La plupart des sondages en Tunisie se sont focalisés sur des intentions de vote au niveau national, négligeant totalement les variations à l'intérieur de circonscriptions électorales particulières . La plupart des sondages en Tunisie se sont focalisés sur des intentions de vote au niveau national, négligeant totalement les variations à l'intérieur de circonscriptions électorales particulières . Ennahda était le seul parti qui couvrait la totalité du pays, avec des stratégies taillées sur mesure pour chaque circonscription, y compris les zones rurales. En Egypte, les Frères musulmans possèdent encore un autre avantage, qui s'est construit sur le terrain. Avec 88 députés dans le précédent parlement (2005-2010), le groupe a pu fournir un plus large éventail de services au niveau local et construire des relations plus fortes avec les électeurs. Qui, exactement, est en compétition? La branche politique de la confrérie, le parti Justice et Liberté, est rejoint par le parti Al-Ghad de Ayman Nour, le parti Karama, et une poignée de petits partis, pour former la liste «Alliance démocratique». Il y a quatre autres listes principales, dont trois sont de gauche ou libérales (le Bloc égyptien, la Révolution continue, le parti Wafd). Avec leur financement considérable et leur réseau de patronage, le parti Wafd de centre-droit, dirigé par le multi-millionnaire Al-Sayyid Badawy, et ce qui reste de l'ancien parti au pouvoir le Parti national démocratique, sont aussi bien placés pour remporter une part significative du vote. Une alliance avec les islamistes : une nécessité pour les partis libéraux Pour leur part, les nouveaux partis libéraux souffrent d'une incapacité à avoir une idéologie ou un agenda clair, un défaut majeur dans un pays où le «libéralisme» continue à avoir une connotation négative. De nombreux partis libéraux semblent parfois n'exister que par le simple fait de ne pas être un mouvement islamiste, faisant le choix de jouer sur les craintes des gens face à une théocratie imminente. Mais une telle stratégie pourrait produire l'effet inverse, dans un pays où 67% des Egyptiens disent que les lois devraient suivre strictement les enseignements du Coran, et où 27 % des Egyptiens disent qu'ils devraient suivre, d'une façon ou d'une autre, les valeurs et les principes de l'Islam, selon un sondage de l'institut Pew en avril. En Tunisie, le Parti démocrate progressiste, qui se positionne comme un choix anti-islamiste, a été balayé lors des élections, alors que les deux partis libéraux qui maintenaient de bonnes relations avec Ennahda - le Congrès pour la République et Ettakatol – s'en sont bien tirés, finissant respectivement en seconde et troisième place. La voix des pauvres et du libéralisme économique Le chemin semble tout tracé pour les partis libéraux et les partis de gauche, et il semble bien prometteur : il faut mettre en évidence les difficultés économiques grandissantes de l'Egypte. Mais cela aussi peut se révéler un défi, car la plupart des partis – de gauche ou non – utilise la même rhétorique sur l'économie: la pauvreté c'est mal, les emplois c'est bien, la justice sociale c'est mieux, et ainsi de suite. En Egypte, le groupe a lancé récemment «Millioniyyat al-Khayr» (l'acte de bonne volonté d'un million d'hommes), une initiative visant à fournir 1,5 million de kilos de viande à cinq millions d'Egyptiens pour les fêtes de l'Aïd. Mieux vaut les Frères musulmans que les Salafistes Il est toujours possible que la confrérie réalise une contre-performance – comme lors des récentes élections du syndicat professionnel des médecins. L'alternative aux islamistes modérés pourrait se révéler être... Des islamistes moins modérés. Bien avant le printemps arabe, les dirigeants des Frères musulmans ont dit que leurs jeunes étaient de plus en plus influencés par les idées salafistes. Un responsable de la confrérie indique, officiellement, que les Salafistes étaient cinq fois plus nombreux que les autres. Les groupes salafistes sont de plus en plus ambitieux, et un de leurs dirigeants a affirmé qu'ils remporteraient 30% des sièges. Ambitieux, les salafistes sont toutefois des novices en politique, avec quasiment aucune expérience de campagne législative. Mais ils ont montré qu'ils apprenaient vite, ils ont réussi à s'unifier, rassemblant quatre partis salafistes sous la bannière de «l'Alliance islamique». D'ailleurs, les déclarations ou souhaits des libéraux disant que les salafistes évoluent hors du principal courant de pensée du pays pourraient n'être que des illusions. Dans un sondage de décembre 2010, 82% des Egyptiens ont déclaré être favorables à la lapidation en cas d'adultère, et 67% soutenaient l'amputation des mains des voleurs. Seul mouvement avec les Frères musulmans à posséder une base populaire, les salafistes ont décidé d'organiser la circulation dans les endroits embouteillés d'Alexandrie, ils se sont engagés dans des campagnes d'éducation en faisant du porte-à-porte, et ils ont fourni des services de santé aux pauvres. Ce ne sont pas nécessairement les idées qui sont au cœur de ces élections. Ce sont les électeurs. Et de ce point de vue, les élections en Egypte ressemblent beaucoup à celles des Etats-Unis. Les «gentils», quel qu'ils soient, ne sont pas toujours les vainqueurs. Si les partis islamistes font aussi bien que cela leur est possible – remportant plus de 50% des votes – les réactions alarmistes venant des pays occidentaux seront considérables. Pourtant, l'indicateur important pour cette période troublée de transition en Egypte n'est pas «qui va gagner» mais plutôt si les Egyptiens ont l'opportunité de choisir leur propres représentants, sans intimidation ni interférence. La démocratie, comme le savent depuis longtemps les démocraties occidentales, signifie le droit de faire le mauvais choix. Ennahda était le seul parti qui couvrait la totalité du pays, avec des stratégies taillées sur mesure pour chaque circonscription, y compris les zones rurales. En Egypte, les Frères musulmans possèdent encore un autre avantage, qui s'est construit sur le terrain. Avec 88 députés dans le précédent parlement (2005-2010), le groupe a pu fournir un plus large éventail de services au niveau local et construire des relations plus fortes avec les électeurs. Qui, exactement, est en compétition? La branche politique de la confrérie, le parti Justice et Liberté, est rejoint par le parti Al-Ghad de Ayman Nour, le parti Karama, et une poignée de petits partis, pour former la liste «Alliance démocratique». Il y a quatre autres listes principales, dont trois sont de gauche ou libérales (le Bloc égyptien, la Révolution continue, le parti Wafd). Avec leur financement considérable et leur réseau de patronage, le parti Wafd de centre-droit, dirigé par le multi-millionnaire Al-Sayyid Badawy, et ce qui reste de l'ancien parti au pouvoir le Parti national démocratique, sont aussi bien placés pour remporter une part significative du vote. Une alliance avec les islamistes : une nécessité pour les partis libéraux Pour leur part, les nouveaux partis libéraux souffrent d'une incapacité à avoir une idéologie ou un agenda clair, un défaut majeur dans un pays où le «libéralisme» continue à avoir une connotation négative. De nombreux partis libéraux semblent parfois n'exister que par le simple fait de ne pas être un mouvement islamiste, faisant le choix de jouer sur les craintes des gens face à une théocratie imminente. Mais une telle stratégie pourrait produire l'effet inverse, dans un pays où 67% des Egyptiens disent que les lois devraient suivre strictement les enseignements du Coran, et où 27 % des Egyptiens disent qu'ils devraient suivre, d'une façon ou d'une autre, les valeurs et les principes de l'Islam, selon un sondage de l'institut Pew en avril. En Tunisie, le Parti démocrate progressiste, qui se positionne comme un choix anti-islamiste, a été balayé lors des élections, alors que les deux partis libéraux qui maintenaient de bonnes relations avec Ennahda - le Congrès pour la République et Ettakatol – s'en sont bien tirés, finissant respectivement en seconde et troisième place. La voix des pauvres et du libéralisme économique Le chemin semble tout tracé pour les partis libéraux et les partis de gauche, et il semble bien prometteur : il faut mettre en évidence les difficultés économiques grandissantes de l'Egypte. Mais cela aussi peut se révéler un défi, car la plupart des partis – de gauche ou non – utilise la même rhétorique sur l'économie: la pauvreté c'est mal, les emplois c'est bien, la justice sociale c'est mieux, et ainsi de suite. En Egypte, le groupe a lancé récemment «Millioniyyat al-Khayr» (l'acte de bonne volonté d'un million d'hommes), une initiative visant à fournir 1,5 million de kilos de viande à cinq millions d'Egyptiens pour les fêtes de l'Aïd. Mieux vaut les Frères musulmans que les Salafistes Il est toujours possible que la confrérie réalise une contre-performance – comme lors des récentes élections du syndicat professionnel des médecins. L'alternative aux islamistes modérés pourrait se révéler être... Des islamistes moins modérés. Bien avant le printemps arabe, les dirigeants des Frères musulmans ont dit que leurs jeunes étaient de plus en plus influencés par les idées salafistes. Un responsable de la confrérie indique, officiellement, que les Salafistes étaient cinq fois plus nombreux que les autres. Les groupes salafistes sont de plus en plus ambitieux, et un de leurs dirigeants a affirmé qu'ils remporteraient 30% des sièges. Ambitieux, les salafistes sont toutefois des novices en politique, avec quasiment aucune expérience de campagne législative. Mais ils ont montré qu'ils apprenaient vite, ils ont réussi à s'unifier, rassemblant quatre partis salafistes sous la bannière de «l'Alliance islamique». D'ailleurs, les déclarations ou souhaits des libéraux disant que les salafistes évoluent hors du principal courant de pensée du pays pourraient n'être que des illusions. Dans un sondage de décembre 2010, 82% des Egyptiens ont déclaré être favorables à la lapidation en cas d'adultère, et 67% soutenaient l'amputation des mains des voleurs. Seul mouvement avec les Frères musulmans à posséder une base populaire, les salafistes ont décidé d'organiser la circulation dans les endroits embouteillés d'Alexandrie, ils se sont engagés dans des campagnes d'éducation en faisant du porte-à-porte, et ils ont fourni des services de santé aux pauvres. Ce ne sont pas nécessairement les idées qui sont au cœur de ces élections. Ce sont les électeurs. Et de ce point de vue, les élections en Egypte ressemblent beaucoup à celles des Etats-Unis. Les «gentils», quel qu'ils soient, ne sont pas toujours les vainqueurs. Si les partis islamistes font aussi bien que cela leur est possible – remportant plus de 50% des votes – les réactions alarmistes venant des pays occidentaux seront considérables. Pourtant, l'indicateur important pour cette période troublée de transition en Egypte n'est pas «qui va gagner» mais plutôt si les Egyptiens ont l'opportunité de choisir leur propres représentants, sans intimidation ni interférence. La démocratie, comme le savent depuis longtemps les démocraties occidentales, signifie le droit de faire le mauvais choix.