La session présidentielle de la 22ème édition du Congrès Mondial du Pétrole a entamé ses travaux lundi à Istanbul (Turquie), en présence du ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, a indiqué le ministère dans un communiqué. L'industrie pétrolière mondiale, réunie à Istanbul, a mis en avant lundi sa nécessaire adaptation à la transition énergétique, tout en défendant les hydrocarbures, seuls capables, selon elle, d'alimenter la croissance économique et démographique mondiale, notamment des pays émergents. En marge de cette édition, le ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, s'est entretenu mardi avec le secrétaire général de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), Mohamed Barkindo. Lors de cette rencontre, les deux parties ont abordé l'évolution des marchés pétroliers et le niveau de conformité des pays OPEP et non OPEP, selon la même source. A cet effet, les deux responsables "ont manifesté leur satisfaction quant à l'engagement des pays OPEP et non OPEP de se conformer pleinement aux ajustements respectifs de production en vue d'accélérer la stabilisation du marché mondial du pétrole". Par ailleurs, MM. Guitouni et Barkindo ont évoqué l'agenda des travaux de la prochaine réunion du Comité ministériel de suivi de l'accord de l'OPEP (JMMC), prévue fin juillet à Saint Pétersbourg (Russie), ainsi que les conditions actuelles de production. Par ailleurs, la veille, M. Guitouni a eu une entrevue avec le ministre libanais de l'énergie et de l'eau, Cesar R. Abi Khalil. Les deux parties ont abordé les relations bilatérales et les opportunités d'investissements, notamment dans l'exploration et l'Offshore. M. Guitouni a également reçu le P-DG du groupe Total, Patrick Pouyanné avec qui il a discuté des projets en cours avec Sonatrach ainsi que les opportunités d'investissement et de partenariats futurs, aussi bien dans l'amont que dans l'aval pétroliers. Pour sa part, M. Patrick Pouyanné, P-DG de la compagnie pétrolière française Total, a annoncé que la demande mondiale de pétrole pourrait baisser d'ici la moitié du siècle si la lutte contre le réchauffement climatique porte ses fruits, a t-il estimé mardi. "Il est possible, que d'ici 2040/2050, la demande de pétrole ne soit pas aussi élevée qu'elle l'est aujourd'hui", a déclaré Patrick Pouyanné à Istanbul lors du Congrès mondial du pétrole. "C'est un scénario qui est possible. Je ne sais pas s'il se réalisera mais dans un scénario de 2 degrés tel qu'il a été signé dans l'accord de Paris nous aurons une demande de pétrole moins élevée" à cet horizon, a-t-il ajouté. Après avoir longtemps craint un pic de l'offre de pétrole, l'industrie se penche désormais sur les conséquences d'un éventuel pic de la demande, causé par le développement des énergies renouvelables, de l'électrification des transports et une plus grande sobriété dans les usages de l'énergie. Toutefois, "il est clair qu'à cet horizon, nous aurons également besoin de pétrole et de gaz" car pour certains usages du pétrole dans la chimie, l'industrie ou le transport routier de marchandises, "nous ne voyons pas aujourd'hui ce qui pourrait se substituer" au pétrole, a jugé M. Pouyanné. Selon les derniers scénarios de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), la demande de pétrole continuera à croître d'environ 0,4% par an d'ici 2040. A cette date, la planète devrait consommer 103,5 millions de barils par jour, contre environ 92,5 mbj en 2015, selon le scénario central de l'agence énergétique, qui tient compte des engagements pris par les pays dans le cadre de l'Accord de Paris, qui vise à limiter le réchauffement climatique sous les 2 degrés.
Gaz à effet de serre La transition vers un monde moins émetteur de gaz à effet de serre ne se présentera pas sous la forme d'"une solution" mais "impliquera différents parcours", en fonction des besoins de chaque pays, a affirmé de son coté, Ben van Beurden, le P-DG de Shell à Istanbul, lors de la première journée du Congrès mondial du pétrole. Ces propos du patron de la major pétrolière anglo-néerlandaise résument le message que les acteurs mondiaux des hydrocarbures sont venus porter, alors que des experts et ONG environnementales estiment qu'il faudra laisser dans le sous-sol une grande partie des réserves d'hydrocarbures pour lutter contre le réchauffement climatique. "La hausse de la demande pour toutes les sources d'énergie, avec le pétrole et le gaz au cœur du mix-énergétique, sera une réalité pour encore des décennies", a ainsi estimé Amin H. Nasser, président de la compagnie saoudienne Saudi Aramco. Le pétrole reste la première énergie consommée dans le monde, notamment du fait de sa domination comme carburant. Dans de nombreux pays, et malgré la chute des prix de l'or noir ces deux dernières années, les énergies renouvelables, notamment le solaire, sont toutefois devenues au moins aussi peu chères que le gaz ou le charbon. "Les énergies renouvelables n'ont pas cessé de dépasser toutes les prévisions", a reconnu Juan Vera, directeur des opérations de la compagnie espagnole Cepsa. Les industriels, comme les pays producteurs, ont d'ailleurs pris conscience de cette nouvelle réalité économique, investissant eux aussi dans le solaire, comme le Français Total ou certains pays du Moyen-Orient, ou dans l'éolien, comme le Norvégien Statoil. Dans l'énergie, "la croissance la plus rapide viendra des énergies renouvelables", admet Alexandre Novak, le ministre russe de l'Energie, mais il met en garde contre les tentations de "discrimination" entre les énergies. Le secteur pétrolier a intégré les attentes dans les pays développés, ou encore en Chine, pour une transition vers un modèle économique moins émetteur de gaz à effet de serre. Des attentes accentuées par l'accord international de Paris sur le climat et d'un certain désengagement financier et industriel du charbon.
Gourmands émergents Outre le développement des énergies renouvelables, les normes se renforcent en faveur d'une plus grande efficacité énergétique dans l'industrie ou le bâtiment, et les véhicules électriques se vendent de plus en plus. "Trop souvent, la transition énergétique est considérée du point de vue des Européens ou des Nord-américains (...) mais la réalité démographique montre que ce n'est pas suffisant de se concentrer sur ces régions", a estimé le patron de Shell, citant l'Afrique et l'Asie qui vont concentrer la majeure partie des 3,6 milliards d'habitants supplémentaires attendus sur la planète d'ici la fin du siècle. "Ces pays en croissance auront encore besoin d'hydrocarbures pour développer leurs industries", a-t-il ajouté. D'autant que certains, comme la sidérurgie, le ciment ou la chimie, ne peuvent pas se passer de la quantité d'énergie que produisent les hydrocarbures, selon lui. Toutefois, face aux critiques sur les émissions de gaz à effet de serre issues de l'exploitation des hydrocarbures, les industriels avancent des "progrès technologiques" pour réduire leurs impacts, via la capture et le stockage du CO2, pourtant encore loin d'avoir trouvé son équilibre économique, ou les biocarburants, a énuméré Darren W. Woods, le PDG d'ExxonMobil. Mais, selon Amin Nasser, il faut lutter contre "la croyance croissante que le monde peut prématurément se passer de ressources fiables et prouvées comme le pétrole et le gaz".
L'Iran espère signer 10 contrats Dans la foulée du contrat conclu avec un consortium international mené par le français Total, l'Iran espère signer "environ dix contrats" dans les prochains mois pour exploiter ses immenses ressources pétrolières et gazières, a indiqué un responsable iranien mardi. Depuis 2016, "nous avons signé 30 protocoles d'accord" et "nous espérons que d'ici les six à dix mois qui viennent, nous pourrons signer environ dix contrats supplémentaires", a déclaré Reza Dehghan, un des responsables de la compagnie nationale iranienne (NIOC) en charge des négociations avec les compagnies pétrolières intéressées pour revenir dans ce pays. Actuellement, l'Iran mène "26 négociations parallèles dans des projets" d'exploration et de production de pétrole, a ajouté Amir H. Zamaninia, vice-ministre iranien du Pétrole. Les deux responsables s'exprimaient lors du Congrès international du pétrole à Istanbul, où l'industrie pétrolière et gazière est réunie jusqu'à jeudi. L'Iran dispose des deuxièmes réserves mondiales de gaz, après la Russie, et des quatrièmes réserves mondiales de pétrole. D'ici la fin 2021, le pays veut augmenter sa production de pétrole d'environ 4 millions de barils par jour actuellement à 5,7 millions de barils par jour, a indiqué M. Zamaninia. Et le pays aura besoin pour cela de 140 milliards de dollars d'investissement, "dont au moins les deux tiers" pourraient venir de compagnies étrangères, a dit M. Dehghan. Pour rappel, le comité JMMC est chargé non seulement du contrôle de l'application de l'accord OPEP-non OPEP mais aussi de formuler des propositions sur les actions à prendre face à d'éventuels changements dans le marché mondial du pétrole. L'OPEP et des pays producteurs non membres de l'OPEP avaient décidé en mai dernier à Vienne (Autriche) de prolonger de neuf mois jusqu'à fin mars 2018 l'accord de réduction de la production entré en vigueur au début de l'année. Cette réduction reconduite est de 1,8 million de barils par jour (mbj), composée de 1,2 mbj de l'OPEP et de 600 000 bj de pays hors-OPEP. La 22ème édition du Congrès Mondial du Pétrole a entamé ses travaux lundi à Istanbul en présence du ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, accompagné d'une délégation composée de hauts cadres de son ministère et de Sonatrach.