Depuis bientôt trois mois que sévit le coronavirus, on assiste à un effondrement mondial du transport aérien. Alors que l'Afrique semblait jusqu'ici épargnée, ses compagnies commencent à subir de plein fouet les effets de la crise sanitaire. On savait d'avance, selon les prévisions de l'IATA formulées l'an dernier, qu'elles devaient enregistrer une perte collective de 200 millions de dollars en 2020. Mais la survenue de la pandémie fait désormais craindre le pire pour la plupart d'entre elles. Les pays africains se " bunkerisent " Depuis la fin janvier, la quasi-totalité des transporteurs africains qui desservaient la Chine, épicentre du coronavirus, ont déserté le pays. Il s'agit entre autres de Kenya Airways, Air Mauritius, Royal Air Maroc, Egyptair, Air Algérie, Air Madagascar ou Rwandair. Ethiopian Airlines, qui transportait jusqu'ici plus de 4000 passagers par jour entre la Chine et l'Afrique, a été contrainte de réduire ses fréquences vers ses dessertes Pékin, Shanghai, Hong Kong, Guangzhou et Chengdu. Les taux de remplissage sont à la baisse. Ce derniers jours , la propagation inquiétante du coronavirus a contraint bon nombre de pays africains à prendre des mesures plus drastiques. Ainsi le Maroc vient de suspendre tous les vols internationaux à l'exception des vols cargo. Une décision similaire a été prise par Djibouti, nation de la corne de l'Afrique qui n'enregistre jusqu'ici aucun cas d'infection. Les pays d'Afrique du Nord comme la Tunisie ont fermé leurs aéroports aux passagers en provenance ou ayant transité ces 14 derniers jours des pays qualifiés " à haut risque ". Le Ghana, pour sa part interdit désormais sur son sol tous les passagers (exceptés les Ghanéens) en provenance ( ou en transit) " d'un pays ayant enregistrés plus de 200 cas d'infections au Coronavirus ". Hier, l'Afrique du sud emboitait le pas en annonçant la suspension des visas pour les " ressortissants étrangers des pays à haut risque comme l'Italie, l'Iran, la Corée du Sud, l'Espagne, l'Allemagne, les États-Unis, le Royaume-Uni et Chine. " Globalement, c'est tous les pays africains qui implémentent des mesures restrictives afin de contenir la propagation inquiétante de la pandémie qui totalise déjà près de 182 000 cas d'infections dont plus de 7100 morts à l'échelle mondiale. A cette allure, il faudrait s'attendre dans les prochains jours à une renforcement de ces restrictions.
Les compagnies aériennes réduisent flotte, réseau et ambitions Ces lourdes décisions ne sont pas sans conséquence sur les compagnies aériennes. Ainsi, Royal Air Maroc a dû revoir ses capacités à la baisse, devant clouer plus de la moitié ( une trentaine d'avions) de sa flotte. Ailleurs sur le continent, la faible demande impacte les transporteurs sur leurs lignes internationales et intracontinentales. Ainsi Cabo Verde Airlines a réduit ses vols vers le Brésil et suspendu sa route de Washington et Lagos au Nigeria. L'Arabie Saoudite a fermé son ciel aux compagnies africaines. Kenya Airways a quitté la Suisse tandis que Rwandair a été contrainte d'abandonner sa desserte d'Israël. Au fil des jours et en fonction des nouvelles restrictions, les transporteurs africains continueront de réduire leur réseau même sur le marché domestique. Le coronavirus plombe aussi les plans d'expansion des transporteurs. Air Tanzania a reporté à une date ultérieure l'ouverture de sa nouvelle ligne vers la Chine. Les calendriers de livraison d'avions connaissent également un réajustement. Dans ce contexte de conjoncture sans précédent, les compagnies africaines et même les aéroports essaient tant que bien que mal de contenir la saignée financière. A coups de mesures d'urgence, on assiste depuis quelques semaines au gel des recrutements, aux congés forcés (sans prime), à la réduction des capacités sur les marchés domestiques et l'arrêt des achats hors besoins d'exploitation.