«Nous sommes loin des préoccupations des pouvoirs publics, nous sommes écartés. Plus on nous accordera des droits et de l'indépendance, plus on apportera une meilleure contribution en assurant plus de justice». C'est ce qu'a déclaré, hier, Maître Abdelmadjid Sellini, bâtonnier d'Alger, qui vient d'être réélu à cette charge, au cours d'une conférence-débat organisée au centre de presse d'El Moudjahid. Le bâtonnier a présenté les priorités de son nouveau mandat et débattu de la réforme introduite dans le secteur de la justice et des mutations que connaît celle-ci. De ce fait, maître Abdelmadjid Sellini a déploré la situation que vit la justice actuellement. Il dira, à ce propos, que «70 à 80 % des citoyens mécontents par rapport à certaines décisions de justice. Ce qui dénote d'un réel disfonctionnement». En tant que magistrat et homme de loi, «je dois appliquer la loi correctement. La justice est une responsabilité», dira-t-il. Maître Sellini s'est longuement étalé sur son parcours professionnel ; il a déploré l'ingérence du ministère public dans les décisions des magistrats. «Le jour où le citoyen ne se sent pas piétiné et écrasé, ce jour-là on arrivera à avoir un sentiment de justice», affirmera-t-il. Il donne à titre d'exemple, les Egyptiens qui sont plus indépendants dans ce secteur et qui ont une forte influence et contribution dans la justice, «notre pays est encore loin dans ce cadre», dira-t-il. Quant à la profession, Maître Sellimi estime que la justice ne peut pas vivre en dehors de la vie quotidienne de la société «on nous a dénué de nos prérogatives. Le magistrat est sans indépendance, et n'est pas plus qu'un fonctionnaire», lancera-t-il. Il estime qu'il faut accorder plus d'indépendance au magistrat et ne pas l'inonder de dossiers par centaines. Il dira, dans le même contexte, qu'il faut que le président de la cour soit élu par les magistrats et pas nommé par la tutelle et l'intervention du pouvoir de la chancellerie (l'autorité judiciaire). «Il faut qu'on donne une certaine indépendance à cette profession avec bien sûr des mécanismes qui puissent contrôler les décisions de justice», insistera-t-il. Selon lui, la réforme ne veut pas dire construire des tribunaux mais rendre son indépendance à cette institution en laquelle les citoyens n'ont plus confiance. Par ailleurs, il a indiqué, dans le cadre de la réforme, qu'il y a eu plusieurs programmes de coopération avec des étrangers tels que les Américains, les Français et autres, et qu'actuellement «on a remis de l'ordre de notre maison», a-t-il dit. Pour une meilleure prise en charge, il a indiqué qu'ils ont récemment développé une école à Alger. Il suggère, toutefois, de réorganiser et encourager la formation et la formation continue ainsi que le financement de cette corporation. Il estime, à cet effet, que «si on bâtit une forte institution on aura réalisé 80% de notre mission». Pour bâtir une institution forte pour accompagner le service public, il est impératif que les pouvoirs publics investissent dans le secteur, conclut-il.