La pièce de théâtre "Sin-nni" (ces deux là), une tragi-comédie qui rend compte d'une confrontation entre deux visions existentielles différentes, l'une dans le monde des choses et l'autre dans celui des idées, a été présentée dimanche soir à Alger. Accueilli au Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi (Tna), le spectacle, programmé dans le cadre des Premières Journées nationales du Théâtre amazigh d'Alger, a été mis en scène par Sadek Yousfi sur une adaptation du regretté Abdellah Mohia (Muhend U yahia) (1950-2004), tirée du texte, "Les Emigrés" du Polonais Slawomir Mrozek (1930-2013). Contraints à cohabiter dans une vieille cave d'un immeuble à Paris pour se partager le loyer, deux antagonistes, que tout oppose, vont nourrir, 65 mn durant, un quiproquo inextricable, brillamment rendus par Yalah Mohand Ouidir dans le rôle de l'"intellectuel", et Ouzïen Rahmouni, dans celui de l'Ouvrier". Ainsi, et pendant que l'un essaye de développer sa vision sur la place de l'intellectuel dans l'évolution de la société, l'autre, sans gêne aucune, va se souvenir des différentes catégories de mouches envahissant le quotidien des gens dans son village, ne pensant ensuite, qu'à se remplir les poches pour revenir chez lui et construire son hypothétique usine. L'intellectuel, s'avérant être un écrivain qui voulait écrire un livre sur la vie des ouvriers émigrés, d'où sa situation de colocataire, bénéficiait également du statut de refugié politique, ce que son camarade ne savait nullement et ne pu accepter, car se sentant trahi. S'adonnant à la boisson pour fêter la nouvelle année, les esprits, reposant sur un profond mal être, s'échauffent vite et les deux hommes, n'arrivant plus à s'entendre, vont continuer à entretenir un dialogue de sourds, pour sombrer ensuite dans la fatalité. Dans une scénographie fonctionnelle, œuvre du metteur en scène, les comédiens, ont bien porté le texte, occupant tous les espaces de la scène et utilisant tous les accessoires, dans un rythme ascendant aux échanges vifs. Des airs musicaux du patrimoine, ceux de Slimane Azem et des troupes folkloriques kabyles notamment, ont ramené la trame dans des atmosphères autochtones, profitant des aptitudes des deux comédiens à chanter juste.