L'OCDE a abaissé à son tour ses prévisions de croissance mondiale sur fond de tensions commerciales persistantes et d'incertitudes politiques accrues, le tout s'accompagnant d'une panne de confiance des acteurs économiques. Dans ses prévisions économiques d'hiver publiées mercredi dernier, l'Organisation de coopération et de développement économiques n'anticipe plus que 3,3% de croissance en moyenne dans le monde cette année puis 3,4% l'an prochain - après 3,6% en 2018 -, soit respectivement 0,2 et 0,1 point de moins par rapport à ses précédentes projections de novembre. Le Fonds monétaire international (FMI) avait révisé dès fin janvier dans des proportions similaires ses propres prévisions de croissance à 3,5% pour 2019 et 3,6% pour 2020. Les premières données officielles publiées depuis par les Etats ont montré que le ralentissement du deuxième semestre 2018 a été globalement plus prononcé qu'attendu - autour de 3% par an sur une base trimestrielle, soit le rythme le plus faible depuis la mi-2016, souligne l'OCDE -, avec pour conséquence moins d'élan pour basculer sur 2019. Outre les tensions et les incertitudes croissantes du moment, les économistes de l'organisation insistent sur le ralentissement marqué des échanges commerciaux, dont la croissance est tombée autour de 4,5% l'an passé contre 5,25% en 2017. Les indicateurs avancés ne laissent présager aucune amélioration sur ce point à court terme, les différentes enquêtes montrant que les commandes à l'export restent faibles en Chine et poursuivent leur baisse en Europe et dans de nombreuses économies asiatiques, relève l'OCDE. L'Italie en récession en 2019 Mais même en l'absence d'aggravation des tensions commerciales, ses économistes estiment que le ralentissement en cours dans des pays comme l'Allemagne, la Chine, le Royaume-Uni et l'Italie impacte la croissance de leurs partenaires commerciaux en Europe et en Asie au vu de leur importance comme pays exportateurs ou dans les chaînes d'approvisionnement régionales. En conséquence, la plus forte révision à la baisse des attentes de l'OCDE concerne la zone euro, où les économistes de l'organisation n'attendent plus que 1,0% de croissance cette année (-0,8 point par rapport à novembre) et 1,2% l'an prochain (-0,4 point). Par comparaison, les dernières estimations de la Commission européenne, en février, portaient sur 1,3% en 2019 et 1,6% en 2020. Les changements les plus conséquents concernent l'Allemagne, où l'OCDE anticipe une hausse du PIB limitée à 0,7% cette année puis 1,1% l'an prochain, soit des baisses de 0,9 et 0,3 point par rapport à ce qui était attendu l'automne dernier, et plus encore l'Italie, où l'OCDE entrevoit même une récession (-0,2%) en 2019 avant un rebond modéré (+0,5%) en 2020. L'OCDE y voit la conséquence du poids important des exportations dans leur PIB en comparaison d'un pays comme la France, pour lequel l'ampleur des révisions est moindre : 1,3% en 2019 (-0,3 point) comme en 2020 (-0,2). Pour la Grande-Bretagne, les effets du ralentissement en zone euro se conjuguent aux incertitudes liées au Brexit, amenant l'OCDE à ne plus tabler que sur une croissance inférieure à 1,0% cette année (+0,8%, -0,6 point) comme la prochaine (+0,9%, -0,2 point).
Les taux d'interêt doivent rester bas en zone euro S'agissant des Etats-Unis, l'organisation voit la croissance ralentir à 2,6% en 2019 (-0,1 point) et 2,2% en 2020 (+0,1 point), l'effet des baisses d'impôts de l'administration Trump s'amenuisant en même temps que celui des hausses de tarifs douaniers se fait plus ressentir. En Chine, l'OCDE modifie peu son scénario avec une croissance qui tomberait à 6,2% (-0,1 point) cette année, après 6,6% en 2018, puis 6,0% (prévision inchangée) en 2020. Ses économistes estiment qu'il est encore trop tôt pour évaluer l'impact des mesures de soutien mises en place par le gouvernement chinois et que celui-ci dispose de marges pour faire plus si besoin est, au risque toutefois de retarder le désendettement nécessaire des entreprises du pays. Il reste que l'économie chinoise souffre de la guerre commerciale avec les Etats-Unis et que, même en cas d'accord Washington-Pékin dans les négociations en cours, le risque est l'ouverture d'un nouveau front transatlantique qui renforcerait encore les incertitudes et pénaliserait l'investissement, surtout s'il couvre un secteur aussi stratégique pour l'Europe que l'automobile, note l'OCDE. Dans ce contexte, elle estime que la pause dans le processus de normalisation des politiques monétaires des grandes banques centrales est appropriée. Elle invite ainsi la Banque centrale européenne à s'assurer que les taux d'intérêt de la zone euro resteront bas sur une période prolongée et que les marchés financiers continueront de fonctionner sans à coup. "Cela appelle un pilotage renforcé des anticipations pour signaler que les taux resteront bas longtemps et, si nécessaire, de nouvelles mesures bien conçues pour améliorer le financement à long terme du secteur bancaire", dit l'OCDE.