L'histoire montre qu'Israël choisit toujours l'option militaire. Il a clairement annoncé la couleur en déclarant Gaza " entité hostile ". Puisque la stratégie d'étouffement du Hamas par le blocus a échoué, il passe à l'offensive militaire.Les faits d'abord : le 27 février 2008, le gouvernement israélien déclenche une nouvelle offensive contre le territoire de Gaza : pas moins de 2000 soldats appuyés par des blindés et des hélicoptères d'assaut. Au matin du lundi 3 mars, selon le ministère palestinien de la santé, 116 palestiniens ont été tués dont 22 enfants et 12 femmes ; il y a des centaines de blessés ; faute de carburant, des ambulances ne circulent plus. " Il n'y a plus de ciment pour construire les tombes ; même les morts subissent l'embargo " nous écrit Zacharia, militant de la solidarité à Gaza. Une cinquantaine de Palestiniens ont été arrêtés. Les bureaux à Gaza du premier ministre du gouvernement d'union nationale, démis par l'Autorité palestinienne Ismaël Hanyeh ont été rasés. A Jabaliya, une trentaine de maisons ont été détruites. Le dimanche 2 mars, Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne, ordonne " la suspension des négociations et de toute forme de contact à tous les niveaux parce que c'est devenu vide de sens à la lumière de l'agression israélienne ". Ehud Barak, le ministre israélien de le défense déclare : " le but de l'opération qui est de mettre fin aux tirs de roquettes ne sera pas atteint dans les deux prochains jours, nous continuerons nos activités et devons nous préparer à une escalade." Le lundi 3 mars au matin, la radio publique israélienne annonce la fin de l'offensive. En quoi ces faits s'inscrivent-ils dans une logique de guerre ? La stratégie israélienne d'abord. Olmert prétend que l'offensive actuelle est une riposte aux tirs de roquettes. Il ne s'agit pas de nier les tirs de roquettes ; mais comment ne pas voir qu'ils s'inscrivent dans une situation non seulement d'occupation, mais de siège insupportable, d'asphyxie économique et sociale totale, d'étouffement à tous points de vue, de raids et de bombardements meurtriers incessants par les forces israéliennes, qui épuise la population et exacerbe les colères ? Comment ne pas voir non plus combien ces tirs sont instrumentalisés par Israël ? La vraie question pour Israël est quelle est la meilleure stratégie à adopter pour faire aboutir le programme élaboré en 2005 : évacuer Gaza pour " geler dans le formol " la négociation, poursuivre la colonisation de la Cisjordanie en vue d'annexion substantielle ? Une option qui se poursuit après Annapolis comme le confirment les faits en Cisjordanie. Et donc, aujourd'hui, " quoi faire avec le Hamas ? " surtout depuis que le Hamas a gagné les élections législatives de janvier 2006. Faut-il discuter avec le Hamas, le marginaliser ou l'éradiquer ? L'histoire montre qu'Israël choisit toujours l'option militaire. Il a clairement annoncé la couleur en déclarant Gaza " entité hostile ". Puisque la stratégie d'étouffement du Hamas par le blocus a échoué, il passe à l'offensive militaire. De son côté, le Hamas, à qui on a volé la victoire électorale pourtant obtenue démocratiquement selon tous les observateurs internationaux, semble hésiter entre deux stratégies pour se ré-imposer dans le jeu politique : la mobilisation de la société civile réussie lors de la chute du mur à la frontière égyptienne, si spectaculaire ou le choix de suivre l'exemple du Hezbollah ; cette dualité reflète d'ailleurs des débats sinon des divisions au sein du Hamas. Jusqu'à quel point le Hamas veut-il (ou peut-il) contrôler les groupes djihadistes qui lancent les roquettes sur Sderot ? A court terme, le Hamas marque des points, mais à plus long terme, il se heurte à un double piège : une victoire militaire est inenvisageable et l'option seulement militaire non inscrite dans une stratégie politique peut s'avérer dangereuse pour la population civile palestinienne d'abord, pour tous les peuples de la région ensuite. Le présent est cependant celui d'une logique de guerre confortée par la conférence d'Annapolis : bien loin d'être une conférence de paix, Annapolis a été conçue par Washington comme une " conférence de guerre " : pour George W. Bush, il s'agissait de renforcer l'alliance des Etats-Unis avec leurs alliés " modérés ", dont l'Autorité palestinienne contre " l'axe du mal " Iran-Syrie-Hezbollah-Hamas. C'est bien l'absence d'un véritable processus de paix qui renforce aujourd'hui la logique de guerre à Gaza. Entre une fausse paix (Annapolis) et une vraie guerre qui s'annonce, y-a-t-il une alternative pour les Palestiniens ? Dès le 2 mars, le FPLP, le FDLP et le PPP appellent à l'unité nationale. Tous ceux qui reviennent de Palestine témoignent de la vitalité de la société civile palestinienne : à Gaza, l'action combinée du Hamas qui ouvre à l'explosif des brèches dans le mur et de la population civile qui s'engouffre pacifiquement dans ces brèches, interdisant par la même toute réaction militaire égyptienne ou israélienne en est un premier exemple. Le débat démocratique se poursuit sans tabou, y compris sur l'efficacité des tirs de roquettes : par exemple, Al-Haq - une organisation de défense des droits de l'homme à Ramallah- écrit dans un rapport publié le 1er mars : " l'usage sans restrictions de la force contre la population civile en réponse aux attaques de roquettes illégales par les groupes armés palestiniens est une violation des lois de la guerre. " ; des villages de plus en plus nombreux luttent contre le Mur qui continue à avancer et s'organisent dans une coordination qui se réunira fin avril. Face à la logique de guerre qui s'installe au Proche et au Moyen Orient, seule une vraie perspective de paix fondée sur le droit international, négociée avec tous les partenaires à commencer par le Hamas, peut éviter une escalade dangereuse. Brigitte Raemo Membre du BN de l'Association France Palestine Solidarité.