La livre sterling faiblira encore un peu contre l'euro et le dollar une fois le processus de sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne (Brexit) officiellement lancé, montre une enquête de Reuters publiée vendredi qui souligne aussi la prédominance des risques baissiers. La livre a chuté d'environ 17% contre le dollar depuis le vote britannique en faveur du Brexit le 23 juin, se négociant à 1,24 dollar vendredi, et sa baisse n'est pas terminée d'après la médiane des prévisions des quelque 60 stratégistes change interrogés par Reuters. Dans un mois, la livre devrait s'échanger à 1,22 dollar mais à la fin mars, date à laquelle le Première ministre britannique, Theresa May, devrait avoir lancé le processus officiel de négociations en vue de la sortie de l'UE, elle reculerait encore un peu à 1,21 dollar. "Au vu des indicateurs conjoncturels très solides au Royaume-Uni, le fait que la livre sterling résiste moins bien que d'autres devises face au dollar suggère que les facteurs politiques dominent", a dit Colin Asher de Mizuho Securities. "Je m'attends à ce que cela continue probablement durant la majeure partie de l'année. Il sera très difficile de prévoir l'évolution du sterling en partie du fait de l'importance des positions à la baisse" a ajouté Colin Asher, qui a été le meilleur prévisionniste sur l'évolution de la devise britannique dans les enquêtes Reuters l'année dernière. A un horizon de six et 12 mois, le sterling est attendu à 1,20 dollar alors que le scénario d'un Brexit "dur" dans lequel Londres refuserait de maintenir la libre circulation des personnes en contrepartie d'un accès au marché unique européen, est pour l'instant considéré comme le plus probable. Le dollar est reparti à la hausse l'année dernière et devrait continuer sur sa lancée avec les anticipations d'une accélération de la hausse des taux par la Réserve fédérale américaine en réponse à la mise en œuvre attendue de la relance budgétaire promise par le président-élu Donald Trump. Les prévisions sur la livre sont légèrement plus basses que dans l'enquête du mois de décembre et 17 des 27 prévisionnistes qui ont répondu à la question sur ce thème ont dit que leur prévision est assortie d'un biais baissier. "Les risques sont à la baisse parce qu'avec les négociations sur le Brexit nous entrons dans l'inconnu. Toutefois, si le Royaume-Uni obtient l'accès au marché unique, le sterling devrait se reprendre", a dit Asmara Jamaleh d'Intesa Sanpaolo. Si aucun des prévisionnistes interrogés ne s'attend à voir le sterling tomber jusqu'à la parité avec le dollar, quelques-uns d'entre eux n'excluent par une baisse jusqu'à 1,10 dollar. Les plus optimistes le voient à 1,35 dollar à la fin de l'année. Le sterling est aussi à la peine contre l'euro mais seulement deux des stratégistes interrogés s'attendent à une parité entre les deux devises. La médiane des prévisions contre l'euro ressort à 85 pence dans un mois, 86 pence dans trois mois et 87 pence dans un an contre 85,5 pence actuellement. Le dollar va rester fort en 2017 Le dollar américain va conserver sa vigueur par rapport à l'euro et a même de bonnes chances de parvenir à la parité face à la monnaie unique européenne cette année en raison des anticipations sur une hausse des taux d'intérêt aux Etats-Unis, montre une enquête Reuters publiée vendredi. Le billet vert devrait également continuer de se renforcer face à la livre sterling et à un panier de devises de référence. L'optimisme des cambistes continue d'être alimenté par la politique de relance que devrait mener Donald Trump censée accélérer la croissance, l'inflation et la hausse des taux d'intérêt. Le dollar a déjà progressé près de 4% l'an dernier pour s'approcher d'un pic de près de 14 ans. Selon l'enquête Reuters menée auprès de 60 stratégistes, l'indice du dollar, qui mesure l'évolution du billet vert contre un panier de six devises majeures, devrait atteindre 101,5 d'ici la fin 2017. Ce chiffre correspond à peu près son niveau actuel, atteint après une envolée de plus de 40% depuis mi-2011. Depuis la victoire de Doland Trump à l'élection présidentielle américaine, le 8 novembre, les traders ont pris des positions longues à l'exception de la semaine précédant Noël, montrent les données de la Commodities Futures Trading Commission (CFTC) américaine. Donald Trump prendra officiellement ses fonctions le 20 janvier mais des doutes demeurent sur la politique qu'il mènera en matière d'échanges commerciaux et de relations avec la Chine après ses déclarations protectionnistes au cours de sa campagne électorale. "Ses tweets au milieu de la nuit vont être une source supplémentaire de préoccupation, les marchés financiers essayant de faire la part des choses et d'interpréter son message", déclare Khoon Goh d'ANZ, un prévisionniste sur les devises asiatiques interrogé par Reuters. Parité euro-dollar ? Les stratégistes continuent de miser sur un euro faible en raison des politiques divergentes de la Banque centrale européenne et de la Réserve fédérale américaine, ainsi de l'incertitude liée à plusieurs élections majeures sur le continent européen en 2017. "Le principal risque d'une nouvelle baisse de l'euro face au dollar devrait venir des élections aux Pays-Bas, en France, en Allemagne et peut-être en Italie. En cas d'un large vote en faveur des candidats ou des partis eurosceptiques, l'euro pourrait souffrir", déclare Jean Louis Mourier, économiste chez Aurel BGC à Paris. La médiane des prévisions sur l'euro contre la devise américaine à un an est passée de 1,06 à 1,04 dollar. Les experts interrogés attribuent une probabilité médiane de 50% au passage de l'euro au-dessus ou en-dessous de la parité face au dollar cette année, une situation inédite depuis la fin de 2002. Cette probabilité est la plus élevée depuis au moins deux ans, et la moitié des 60 prévisionnistes interrogées s'attendent à un euro à un niveau inférieur ou égal à un dollar, contre une proportion d'un peu moins d'un tiers dans l'enquête du mois précédent. Un dollar revigoré L'euro se stabilisait hier matin face à un dollar revigoré par les chiffres satisfaisants sur l'emploi aux ?tats-Unis qui ont satisfait le marché. Vers 07H00 GMT (08H00 à Paris), l'euro valait 1,0532 dollar contre 1,0531 dollar vendredi soir. La monnaie européenne montait face à la monnaie nippone à 123,63 yens contre 123,25 yens vendredi. Le dollar avançait face à la devise japonaise à 117,39 yens contre 117,03 yens vendredi. Publiés vendredi, les chiffres de l'emploi aux ?tats-Unis, s'ils ont fait état d'embauches moindres que prévu et d'une hausse du taux de chômage en décembre, l'évolution des salaires s'est révélée meilleure qu'attendu. Sur le marché des changes, cet élément est particulièrement crucial car il est surveillé avec attention par la Réserve fédérale (Fed) et pourrait donc l'encourager à poursuivre de façon soutenue un resserrement susceptible de profiter au dollar. De plus, si les embauches de décembre ont déçu, celles de novembre ont été révisées en hausse. Ces chiffres ont redonné un peu d'élan à un dollar qui a connu un début d'année difficile après avoir flambé pendant toute la fin 2016 dans le sillage de l'élection à la présidence américaine du républicain Donald Trump. La semaine dernière, le billet vert a paru pâtir de rééquilibrages techniques après cette embellie ainsi que d'un document sur la dernière réunion de politique monétaire de la Fed, qui avait alors relevé ses taux pour la première fois depuis un an mais qui, selon ces "minutes", s'était aussi inquiétée de la force du dollar. Le dollar et, plus largement, l'ensemble du marché des changes sont aussi perturbés par les actions sur le yuan des autorités chinoises. La Chine, après avoir relevé vendredi de quasiment 1% le taux de référence du yuan face au dollar, soit la plus forte hausse journalière depuis onze ans, a abaissé lundi ce taux de quasiment 0,9%, accompagnant finalement la dépréciation persistante de sa monnaie sous forte pression des marchés. Vers 07H00 GMT, la livre britannique baissait face à la monnaie européenne à 86,47 pence pour un euro ainsi que face au billet vert à 1,2179 dollar. La devise suisse se stabilisait face à l'euro à 1,0724 franc pour un euro, ainsi que face au dollar à 1,0183 franc pour un dollar. La devise chinoise valait 6,9327 yuans pour un dollar contre 6,9241 yuans vendredi à 15H30 GMT.