Chômage, marginalisation, relance de l'économie, délinquance, il y a autant de raisons pour se poser la question de savoir s'il faut plus ou moins d'interventionnisme de l'Etat ou s'il faut aller plus loin dans la réforme de l'Etat. Il faudrait bien sûr identifier les différentes pistes possibles et considérer que les réformes sont une œuvre permanente qui intègre les aspects stratégiques des mutations. Ce qu'on pourrait considérer comme un échec de l'Etat ne pourrait être en fait qu'un retard d'adaptation des compétences de celui-ci et de la manière de les exercer. Mais, il y en a qui estiment que ce n'est pas sur l'Etat qu'il faudrait se pencher pour le réformer, mais, plutôt sur les hommes qui y activent et dont les comportements, les mentalités sont "déterminés par les conditions institutionnelles dans lesquelles ils se trouvent". La réflexion va plus loin pour se concentrer sur la nécessité qu'existe une concurrence pour que les incitations au changement modifient les comportements. Quand on dit qu'il faudrait qu'existe une bonne attractivité pour attirer les investissements, on pense rapidement aux réformes économiques, financières, aux instruments qui en facilitent l'accès au crédit ou au foncier, alors qu'en réalité il faudrait une bonne administration, mais en n'oubliant pas qu'une administration est formée de fonctionnaires. Dès qu'on parle alors de l'administration et de fonctionnaires, le regard est porté sur la réforme de la Fonction publique, ce qui devrait normalement se faire en accompagnement ou comme base de l'élaboration du statut des fonctionnaires. La concurrence existe tout de même entre Etats car il faudrait se battre maintenant pour attirer les investisseurs internationaux. Peut-être que dans un contexte d'intégration économique et politique régionale se réduirait la concurrence entre Etats du fait de l'harmonisation des réformes et des réglementations, mais ce n'est pas le cas pour ce qui concerne les Etats non encore en économie intégrée régionalement et qui ont plus de marge de manœuvre pour ce qui concerne par exemple l'allègement des charges fiscales. Serait-ce cependant réaliste de projeter sur l'Etat "les règles de concurrence qui assurent le fonctionnement des entreprises" ? La sécurité, la justice ne peuvent pas être soumises aux règles de la concurrence car elles doivent rester des compétences aux mains de l'Etat. L'Etat ne peut pas tout abandonner et devrait tenir compte des demandes des populations qui ne font confiance qu'à l'Etat pour des contrôles sanitaires par exemple et de santé publique, pour éviter que la course vers le profit n'en altère la qualité. Garant, gérant, deux conceptions de la nature du fonctionnement de l'Etat qui ne trouvent pas toujours grâce dans les visions de nos économistes, qui s'alignent sur l'une ou sur l'autre, alors qu'il est connu que la sagesse de nos populations dit qu'il faut " tenir la canne par le milieu". On a vu qu'avec la perception qui a cours au niveau des opérateurs sur le rôle de l'Etat, il s'en est suivi une dérive des prix dans les produits alimentaires. Dans un pays à qui on dit qu'il faudrait qu'il se fasse éjecter brutalement de la position de confort que procurait aux populations l'Etat providence, qu'il accepte l'abaissement du niveau des barrières de protection sociale, alors que les conditions ne sont pas encore prêtes pour que les entreprises deviennent performantes et fournissent aux travailleurs un coussin amortisseur pour les frustrations socioéconomiques, il est évident qu'un tel discours ne passe pas encore et ne soit pas reçu sous l'angle de sa validation. La preuve en est que la demande de plus d'Etat, ou à tout le moins, d'Etat, sur les plans de l'économie, de l'emploi, du social, des questions de sécurité bien sûr traduit, pour l'opinion publique, la conviction qu'il n'est pas encore le moment pour que l'Etat se recentre sur des missions exclusivement de régulation et qu'il se déleste de tout ce qui peut être effectué par le secteur privé, notamment pour ce qui concerne les services publics, les prestations sociales, l'enseignement de qualité, la gestion tout cours. Même les économies les plus libérales n'y sont pas encore arrivées et n'y parviendront peut être jamais, d'autant que les populations elles-mêmes perçoivent que pour longtemps encore, elles auront besoin que l'Etat s'implique dans la prise en charge de leurs préoccupations quotidiennes. Elles ne voient pas du tout l'utilité de privatiser les services, ou à tout le moins la protection sociale. Les pays occidentaux considèrent que l'Etat doit se recentrer sur les missions essentielles. Pourquoi faudrait-il que d'une part, nos perceptions et les leurs devraient coïncider, et d'autre part, que nous soyons contraints d'adopter immédiatement les réformes institutionnelles qu'ils ont mises en œuvre chez eux au stade actuel de leur développement et de fonctionnement de leurs institutions démocratiques. L'Algérie n'est pas encore parvenue à disposer d'une vraie économie de marché, celle qui est capable de financer le développement. Peut être même que nous n'y parviendrons pas de si tôt, quand on observe les légitimes revendications formulées par le secteur privé national pour ce qui concerne sa protection contre une concurrence du privé étranger. Il s'exprime encore le besoin que l'Etat soit pleinement régulateur et partiellement gestionnaire, lui-même ayant déjà procédé à son recul dans bien des domaines, en particulier dans les transports, notamment terrestres.