 milliards. C'est en 1898 que le jeune autodidacte Louis Renault construit à Boulogne-Billancourt sa première automobile, la Type A. L'année suivante est fondée l'entreprise Renault Frères, dont le succès commercial s'étend avant la Première Guerre mondiale grâce aux exploits sportifs de ses modèles. Mobilisées pour l'effort de guerre, les usines Renault produisent des munitions, mais aussi le char léger FT, qui contribue aux avancées alliées avant l'armistice. La Seconde Guerre mondiale rebat les cartes. Les usines Renault sont réquisitionnées par l'occupant, et en 1944 Louis Renault est arrêté pour collaboration. Il meurt en détention quelques semaines plus tard. Le gouvernement nationalise l'entreprise, qui devient la Régie nationale des usines Renault et se voit confier la construction de voitures d'entrée de gamme: la 4CV (1946) puis la Dauphine qui contribueront à la motorisation de la France d'après-guerre. Renault, dont l'implantation industrielle en France s'est développée (Flins, Cléon, Sandouville dans l'axe Paris-Le Havre, mais aussi Le Mans et Douai), s'étend à l'international, en particulier en Espagne, en Amérique du Sud, en Turquie, puis au Maroc et en Algérie. Sa première usine chinoise doit être inaugurée cette année à Wuhan. Plusieurs tentatives de conquérir le marché nord-américain échouent toutefois, et l'entreprise peine à s'imposer dans le haut de gamme au-delà de son fief malgré des véhicules novateurs comme la R16 (1965) ou l'Espace (1984). La Régie, qui a dépassé en 1969 le million de véhicules produits en rythme annuel, est considérée comme le laboratoire social de la France, avec notamment des accords précurseurs sur les congés payés. Bastion syndical, c'est aussi l'un des épicentres de la contestation en mai 1968. Une époque s'achève entre 1990 et 1996, avec la transformation en société anonyme et un désengagement graduel de l'Etat. C'est sous le P-DG Louis Schweitzer qu'est rachetée la marque roumaine Dacia; elle devient un phénomène commercial dans le secteur du low-cost. Les groupes coréen Samsung et russe Avtovaz rejoignent ensuite l'orbite du constructeur. Renault, dirigé depuis 2005 par Carlos Ghosn, ambitionne de rejoindre le top 3 des groupes automobiles mondiaux grâce à son alliance avec Nissan, source de synergies et de juteux dividendes, mais aussi de tensions avec l'Etat français qui est récemment remonté de 15 à 19% du capital de l'entreprise pour lui imposer une loi anti-spéculateurs. Ces tensions ont été résolues en décembre, avec un accord limitant l'influence de l'Etat.
Les véhicules répondent aux normes Le constructeur automobile Renault, en difficultés depuis l'annonce jeudi de perquisitions et de dépassement des normes anti-pollution, affirme que ses véhicules neufs, lorsqu'ils sont vendus, répondent aux normes en vigueur. "Tous les véhicules neufs doivent être conformes à la norme Euro 6", a indiqué un porte-parole du groupe Renault. Cette norme anti-pollution est en vigueur depuis le 1er septembre 2014 pour les nouvelles homologations de voitures, et depuis le 1er septembre 2015 pour la vente des véhicules neufs. La précédente norme, Euro 5, datait de septembre 2009. La ministre de l'Ecologie Ségolène Royal avait indiqué jeudi qu'un "dépassement de normes" pour le CO2 et les oxydes d'azote avait été relevé chez Renault et "plusieurs" marques étrangères, par les premiers résultats de l'enquête d'une commission technique indépendante. Ces tests n'ont toutefois pas montré l'existence de logiciels fraudeurs, hormis chez Volkswagen. Cette commission a été mise en place par le gouvernement après le scandale Volkswagen pour vérifier que les constructeurs n'ont pas équipé leurs véhicules de logiciels équivalents à ceux du numéro un mondial. Renault a expliqué ce dépassement des normes par "deux hypothèses: c'est peut-être un vieux véhicule qui a été testé", et aurait donc été vendu avant l'entrée en vigueur de la norme Euro VI. Il peut également s'agir d'un véhicule qui a un problème. En effet, "si les véhicules (neufs) ne répondent pas aux normes, ça n'est pas normal", a ajouté le porte-parole de Renault, indiquant qu'un tel défaut peut être, par exemple, à l'origine d'une campagne de rappel. La première étape de l'enquête de la commission indépendante, qui portera à terme sur 100 véhicules, en concerne 22, de huit marques différentes: Renault, PSA, Volkswagen, Mercedes, Ford, Opel, Toyota et BMW. Le groupe Renault a perdu jeudi jusqu'à 20% en Bourse, après la révélation par la CGT de perquisitions menées dans plusieurs de ses sites par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Ces perquisitions ne sont pas en lien avec l'enquête de la commission technique, a souligné Ségolène Royal, tandis que le ministre de l'Economie Emmanuel Macron a précisé que ses services ont procédé "à plusieurs contrôles et perquisitions depuis le mois de septembre dernier afin de vérifier la fiabilité et la qualité des informations transmises au consommateur" chez plusieurs constructeurs, dont Renault.
Présenter un "plan technique" pour les émissions diesel Renault a promis hier de présenter dans les prochaines semaines un "plan technique" pour réduire la différence entre les émissions de ses voitures en conditions réelles et celles des normes d'homologation, après la mise en évidence de forts écarts. "Nous travaillons sur un plan technique qui doit nous permettre de réduire les émissions" par rapport aux niveaux constatés, a déclaré le directeur commercial du groupe Renault, Thierry Koskas, en assurant que ce plan serait "présenté dans les semaines qui viennent". Un dépassement de normes pour le CO2 et les oxydes d'azote a été relevé chez Renault et plusieurs marques étrangères, par les premiers résultats d'une commission technique indépendante, mise en place par le gouvernement après le scandale Volkswagen pour vérifier que les constructeurs n'ont pas équipé leurs véhicules de logiciels équivalents. M. Koskas, qui n'a pas donné de détails sur la nature du "plan technique" en cours d'élaboration, est resté sur la ligne défendue par son entreprise depuis que ce nouveau développement s'est produit, la semaine dernière: "Renault n'a pas triché", a-t-il insisté. Le directeur, qui s'exprimait en marge de la présentation des résultats commerciaux annuels de Renault, a aussi rappelé que "dans les conditions des tests d'homologation, nous respectons les normes d'émission", et que de fait, les voitures du constructeur étaient homologuées.
L'Etat ne vendra pas d'actions avant un retour au "prix normal" L'Etat, qui devait redescendre de 19,7% à 15% dans le capital du constructeur automobile Renault, ne cèdera pas d'action avant que le cours n'ait retrouvé son "prix normal", a déclaré le ministre de l'Economie Emmanuel Macron. L'annonce jeudi matin de perquisitions menées par la répression des fraudes dans plusieurs sites du constructeur français a fait dégringoler le titre Renault de 20% en tout juste une heure à la Bourse de Paris, faisant perdre alors plus de 4 milliards d'euros de capitalisation au 2ème constructeur français. "Notre intention aujourd'hui n'est pas de céder des actions pour que le contribuable perde de l'argent, donc nous cèderons les actions que je me suis engagé à céder pour revenir aux 15,01% que l'Etat détenait ces dernières années dans Renault, eh bien, quand l'action aura retrouvé son prix normal", a déclaré M. Macron alors qu'il participait à l'inauguration d'une usine de bus électriques du groupe Bolloré près de Quimper. "On va rester très calme et on va le faire posément, au bon moment", a-t-il ajouté. "Je ne suis pas inquiet par rapport aux éléments d'excitation" qui se sont traduits jeudi par la chute des cours du constructeur automobile. "En aucune manière, il ne s'agit d'une fraude à un logiciel ou de quelque pratique comparable à celles de Volkswagen, donc il faut laisser la commission indépendante faire son travail en ce qui concerne les émissions et la DGCCRF en ce qui concerne l'information aux consommateurs", a-t-il ajouté. "Mais il ne s'agit pas aujourd'hui d'avoir un quelconque énervement ou une quelconque fébrilité, ce serait contreproductif". "L'action a perdu jeudi de la valeur, quand la clarté sera faite sur tout cela et quand les esprits se seront calmés, vraisemblablement elle recouvrera sa valeur", a-t-il estimé. "Nous accompagnons dans la durée Renault, puisque nous sommes actionnaires depuis 1945 de cette entreprise", a-t-il rappelé.