Sid-Ali Sakhri, la cinquantaine bien entamée, mais un look de jeune (avec ses souliers à grosses semelles et son jean), affirme "adorer les défis" sans lesquels la vie, soutient-il, "n'a pas de sens". Libraire de profession, il a dû être amené à créer les éditions «Mille Feuilles» afin, dit-il, «de pouvoir procurer à mes clients les livres qu'ils n'ont pu trouver chez moi». Sid-Ali Sakhri, la cinquantaine bien entamée, mais un look de jeune (avec ses souliers à grosses semelles et son jean), affirme "adorer les défis" sans lesquels la vie, soutient-il, "n'a pas de sens". Libraire de profession, il a dû être amené à créer les éditions «Mille Feuilles» afin, dit-il, «de pouvoir procurer à mes clients les livres qu'ils n'ont pu trouver chez moi». Presque la même histoire se répète avec ce café littéraire qu'il vient d'ouvrir à la rue Ahmed Zabana, ex-Hoche, près de la radio El Bahdja dans le centre d'Alger. «Mon père avait un café à Bab-el-Oued, j'ai grandi dans cet espace convivial où l'on discutait football, mais où la culture savante et les femmes étaient absentes. Je voulais recréer cet espace que je me remémore sans cesse tout en le complétant avec les apports de ma propre culture» dit-il. Le café littéraire, le premier du genre en Algérie, mérite sans doute son nom d' «Ile Lettrée», n'est-ce pas qu'il se conçoit comme un espace insulaire au sein d'une société majoritairement travaillée par les valeurs mercantiles et matérielles? Il n'est pas évident de voir beaucoup de monde se bousculer au portillon rien que pour le plaisir de lire quelques pages des 800 titres que contient la bibliothèque du café. On ne peut s'embarquer dans quelque aventure sans se laisser gagner par ces sortes de ratiocinations et d'appréhensions. Sid-Ali Sakhri compte provoquer un débat sur le mécénat culturel. Il a déjà déboursé 11 briques pour la location du local pour une durée d'une année. Une année passe vite et il sait que le café, du moins sur le plan financier, n'est pas rentable. «Je paye les impôts comme tout le monde et je n'ai pas le droit de vendre autres choses que les boissons, éventuellement des livres aussi». Le mécénat culturel ? Son visage se rembrunit dès qu'il aborde la question. «Je ne connais pas de mécène algérien en ce domaine. Quelqu'un m'a dit que le mot mécène vient de l'arabe «mouhsine» (le bienfaiteur). Je pense que ça doit exister. Au Maroc, il est très développé. Chez nous, il se manifeste surtout dans le domaine religieux et sportif. Mais là, nous touchons plutôt au sponsoring». "La ministre de la Culture m'a encouragé, mais je n'ai reçu aucune subvention. Je ne demande pas un salaire, non. Dans la mesure où l'on devient utile au quartier et à la cité, l'idéal serait qu'une tierce partie prenne en charge le loyer afin qu'on puisse entièrement se consacrer à l'amélioration du service. Les centres culturels étrangers ont émis le souhait de nous aider, ils s'y intéressent parce qu'ils veulent promouvoir leur langue et leur culture. Ils sont plus sensibilisés que les pouvoirs publics avec lesquels nous préférons cependant travailler" poursuit-il. «Seuls, dit-il, certains journaux y ont montré de l'intérêt, ils ont proposé de nous aider en co-animant le café. Je laisse la porte ouverte, on est au stade de la réflexion». Sid-Ali Sakhri se définit comme «un optimiste anxieux». «J'ai fait une formation de psychologue, je sais de quoi je parle. Ça va être difficile, il faut se battre, je sais qu'on finira par surmonter tous les obstacles.» L'«Ile Lettrée» avait ouvert ses portes en octobre de l'année 2009 mais a dû baisser le rideau 3 mois durant. La réouverture n'ayant lieu que fin décembre dernier. «Je n'étais pas encore prêt, il fallait un registre du commerce et une licence de Moudjahid». Il a souri quand il a évoqué la réaction des riverains. «Les gens nous ont pris pour des Martiens qui ont atterri au bas de l'immeuble, ils n'arrivent pas à définir le lieu, ils voient des livres, des dames et des messieurs qui viennent. On est un peu naïf, un peu idiot, des imbéciles heureux au moment où l'argent est roi, on fait de la culture. Mais on peut aussi comprendre par là que la culture occupe dans l'imaginaire des gens une place particulière». Et d'affirmer que «l'existence du café littéraire a été rendu possible grâce aux pratiques démocratiques, J'estime que ce sont des conditions qui existent». «Je ne crains pas les dérapages politiques, tout acte culturel est nécessairement politique. La politique, on doit la faire d'une manière subtile. Ce n'est pas intéressant d'en faire comme en font les partis politiques. On peut rester critique et surtout se démarquer des insultes qui sont l'expression de la paresse intellectuelle». Sid-Ali Sakhri avait découvert le monde de l'édition dès son jeune âge. Recruté en tant que stagiaire à l'entreprise nationale du livre (ENAL), il devient après 6 mois chef de département et après une année directeur de l'édition et art graphique. Lorsque plus tard le moment était venu d'ouvrir sa propre librairie, il n'hésite pas à s'installer rue Khelifa Boukhalfa, dans un local qui fait face à l'une des grandes mosquées de la capitale. L'homme décidément collectionne les défis. 15 mois à peine après avoir créé la maison d'édition «Mille Feuilles» reprenant ainsi l'appellation de la librairie de la rue Boukhalfa, il a déjà à son actif 30 titres. Remettant sa casquette de psychologue, Sid-Ali Sakhri soutient que «la violence n'est jugulée que par le débat. Si on ne maîtrise pas le verbe, si on est impuissant à s'exprimer avec des mots, on sombre dans la violence. Le café littéraire est un espace, j'allais dire thérapeutique, ça peut paraître prétentieux, mais bon, c'est un espace où chacun peut verbaliser sa pensée, l'échange permet de faire baisser la tension». Il avait abandonné sa carrière de psychologue parce que, explique-t-il, «le métier était dévalorisé. On était comme des semeurs de vent comparativement au médecin qui jouit du pouvoir de délivrer des ordonnances. Le psy était à la fois idéalisé et rejeté par la société. Il percevait un salaire minable. Pas question de mettre sur le même pied d'égalité les deux professions. Le psy et le métier de libraire. La différence c'est que le métier de libraire est fabuleux. Ça m'a permis de renouer avec le métier de psychologue puisqu'il fallait constamment être à l'écoute des clients. On vous prête à la fois beaucoup de savoir et de connaissances. On est dans l'univers de la pensée et de l'écrit». Son souhait, est de voir «fleurir d'autres cafés littéraires partout». Presque la même histoire se répète avec ce café littéraire qu'il vient d'ouvrir à la rue Ahmed Zabana, ex-Hoche, près de la radio El Bahdja dans le centre d'Alger. «Mon père avait un café à Bab-el-Oued, j'ai grandi dans cet espace convivial où l'on discutait football, mais où la culture savante et les femmes étaient absentes. Je voulais recréer cet espace que je me remémore sans cesse tout en le complétant avec les apports de ma propre culture» dit-il. Le café littéraire, le premier du genre en Algérie, mérite sans doute son nom d' «Ile Lettrée», n'est-ce pas qu'il se conçoit comme un espace insulaire au sein d'une société majoritairement travaillée par les valeurs mercantiles et matérielles? Il n'est pas évident de voir beaucoup de monde se bousculer au portillon rien que pour le plaisir de lire quelques pages des 800 titres que contient la bibliothèque du café. On ne peut s'embarquer dans quelque aventure sans se laisser gagner par ces sortes de ratiocinations et d'appréhensions. Sid-Ali Sakhri compte provoquer un débat sur le mécénat culturel. Il a déjà déboursé 11 briques pour la location du local pour une durée d'une année. Une année passe vite et il sait que le café, du moins sur le plan financier, n'est pas rentable. «Je paye les impôts comme tout le monde et je n'ai pas le droit de vendre autres choses que les boissons, éventuellement des livres aussi». Le mécénat culturel ? Son visage se rembrunit dès qu'il aborde la question. «Je ne connais pas de mécène algérien en ce domaine. Quelqu'un m'a dit que le mot mécène vient de l'arabe «mouhsine» (le bienfaiteur). Je pense que ça doit exister. Au Maroc, il est très développé. Chez nous, il se manifeste surtout dans le domaine religieux et sportif. Mais là, nous touchons plutôt au sponsoring». "La ministre de la Culture m'a encouragé, mais je n'ai reçu aucune subvention. Je ne demande pas un salaire, non. Dans la mesure où l'on devient utile au quartier et à la cité, l'idéal serait qu'une tierce partie prenne en charge le loyer afin qu'on puisse entièrement se consacrer à l'amélioration du service. Les centres culturels étrangers ont émis le souhait de nous aider, ils s'y intéressent parce qu'ils veulent promouvoir leur langue et leur culture. Ils sont plus sensibilisés que les pouvoirs publics avec lesquels nous préférons cependant travailler" poursuit-il. «Seuls, dit-il, certains journaux y ont montré de l'intérêt, ils ont proposé de nous aider en co-animant le café. Je laisse la porte ouverte, on est au stade de la réflexion». Sid-Ali Sakhri se définit comme «un optimiste anxieux». «J'ai fait une formation de psychologue, je sais de quoi je parle. Ça va être difficile, il faut se battre, je sais qu'on finira par surmonter tous les obstacles.» L'«Ile Lettrée» avait ouvert ses portes en octobre de l'année 2009 mais a dû baisser le rideau 3 mois durant. La réouverture n'ayant lieu que fin décembre dernier. «Je n'étais pas encore prêt, il fallait un registre du commerce et une licence de Moudjahid». Il a souri quand il a évoqué la réaction des riverains. «Les gens nous ont pris pour des Martiens qui ont atterri au bas de l'immeuble, ils n'arrivent pas à définir le lieu, ils voient des livres, des dames et des messieurs qui viennent. On est un peu naïf, un peu idiot, des imbéciles heureux au moment où l'argent est roi, on fait de la culture. Mais on peut aussi comprendre par là que la culture occupe dans l'imaginaire des gens une place particulière». Et d'affirmer que «l'existence du café littéraire a été rendu possible grâce aux pratiques démocratiques, J'estime que ce sont des conditions qui existent». «Je ne crains pas les dérapages politiques, tout acte culturel est nécessairement politique. La politique, on doit la faire d'une manière subtile. Ce n'est pas intéressant d'en faire comme en font les partis politiques. On peut rester critique et surtout se démarquer des insultes qui sont l'expression de la paresse intellectuelle». Sid-Ali Sakhri avait découvert le monde de l'édition dès son jeune âge. Recruté en tant que stagiaire à l'entreprise nationale du livre (ENAL), il devient après 6 mois chef de département et après une année directeur de l'édition et art graphique. Lorsque plus tard le moment était venu d'ouvrir sa propre librairie, il n'hésite pas à s'installer rue Khelifa Boukhalfa, dans un local qui fait face à l'une des grandes mosquées de la capitale. L'homme décidément collectionne les défis. 15 mois à peine après avoir créé la maison d'édition «Mille Feuilles» reprenant ainsi l'appellation de la librairie de la rue Boukhalfa, il a déjà à son actif 30 titres. Remettant sa casquette de psychologue, Sid-Ali Sakhri soutient que «la violence n'est jugulée que par le débat. Si on ne maîtrise pas le verbe, si on est impuissant à s'exprimer avec des mots, on sombre dans la violence. Le café littéraire est un espace, j'allais dire thérapeutique, ça peut paraître prétentieux, mais bon, c'est un espace où chacun peut verbaliser sa pensée, l'échange permet de faire baisser la tension». Il avait abandonné sa carrière de psychologue parce que, explique-t-il, «le métier était dévalorisé. On était comme des semeurs de vent comparativement au médecin qui jouit du pouvoir de délivrer des ordonnances. Le psy était à la fois idéalisé et rejeté par la société. Il percevait un salaire minable. Pas question de mettre sur le même pied d'égalité les deux professions. Le psy et le métier de libraire. La différence c'est que le métier de libraire est fabuleux. Ça m'a permis de renouer avec le métier de psychologue puisqu'il fallait constamment être à l'écoute des clients. On vous prête à la fois beaucoup de savoir et de connaissances. On est dans l'univers de la pensée et de l'écrit». Son souhait, est de voir «fleurir d'autres cafés littéraires partout».