Mediapart continue de feuilletonner ses informations concernant l'évasion fiscale des stars du ballond rond. Ce vendredi, Paul Pogba, le joueur le plus cher de l'histoire, est au centre de toutes les attentions. Cristiano Ronaldo, José Mourinho, Sergio Ramos, Angel Di Maria, Javier Pastore. La liste des stars du football ayant profité d'une évasion fiscale, selon une enquête européenne gigantesque, s'allonge de jour en jour. Ce vendredi, c'est Paul Pogba qui est clairement visé par Mediapart, l'un des douze médias en centre des révélations toutes plus sulfureuses les unes que les autres. Le joueur le plus cher de l'histoire de ce sport, avec ses 105 millions d'euros dépensés par Manchester United, pouvait-il échapper à cette enquête ? Visiblement, non. Selon le site français, les droits d'image de l'international sont passés du Luxembourg à Jersey, un paradis fiscal des îles britanniques. Sur fond de guerre entre ses deux agents, Oualid Tanazefti et Mino Raiola, Mediapart explique que ce dernier a touché une commission de 27 millions d'euros lorsqu'il est retourné à Manchester United. Une somme qui s'est ajoutée aux 10 millions d'euros que la Juventus a payés en quatre ans à cet agent. "C'est presque autant que le salaire du joueur, alors que la norme dans le milieu se situe plutôt entre 10 et 20%", insiste Mediapart. Raiola estime que ces informations sont "imaginaires, inexactes ou en tout cas déformées" Le célèbre agent italo-néerlandais transfère depuis cet été les revenus issus des droits d'image de Paul Pogba à une "coquille offshore" nommée Aftermath et immatriculée à Jersey, l'une des îles de la Manche, à fiscalité avantageuse. Cette société est détenue par un prête-nom, le cabinet local Whitmill Nominees, une pratique courante, précise le site d'investigation. Le montage financier s'est fait peu avant la signature par le Francilien d'origine d'un juteux contrat de sponsoring avec Adidas, estimé entre 25 et 40 millions d'euros, en mars 2016. Selon l'enquête, Paul Pogba avait auparavant été floué par son premier agent, Oualid Tanazefti. Ce Français, qui a découvert le joueur à l'âge de 13 ans, lui avait fait signer en 2014 un contrat par lequel il s'appropriait les revenus liés à ses droits à l'image pendant quinze ans via une société luxembourgeoise, Koyot Group. Mino Raiola, sollicité par Oualid Tanazefti pour s'occuper de la jeune pépite puis en conflit avec lui, a fini par orchestrer le rachat des droits à l'image et donc les transférer à une société basée à Jersey. Paul Pogba a refusé de répondre aux questions du site. Cités par Mediapart, Mino Raiola estime que ces informations sont "imaginaires, inexactes ou en tout cas déformées", et Oualid Tanazefti les estime "totalement ou partiellement fausses, et/ou procèdent d'interprétations erronées et décontextualisées". "Football Leaks" est une enquête de 12 médias européens sur les coulisses du foot-business, qui a déjà pointé l'évasion fiscale de stars comme Cristiano Ronaldo ou José Mourinho. Et quelque chose nous dit que nous ne savons encore pas tout... Pastore et Di Maria soupçonnés Après Cristiano Ronaldo, Pogba et José Mourinho, c'est au tour de deux joueurs du PSG d'être soupçonnés d'évasion fiscale. Dans l'affaire des "Football Leaks", révélée par 12 médias européens, Mediapart affirme que les deux Parisiens perçoivent l'argent de leurs sponsors et de leurs droits à l'image dans des paradis fiscaux. Une partie des revenus d'Angel Di Maria et Javier Pastore, stars argentines du PSG, transite par des paradis fiscaux grâce à un système mis en place par un groupe d'agents argentins, révèle jeudi Mediapart dans le cadre des "Football Leaks". Les revenus des deux joueurs liés à leurs droits d'image sont ainsi versés à des sociétés écrans aux Pays-Bas qui les reversent ensuite à des sociétés basées dans des paradis fiscaux. Concernant Di Maria, Mediapart donne un exemple : en 2014, lorsque le joueur est sollicité par la société TSA (qui vend des boissons énergisantes en Asie) pour un contrat de sponsoring portant sur 150 000 euros, il exige que l'argent soit versé sur le compte de sa société Sunpex, enregistrée au Panama, sans que son nom n'apparaisse. Doyen Sports, fonds d'investissement qui s'occupe de la carrière des joueurs et a joué les intermédiaires dans cette affaire, écrit dans un email à TSA, cité par Mediapart: "Di Maria ne veut pas que son nom apparaisse pour des raisons fiscales". " Le PSG n'a pas connaissance de la répartition de cette rémunération entre Gestifute et les autres agents intervenus pour le compte du joueur" Lorsque Di Maria est transféré du Real Madrid à Manchester United en 2014, le club anglais a versé deux millions d'euros à une société, Kunse, enregistrée à Amsterdam, qui en a reversé 1,85 millions d'euros à une entité (Paros Limited) immatriculée aux Iles vierges britanniques, un paradis fiscal des Antilles. Un processus similaire est observé un an plus tard lors du transfert du joueur au PSG. "Sauf que cette fois, c'est Gestifute (l'entreprise du super agent Jorge Mendes), qui reversera 50% de la commission payée par le PSG à Kunse", avance Mediapart. Sollicité par l'EIC, le PSG a répondu: "Le club a rémunéré, aux lieu et place du joueur, la société Gestifute International, représentée par Jorge Mendes (...), mais n'a pas connaissance de la répartition de cette rémunération entre Gestifute et les autres agents intervenus pour le compte du joueur". Pastore, en 2010, soit un an avant d'arriver au PSG, a donné mandat à la société néerlandaise Orel pour commercialiser ses droits à l'image. Orel reversera 94% de l'argent collecté par le sponsoring à Klizery SA, une société enregistrée en Uruguay, pays sud-américain à la fiscalité avantageuse. Entre 2013 et 2015, un total de 1,915 million d'euros net a transité par Orel puis Klizery en provenance de Nike, équipementier américain avec lequel Pastore avait signé un contrat de cinq ans (2010-2015). Cartel d'agents argentins Le système permettant cette évasion fiscale est pratiqué par cinq agents argentins, selon l'EIC : Hernan Berman, Jorge Prat-Gay (frère d'Alfonso Prat-Gay, actuel ministre argentin des Finances), Eugenio Lopez (l'agent argentin de Di Maria), Marcelo Simonian (celui de Pastore) et Jorge Cyterszpileren, le premier agent de Diego Maradona. Ce "cartel d'agents argentins" n'hésitent pas à "truquer des matches en Amérique du Sud" ou influer "pour faire sélectionner des joueurs dans l'équipe nationale d'Argentine simplement pour faire grimper leur valeur", souligne Mediapart. Les documents Football Leaks révèlent qu'un certain Carlos Rivera se tient derrière tous ces montages financiers. Co-propriétaire du groupe financier Grupo Alhec, il était vice-président de la chambre argentine des agents de change.