La coalition au pouvoir en Ethiopie a annoncé mardi soir avoir décidé de mettre en œuvre "pleinement" les conclusions d'une commission internationale indépendante qui avait délimité en 2002 le tracé de la frontière commune avec l'Erythrée, source de vives tensions militaires entre les deux pays. "Le gouvernement éthiopien a décidé de mettre en œuvre pleinement l'accord d'Alger (signé en 2000 pour mettre fin au conflit entre les deux pays) et (les conclusions) de la commission sur la démarcation de la frontière et nous travaillons à leur mise en œuvre complète sans hésitation", a écrit la coalition au pouvoir dans un communiqué. Cette annonce surprise représente un changement de politique majeure du nouveau Premier ministre, Abiy Ahmed, qui avait promis lors de son discours d'investiture en avril de travailler à restaurer la paix avec l'Erythrée. "Le gouvernement érythréen devrait adopter la même position sans condition préalable et accepter notre appel à restaurer la paix trop longtemps perdue entre les deux pays frères, comme c'était le cas auparavant", a ajouté l'EPRDF (coalition au pouvoir en Ethiopie) dans son communiqué. L'Erythrée a accédé à l'indépendance en 1993, faisant perdre à l'Ethiopie son unique façade maritime sur la mer Rouge. Entre 1998 et 2000, les deux voisins se sont livrés une guerre fratricide qui a fait au moins 80.000 morts, notamment en raison de divergences sur la démarcation de leur frontière. Un accord de paix avait été signé fin 2000 à Alger puis une commission d'arbitrage soutenue par l'ONU avait tranché sur le tracé de la frontière, attribuant notamment la localité de Badme, point de contentieux, à l'Erythrée. Mais l'Ethiopie a continué jusqu'à présent à occuper Badme. Depuis, les deux pays maintiennent de nombreuses forces de long de leur frontière de 1.000 km de long et des affrontements périodiques ont laissé craindre une reprise d'un conflit à grande échelle, notamment en 2016.
Le parlement lève l'état d'urgence Le parlement éthiopien a levé mardi l'état d'urgence qui avait été instauré pour six mois le 16 février, au lendemain de la démission surprise du Premier ministre Hailemariam Desalegn, remplacé depuis, a annoncé l'agence de presse éthiopienne. Le parlement, réuni mardi matin, a voté en faveur de la levée de l'état d'urgence en raison "de la stabilité relative et du calme" dans le pays, notamment depuis la prise de fonctions du nouveau Premier ministre Abiy Ahmed en avril. La démission de M. Hailemariam et l'instauration de l'état d'urgence le lendemain avaient couronné une crise politique sans précédent depuis l'instauration du régime actuel en 1991. L'ancien Premier ministre avait été emporté par la crise politique, marquée par d'importantes manifestations anti-gouvernementales violemment réprimées, dans le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique. Le mouvement de protestation avait débuté fin 2015 en région oromo (sud et ouest), la plus importante ethnie du pays, puis s'était étendue courant 2016 à d'autres régions, dont celle des Amhara (nord). Sa répression a fait au moins 940 morts, selon la Commission éthiopienne des droits de l'Homme, liée au gouvernement. Un calme relatif n'était revenu qu'avec l'instauration d'un état d'urgence entre octobre 2016 et août 2017 et au prix de milliers d'arrestations. En avril, la coalition au pouvoir, dos au mur, a investi pour la première fois de l'histoire contemporaine de l'Ethiopie un Premier ministre, M. Abiy, issu de l'ethnie oromo. Depuis, ce dernier a multiplié les déclarations d'apaisement et de concorde et le régime a donné des gages en direction de l'opposition avec notamment la libération récente de dissidents célèbres, notamment celle d'un haut responsable d'un groupe d'opposition armée, l'Anglo-Ethiopien Andargachew Tsige.