Airbus devrait annoncer aujourd'hui une hausse de 8% de ses livraisons en 2016, dépassant les prévisions après avoir mis les bouchées doubles en fin d'année afin de rattraper ses retards, selon des sources industrielles et des observateurs indépendants du marché aéronautique. Un rapport préparé pour Reuters par FlightRadar24, qui rassemble des données sur les aéroports et le suivi des vols, estime que l'avionneur européen aura livré en 2016 bien plus que les 670 avions prévus, en prenant en compte 60 A320neo, version remotorisée de son monocouloir qui avait subi des retards. Selon un expert, le total pourrait atteindre 688 unités. Mais l'européen restera de toute manière derrière son rival Boeing qui a fait état vendredi dernier de 748 livraisons l'an passé (-2%). Pour rester en tête dans la course aux commandes, Airbus pourrait intégrer au moins une partie de la commande historique de 100 avions passée par l'Iran ainsi que la finalisation d'une commande de la compagnie indienne GoAir. L'avionneur pourrait également une commande significative de la part de la compagnie saoudienne Flynas. Airbus doit avoir engrangé au moins 259 commandes nettes en décembre pour dépasser le total de 668 affiché par Boeing. L'avionneur européen entend terminer 2016 en fanfare, avant le départ en retraite de son flamboyant directeur commercial John Leahy prévu au second semestre, même si bon nombre d'analystes estiment que le ralentissement économique mondial pourrait peser sur les prix. Un porte-parole d'Airbus s'est refusé à tout commentaire. L'avionneur présentera ses chiffres annuels mercredi lors d'une conférence de presse prévue à 10h00 à son siège de Toulouse, à l'occasion de laquelle il devrait également dévoiler son premier avion destiné à l'Iran. La période des fêtes, traditionnellement très calme dans l'industrie européenne, s'est au contraire traduite par une activité record dans les usines Airbus en Allemagne et en France. Le 29 décembre a même été l'un des jours les plus intenses de l'histoire de l'avionneur européen, avec huit avions sortis de ses usines. "C'était impressionnant", a déclaré un bon connaisseur du système de production d'Airbus. L'avionneur a livré au moins 70 avions de la famille A320 en décembre, ce qui représente également un record. Parmi eux figurent au moins 17 A320neo, dont la montée en cadence de la production a pâti des retards de livraisons des nouveaux moteurs plus économes de l'américain Pratt & Whitney (groupe United Technologies). Au total, Airbus a ainsi livré plus de 540 monocouloirs et plus de 140 gros porteurs. Génération de trésorerie Airbus avait déjà relevé en cours d'année sa prévision de livraisons pour 2016 de 650 à 670. L'avionneur accélère les livraisons de la version classique de l'A320 afin d'accumuler de la trésorerie pour assurer la délicate transition vers l'A320neo. Les livraisons de monocouloirs génèrent la trésorerie nécessaire au développement des autres programmes et s'avèrent de plus en plus cruciales alors que le risque de surcapacités pèse sur la demande de gros porteurs. La hausse des financements aux clients entame aussi la trésorerie des avionneurs. Selon des experts, les retards de livraisons de l'A320neo ont masqué certaines pressions sur la demande dont souffrent également ces modèles-là, sous l'effet du bas niveau des prix du pétrole qui peut maintenir l'intérêt pour les versions antérieures. Airbus a également livré en 2016 plus de 62 long-courriers A330, selon les analystes. Mais l'avionneur a dû accroître les financements à ses clients pour maintenir ce rythme en raison des perturbations entraînées par le coup d'Etat manqué en Turquie, l'un de ses principaux clients. Airbus a dû également compenser la suspension des crédits à l'exportation des Etats européens liée à un conflit sur les versements à ses intermédiaires commerciaux. Le groupe a ainsi financé en 2016 les sept A330 destinés à Turkish Airlines, selon des sources industrielles. Malgré des retards distincts liés à des retards de livraisons d'équipements de cabine, Airbus a atteint son objectif d'au moins 50 livraisons de l'A350, son avion le plus récent grâce à un total de 16 unités sur le seul mois de décembre, ont déclaré des sources la semaine dernière. Ce total prend en compte un ou deux avions déjà payés mais pas encore en service. Même l'A380 a connu une accélération de ses livraisons, avec sept unités en décembre, dont trois en deux jours pour Emirates, le premier client du très gros porteur. Sur l'année, Airbus en a ainsi livré 28 (un de plus qu'en 2015), soit suffisamment pour maintenir l'équilibre financier du programme en 2016. L'avionneur compte cependant réduire sa production d'A380 à partir de 2018 pour s'adapter à la baisse de la demande du plus gros quadrimoteur du monde. Le programme a subi un nouveau revers fin décembre avec le report de livraisons annoncé par Emirates à cause de l'impact de la baisse des cours du brut sur les économies du Golfe. Cette décision pourrait suffire à faire replonger le programme dans le rouge en 2017, jetant une ombre sur le dixième anniversaire de son entrée en service.