Le Premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, a appelé samedi Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron à rejoindre la primaire ouverte du PS pour lancer un seul candidat de gauche dans la course à l'Elysée. Serrer les rangs en vue de ce scrutin et contrer la droite : tel était le leitmotiv de la convention de la Belle alliance populaire, organisée à Paris pour quelque 3.000 militants, deux jours après le renoncement de François Hollande à un second mandat. Jean-Christophe Cambadélis a dit samedi son "respect pour un homme qui s'efface pour nous laisser la place". "Merci pour le travail que tu as fait, merci pour le combat que tu as mené. Merci, tu es l'honneur de la gauche !", a-t-il lancé à l'adresse du président, qui était en déplacement à Abou Dhabi. Le patron du PS a par ailleurs lancé un vibrant appel à l'union à gauche, qui passe selon lui par une participation du co-fondateur du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, et de l'ex-ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, à la primaire des 22 et 29 janvier prochains. "Oui, la primaire c'est le moyen d'imposer l'unité, de faire en sorte que les familles séparées se retrouvent", a-t-il dit. "Je lance un appel à Emmanuel Macron, à Jean-Luc Mélenchon : rejoignez la primaire de la gauche", a-t-il ajouté tandis que les militants dans la salle l'applaudissaient et scandaient le mot "unité". "Levez-vous peuple de gauche, levez-vous pour mettre de l'ordre dans la situation politique, pour que nous puissions combattre la droite et faire reculer le Front national", a encore demandé le député de Paris. Elle aussi très applaudie, la ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a émis le souhait que la décision du président provoque un "électrochoc". "Nous n'avons pas le droit de ne pas être à la hauteur de cette décision", a-t-elle dit. "Nous n'avons pas le droit de livrer les Français au programme de la droite, de laisser la droite détricoter, défaire tout ce que nous avons construit." Valls à Evry Manuel Valls était le grand absent de cette réunion tenue une semaine après la désignation de François Fillon comme candidat de la droite pour 2017. Le Premier ministre, pressenti pour participer à la primaire du PS dont les candidatures sont ouvertes jusqu'au 15 décembre, s'est finalement contenté d'une visite dans sa ville d'Evry (Essonne), à l'occasion du Téléthon. Plusieurs ministres étaient en revanche présents à la convention de la Belle alliance, où le nom de François Hollande a été longuement applaudi. Des sifflets ont retenti à l'évocation du nom de François Fillon et de sa vision "d'une autre France que celle que nous aimons", selon une formule de la ministre de la Santé, Marisol Touraine. Les propositions du candidat de la droite de supprimer 500.000 postes de fonctionnaires en cinq ans et de réformer le système de santé ont été particulièrement ciblées. "Le programme de François Fillon c'est, avec 40 ans de retard, Reagan plus Thatcher en 2017", a dénoncé la députée Karine Berger. Au même moment à Abou Dhabi, François Hollande mettait lui aussi en garde contre le programme de l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, s'affichant en défenseur des valeurs et des idéaux de la France. "Quand il n'y a plus de fonctionnaires, il n'y a plus d'Etat et, quand il n'y a plus d'Etat, il n'y a plus de France", a-t-il notamment déclaré. Dans les rangs des militants socialistes réunis à Paris samedi, le ton était plutôt attentiste. "Les gens ont beaucoup tapé sur Hollande et maintenant ils sont embêtés car ils ne savent pas par qui le remplacer : qui a la stature de chef d'Etat, qui portera des idées de gauche malgré tout ?", a dit à Reuters Ina Sy, conseillère régionale des Pays de la Loire. "François Hollande représentait le socialisme réaliste." De l'avis de Mustapha, militant parisien, "la gauche doit se positionner par rapport à la droite". "Je n'ai pas de candidat", dit-il. "Les programmes d'abord". Dorine, étudiante de 21 ans venue de Seine-et-Marne, "attend avec impatience" une déclaration de Manuel Valls pour en découdre avec la droite. "Il y a une présidentielle et il faut y aller rassemblés contre François Fillon et son système de casse sociale", a-t-elle dit à Reuters. Mélenchon, Macron restent sourds aux appels du PS Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon ont à nouveau exclu de participer à la primaire de la gauche en vue de la présidentielle, malgré les appels répétés du Premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis. Selon le Journal du Dimanche, le Premier ministre Manuel Valls devrait annoncer officiellement sa candidature à cette primaire ce lundi ou au plus tard mardi matin et quitter l'hôtel Matignon dans la foulée. D'autres anciens ministres de François Hollande, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, sont déjà sur les rangs pour cette primaire prévue en janvier. Invité du Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro, Jean-Christophe Cambadélis s'est à nouveau adressé à l'ancien ministre de l'Economie, insistant sur la nécessité pour la gauche de surmonter ses divisions pour conserver des chances. "Emmanuel Macron a toujours été désigné, il n'a jamais été élu, donc il a un peu peur de ce type de sélection", a-t-il dit. "J'ai envie de dire 'Emmanuel, n'aie pas peur, on ne peut pas devenir président sans débat et sans combat'", a-t-il ajouté. Pour le Premier secrétaire du PS, "c'est essentiel que la primaire rassemble la totalité des candidats de gauche (...) de façon à ce qu'il y en ait qu'un si l'on veut être au deuxième tour de la présidentielle." Dans une interview au Journal du Dimanche, Emmanuel Macron lui répond que, quand bien même la primaire se passerait bien, la gauche actuelle ne parviendra pas à se qualifier pour le second tour de la présidentielle. "Vont probablement s'opposer un futur ex-Premier ministre (Manuel Valls) et des ministres qu'il a exclus du gouvernement parce qu'ils ne partageaient pas sa vision", dit-il. "Et on veut nous faire croire que la primaire leur permettrait demain, si l'un d'entre eux devenait président de la République, de gouverner ensemble pendant cinq ans ? Soyons sérieux, cette primaire va juste scénariser un déchirement autour du bilan du quinquennat." "Au moins un candidat de trop" Pour Emmanuel Macron comme pour Jean-Luc Mélenchon, cette primaire est de fait celle du Pari socialiste. "Ils ont le droit de le faire", a déclaré sur FR3 le candidat de la France insoumise. Mais "le parti radical de gauche a son candidat à l'extérieur, le parti Europe Ecologie-Les Verts a son candidat à l'extérieur (...) Pourquoi vient-on me demander à moi de rallier cette primaire? Personne ne peut croire un instant que je vais y aller", a ajouté Jean-Luc Mélenchon. Arnaud Montebourg, qui s'exprimait lors de l'émission Questions politiques France Inter-Le Monde, a prêché aussi l'unité à gauche, estimant qu"'il n'y a aucun candidat de gauche en mesure de l'emporter (à la présidentielle) car il y en a au moins un de trop". Pour ces raisons, le vainqueur de la primaire devra selon lui s'entendre avec Jean-Luc Mélenchon et Arnaud Montebourg s'est déclaré prêt pour cela à lui proposer un "accord de gouvernement". Arnaud Montebourg a indiqué aussi qu'il pourrait faire alliance avec Christiane Taubira, avec laquelle il dit avoir des "liens affectifs et de proximité", au moment où une pétition en ligne appelle l'ancienne ministre de la Justice à se présenter à la primaire. "Je lui ai dit que si elle souhaitait se présenter, nous pourrions avoir une discussion importante et constructive", a déclaré l'ancien ministre du Redressement. Prié de dire si cela signifiait qu'elle devrait se ranger derrière lui ou que, au contraire, il pourrait s'effacer derrière Christine Taubira, il a répondu : "Ce pourrait être l'un ou l'autre".