Ayant été libérés de prison, la plupart des djihadistes choisissent de coopérer avec les autorités syriennes, a affirmé Bachar el-Assad lors d'une rencontre avec des députés français en visite en Syrie. Les armes chimiques, les pourparlers d'Astana et d'autres sujets clés ont également été évoqués. Le président syrien vient d'accueillir une délégation composée de Thierry Mariani, Jean Lassalle et Nicolas Dhuicq, des députés français, à Damas qui s'y sont rendus pour voir de leurs propres yeux ce qui se passe dans le pays. Dans une interview à Sputnik, Thierry Mariani a révélé quels sujets avaient été soulevés au cours de cet entretien " très direct " d'environ une heure et quart. " On a abordé avec lui des questions sur des attaques au gaz, puis on a abordé des accusations sur les prisonniers politiques. On voulait aussi savoir quel était son plan pour la paix et quel était son plan pour la reconstruction et comment il voyait l'avenir. Le message du président était aussi très clair, c'est-à-dire "Moi, je souhaite que la France change de position" ". " Je vais citer un exemple que j'avais complètement oublié, qui mérite d'être rappelé ", poursuit M. Mariani, " parce que c'est vrai qu'il illustre bien les choses, quand la France avait eu son ambassadeur assassiné au Liban (Louis Delamare, ambassadeur de France au Liban, a été assassiné à Beyrouth le 4 septembre 1981 lors de la guerre civile qui ravageait le pays du Cèdre, à quelques mètres de la résidence libanaise des ambassadeurs de France)". Alors que tout le monde accusait les services syriens, le président Mitterrand s'était rendu trois ans après en déplacement en Syrie. " Ça ne veut pas dire qu'on approuvait bien sûr tout ce qui s'était passé, et bien sûr, je le répète on le condamne mais ça prouve simplement que par moments il faut savoir aussi discuter avec ses adversaires ", résume-t-il. Les djihadistes amnistiés Lors de la rencontre, Bachar al-Assad s'est dit d'ailleurs optimiste sur les pourparlers prévus fin janvier à Astana, au Kazakhstan, ainsi que prêt à négocier avec à peu près 100 groupes radicaux. Selon le président, la majorité des islamistes libérés des prisons syriennes reviennent à une vie normale et se tournent vers le gouvernement. Interrogé sur les tortures, M. Assad a affirmé qu'elles n'étaient pas dans les intérêts du gouvernement syrien car une telle pratique pourrait radicaliser les extrémistes encore plus, les pousser à se retourner contre lui, a constaté Nicolas Dhuicq à l'issue de la rencontre. En Syrie, c'est plutôt une autre chose qui se passe : le gouvernement cherche à atteindre un accord avec les groupes armés. Entre 60 et 70 % des islamistes ont été remis en liberté des prisons syriennes et ont ainsi eu l'occasion de retourner dans leurs familles et leurs foyers. Libérés, ils préfèrent plutôt coopérer avec l'Etat syrien. Les armes chimiques prétendument utilisées par le gouvernement Ce qui va aussi à l'encontre des intérêts de Damas, c'est l'utilisation des armes chimiques. Ainsi, le président a qualifié les allégations selon lesquelles le gouvernement syrien y aurait recouru de ridicules. C'est absurde de supposer que le gouvernement syrien utilise le gaz contre son peuple, vu sa décision de se débarrasser des armes de ce type avec l'aide des Nations unies. " Politiquement, ce n'est pas dans les intérêts du gouvernement d'y recourir puisque cela pourrait également radicaliser le peuple contre lui ". Les négociations d'Astana Le dirigeant syrien a d'ailleurs affirmé beaucoup compter sur la rencontre d'Astana avec la Russie et la Turquie. M. Assad s'est déclaré prêt au dialogue avec 91 groupes armés, en excluant Daech et le Front Fatah al-Cham (anciennement Front al-Nosra), mais à condition qu'ils déposent les armes. Une trêve entre Damas et les groupes d'opposition est entrée en vigueur dans la nuit du 29 au 30 décembre sur l'ensemble du territoire syrien. En cas de succès, l'accord de cessez-le-feu devrait constituer la base de négociations politiques entre le gouvernement syrien et l'opposition, que Moscou et Ankara veulent organiser à Astana, la capitale kazakhe, le 23 janvier. Négocier un référendum constitutionnel Le président syrien a déclaré aux médias français que la délégation gouvernementale était prête à mener des négociations approfondies dans la capitale kazakhe, Astana, en dépit du manque de clarté entourant la composition de la délégation de l'opposition. " S'ils veulent discuter de cette question (la présidence d'Assad), ils doivent discuter de la Constitution, et la Constitution n'est pas la propriété du gouvernement, du président ou de l'opposition. Elle doit appartenir au peuple syrien, donc vous avez besoin d'un référendum pour n'importe quelle Constitution ", a déclaré le président syrien dans une interview aux médias français dont le texte a été diffusé par l'agence SANA. Il a également noté que le gouvernement syrien ne se fixerait pas de limites lors des discussions d'Astana. " Nous sommes prêts à tout négocier. Quand vous parlez de négociations concernant la fin du conflit en Syrie ou l'avenir de la Syrie, quoi que ce soit, nous sommes totalement ouverts, il n'y a pas de limite pour ces négociations ", a déclaré M. Assad. Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu a nommé le 23 janvier comme date possible des négociations intra-syriennes, à condition que le cessez-le-feu de deux semaines soit maintenu sur le sol syrien. "À Alep, la vie continue" " C'est très facile de rester les fesses dans le 7e arrondissement de Paris, de lire Le Monde ou Libération " et de décrire la situation en Syrie, estime le député LR Thierry Mariani interviewé par Sputnik. En visite en Syrie, M. Mariani, compare l'image de la région brossée par les médias mainstream avec l'état réel des choses. Thierry Mariani, député Les Républicains des Français de l'étranger, accompagné de ses deux collègues Nicolas Dhuicq et Jean Lassalle, est depuis jeudi en Syrie. Pendant cette période, le Français a eu l'occasion de juger par lui-même de la situation qui règne en Syrie. Dans une interview exclusive accordée à Sputnik, Thierry Mariani a évoqué la différence entre les articles des médias mainstream sur la situation dans la région et la vie réelle des citoyens qu'il a pu observer. En lisant de nombreux journaux, on a l'impression que la vie à Alep s'est arrêtée, on s'imagine une ville complétement désertée par ses habitants et baignée dans le sang. M. Mariani conteste pourtant cette vision erronée. " On sait très bien qu'une partie des médias français n'ont pas à notre avis une approche très objective. Moi quand je suis arrivé à Alep je m'attendais à voir une ville totalement détruite et une population totalement massacrée. La réalité, c'est quoi? C'est 15% de la ville totalement détruite, 20% de la ville bien endommagée, c'est-à-dire en clair que 65% de la ville est totalement intacte ", a témoigné l'homme politique. " On n'a pas une ville rasée, quand vous êtes à Alep, la vie continue ", a-t-il ajouté. En outre, M. Mariani a abordé le sujet dramatique des pertes civiles. Il explique notamment que la population d'Alep comptait 3 millions d'habitants dont 35 000 ont perdu la vie lors de la guerre. " La France aujourd'hui est absente, la France se trompe. Regardez des pays qui ont changé de politique ou d'autres qui ont une politique plus constante comme la Russie. Aujourd'hui, l'essentiel c'est d'arriver à la paix et quelle que soit notre opinion sur le président Assad, si l'on veut faire la paix, il faut d'abord passer dans une première étape par un accord avec lui. " " C'est très facile de rester les fesses dans le septième arrondissement de Paris, de lire Le Monde ou Libération et après expliquer quelle est la réalité, sauf que pour le moment ce n'est pas vraiment la réalité ", martèle M. Mariani. La réalité, le député est allé l'observer de ses propres yeux. Par exemple, après la visite d'un camp de réfugiés à Alep, les députés sont allés à l'aéroport de la ville pour se rendre à Damas. Malchance ? L'aéroport a été " miraculeusement" bombardé lorsqu'ils se trouvaient à proximité. " En partant, les gens savaient très bien que nous partions à l'aéroport. Et l'aéroport qui n'a pas été bombardé depuis plusieurs semaines a comme par hasard été bombardé exactement à deux minutes près au moment où nous sommes arrivés sur l'aéroport ", raconte Thierry Mariani. Huit obus sont notamment tombés dans le périmètre de l'aéroport où se trouvaient à ce moment-là les Français.