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La productivité est en perte de 40%
Entretien avec Mokrane Mezouane, président de l'Association Nationale et Filière Avicoles
Publié dans Le Midi Libre le 19 - 11 - 2012

Midi Libre : L‘aviculture est l‘une des spéculations agricoles les plus problématiques...
Mokrane Mezouane : Avant de parler de la filière je pense qu‘il est bon de définir cette spéculation chez nous. Par rapport à nos voisins tunisiens et marocains l‘aviculture est atomisée chez nous, ce sont de petits élevages dont le modus opérandi répond à la théorie de l‘économie d‘échelle. Cela s‘explique par l‘anarchie que connaît ou s‘il en est, subit la filière de l‘aval à l‘amont. Pour commencer les céréaliers, en tant qu‘importateurs de l‘aliment du cheptel, ne jouent pas leurs rôles. Ils ne s‘impliquent pas dans la spéculation. Vient ensuite le chaînon de la reproduction. Chez nous elle débute par l‘œuf reproducteur. L‘on devrait produire 500 millions de poussins d‘un jour, or nos chiffres à nous sont de 300 millions par an, ce cheptel n‘arrive pas à terme. Il est réformé avant la fin de son cycle de production ; et pour cause, si entre-temps le marché vient à manquer en poulet de chair, par appât du gain le poulet destiné à la reproduction est dévié de sa vocation, il est envoyé aux abattoirs. Et comme vous pouvez l‘imaginer, cela se traduit par une perte de la productivité. Chez nous elle est estimée à 40%.
L‘autre chaînon est-il aussi titubant ?
Il s‘agit du couvoir. Il faut savoir qu‘en théorie l‘éclosion se fait avec un taux de 75%, reste que sur le terrain les chiffres sont tout autre. Ils sont en deçà du taux théorique. En temps normal, c‘est-à-dire si les conditions météorologiques sont clémentes, précisément s‘il ne fait pas trop chaud ou froid le taux d‘éclosion s‘articule
autour de 60% et la qualité du poussin est discutable.
Puis arrive l‘abattoir...
Mais avant il est utile de rappeler que l‘élevage des poussins enregistre environ un taux de mortalité de 20% actuellement, il est anormalement élevé, il devrait se situer à 6% avec une alimentation adaptée, c‘est-à-dire équilibrée. Elle doit comprendre du tourteau de soja, du maïs, de l‘eau, des CMV et des phosphates. Selon sa vocation le cheptel reproducteur est rationné tandis que le poussin à chair est alimenté à volonté pendant 7 semaines. Au delà de 7 semaine on produit de la graisse et l‘on augmente l‘indice de conversion. Les éleveurs nomment ce régime durant cette période de 7 semaines d‘indice de consommation (IC). Au delà des 7 semaines et avec le même régime le poulet produira de la graisse qui se traduit sur la spéculation en elle-même par une perte sèche. En Algérie l‘IC est supérieure à 1,5 kg
Pourtant la graisse du poulet a une niche économique
Elle est utilisée en agroalimentaire, dans la production du dentifrice, dans le cirage, etc. Néanmoins elle est considérée comme de la sous- production et est secondaire par rapport à la première (poulet de chair). Toujours est- il et pour rester dans le vif du sujet après les 6 semaines d‘élevage le cheptel est prêt pour passer à l‘abattoir.
Il s‘agit là de l‘un des maillons les plus décriés de la filière
Dans l‘avant-projet portant sur une charte de qualité et pacte de croissance encadrant et engageant les activités professionnels de la filière pour la structuration et la modernisation de l‘aviculture il est recommandé de moderniser ce maillon. Il existe en tout et pour tout une centaine d‘abattoirs. S‘agissant du secteur public il faut savoir que nous possédons 15 unités des plus modernes et adaptées aux normes standards et donc internationales. Elles sont répertoriées au nombre de cinq selon les différentes régions à vocation avicole. Ainsi l‘on retrouve des abattoirs de cet acabit à Larbaa, Sidi Moussa, à Tizi- Ouzou, à Oued Djar, à Bouira et à Berrouaghia. Il en est de même et autant pour l‘Ouest et l‘Est. Ces abattoirs ont été réalisés avec la coopération de la Banque africaine du développement. Elle s‘est investi à hauteur du tiers de la facture, elle s‘est intéressée à leurs équipements et veiller à leur emplacement au bon endroit. Aujourd‘hui je peux vous confirmer qu‘ils sont praticables et des plus commodes. De là appeler à les moderniser de plus c‘est du soupoudrage. En revanche, la problématique des tueries clandestines, elle, est d‘actualité malgré l‘inspection vétérinaire. En ce sens qu‘il
y a toujours un moyen de détourner l‘attention de
l‘inspection et il est difficile de faire la différence entre une poule égorgée le jour même de celle qui l‘a été la veille.
L‘on a parlé de pratiquement tous les chaînons de l‘aviculture mais qui s‘occupe de l‘alimentation.
A l‘échelle nationale il existe quelque 30.00 fabricants d‘alimentation pour le cheptel aviaire. Ils ne s‘approvisionnent pas chez le même céréalier. Il faut savoir que plus de 50% de ces fabricants ne sont pas équipés pour. L‘activité est dominée par des gens sans formation. L‘on peut deviner les lacunes au niveau du rationnement dans la mesure ou la composition de l‘aliment destiné au cheptel n‘est pas équilibré et cela quelle que soit la vocation à laquelle est destiné le poulet. Pour illustrer mes propos je citerai que dans un quintal d‘aliment se trouve du tourteau de soja et du maïs. La charge protéique est générée par le tourteau, et comme celui-ci est plus cher que le maïs le fabricant avicole le rationnent en augmentant les doses de maïs. Ajouté à cela l‘apport des CMV estimé à 1% de la ration par jour dont le quintal est échangé à 1,5 million de centimes. Pour faire des économies l‘on sait que ces dosages ne sont pas respectés. Les conséquences sont prévisibles : le poulet n‘exprime pas ses potentialités, au lieu des deux kilos cinq cents grammes d‘un apport d‘IC, il est réduit à 1,8kg. Ceci signifie que le poulet aura mal transformé ses aliment faute de présence de tous les nutriments et donc matériaux diététiques nécessaires pour, dans ce cas, fabriquer du muscle.
Qu‘en est-il de la qualité du maïs
et tourteau de soja
Ils sont importés. Ils proviennent d‘Argentine, des Etats-Unis, d‘Ukraine et d‘Europe.
Selon vous, comment améliorer
la production ?
Il faut intervenir sur l‘ensemble des différents maillons en procédant à des mises à niveau. Par ailleurs et pour une meilleure rentabilité il devient nécessaire de former les gens au niveau des centres des formation agricole et agronomique pour redresser la barre de la production avicole, notamment en zootechnie en spécialité aviaire. En outre il est impératif d‘améliorer l‘inspection aux frontières pour vérifier la qualité des produits importés. Ces conditions réunies permettront avec certitude de récupérer les pertes de productivités et ramener le prix du poulet de 340 DA à 200DA
Quid de la fiscalité ?
Il y a trois mois le département de Benaïssa a annoncé la suppression de la TVA. Si l‘initiative a été applaudie par les aviculteurs son écho peine à ce jour à retentir du côté des finances. En plus simple les bureaux des impôts, n‘ayant reçu aucune instruction, continuent à maintenir et à faire payer cette TVA aux aviculteurs qui ont vite déchanté !
Midi Libre : L‘aviculture est l‘une des spéculations agricoles les plus problématiques...
Mokrane Mezouane : Avant de parler de la filière je pense qu‘il est bon de définir cette spéculation chez nous. Par rapport à nos voisins tunisiens et marocains l‘aviculture est atomisée chez nous, ce sont de petits élevages dont le modus opérandi répond à la théorie de l‘économie d‘échelle. Cela s‘explique par l‘anarchie que connaît ou s‘il en est, subit la filière de l‘aval à l‘amont. Pour commencer les céréaliers, en tant qu‘importateurs de l‘aliment du cheptel, ne jouent pas leurs rôles. Ils ne s‘impliquent pas dans la spéculation. Vient ensuite le chaînon de la reproduction. Chez nous elle débute par l‘œuf reproducteur. L‘on devrait produire 500 millions de poussins d‘un jour, or nos chiffres à nous sont de 300 millions par an, ce cheptel n‘arrive pas à terme. Il est réformé avant la fin de son cycle de production ; et pour cause, si entre-temps le marché vient à manquer en poulet de chair, par appât du gain le poulet destiné à la reproduction est dévié de sa vocation, il est envoyé aux abattoirs. Et comme vous pouvez l‘imaginer, cela se traduit par une perte de la productivité. Chez nous elle est estimée à 40%.
L‘autre chaînon est-il aussi titubant ?
Il s‘agit du couvoir. Il faut savoir qu‘en théorie l‘éclosion se fait avec un taux de 75%, reste que sur le terrain les chiffres sont tout autre. Ils sont en deçà du taux théorique. En temps normal, c‘est-à-dire si les conditions météorologiques sont clémentes, précisément s‘il ne fait pas trop chaud ou froid le taux d‘éclosion s‘articule
autour de 60% et la qualité du poussin est discutable.
Puis arrive l‘abattoir...
Mais avant il est utile de rappeler que l‘élevage des poussins enregistre environ un taux de mortalité de 20% actuellement, il est anormalement élevé, il devrait se situer à 6% avec une alimentation adaptée, c‘est-à-dire équilibrée. Elle doit comprendre du tourteau de soja, du maïs, de l‘eau, des CMV et des phosphates. Selon sa vocation le cheptel reproducteur est rationné tandis que le poussin à chair est alimenté à volonté pendant 7 semaines. Au delà de 7 semaine on produit de la graisse et l‘on augmente l‘indice de conversion. Les éleveurs nomment ce régime durant cette période de 7 semaines d‘indice de consommation (IC). Au delà des 7 semaines et avec le même régime le poulet produira de la graisse qui se traduit sur la spéculation en elle-même par une perte sèche. En Algérie l‘IC est supérieure à 1,5 kg
Pourtant la graisse du poulet a une niche économique
Elle est utilisée en agroalimentaire, dans la production du dentifrice, dans le cirage, etc. Néanmoins elle est considérée comme de la sous- production et est secondaire par rapport à la première (poulet de chair). Toujours est- il et pour rester dans le vif du sujet après les 6 semaines d‘élevage le cheptel est prêt pour passer à l‘abattoir.
Il s‘agit là de l‘un des maillons les plus décriés de la filière
Dans l‘avant-projet portant sur une charte de qualité et pacte de croissance encadrant et engageant les activités professionnels de la filière pour la structuration et la modernisation de l‘aviculture il est recommandé de moderniser ce maillon. Il existe en tout et pour tout une centaine d‘abattoirs. S‘agissant du secteur public il faut savoir que nous possédons 15 unités des plus modernes et adaptées aux normes standards et donc internationales. Elles sont répertoriées au nombre de cinq selon les différentes régions à vocation avicole. Ainsi l‘on retrouve des abattoirs de cet acabit à Larbaa, Sidi Moussa, à Tizi- Ouzou, à Oued Djar, à Bouira et à Berrouaghia. Il en est de même et autant pour l‘Ouest et l‘Est. Ces abattoirs ont été réalisés avec la coopération de la Banque africaine du développement. Elle s‘est investi à hauteur du tiers de la facture, elle s‘est intéressée à leurs équipements et veiller à leur emplacement au bon endroit. Aujourd‘hui je peux vous confirmer qu‘ils sont praticables et des plus commodes. De là appeler à les moderniser de plus c‘est du soupoudrage. En revanche, la problématique des tueries clandestines, elle, est d‘actualité malgré l‘inspection vétérinaire. En ce sens qu‘il
y a toujours un moyen de détourner l‘attention de
l‘inspection et il est difficile de faire la différence entre une poule égorgée le jour même de celle qui l‘a été la veille.
L‘on a parlé de pratiquement tous les chaînons de l‘aviculture mais qui s‘occupe de l‘alimentation.
A l‘échelle nationale il existe quelque 30.00 fabricants d‘alimentation pour le cheptel aviaire. Ils ne s‘approvisionnent pas chez le même céréalier. Il faut savoir que plus de 50% de ces fabricants ne sont pas équipés pour. L‘activité est dominée par des gens sans formation. L‘on peut deviner les lacunes au niveau du rationnement dans la mesure ou la composition de l‘aliment destiné au cheptel n‘est pas équilibré et cela quelle que soit la vocation à laquelle est destiné le poulet. Pour illustrer mes propos je citerai que dans un quintal d‘aliment se trouve du tourteau de soja et du maïs. La charge protéique est générée par le tourteau, et comme celui-ci est plus cher que le maïs le fabricant avicole le rationnent en augmentant les doses de maïs. Ajouté à cela l‘apport des CMV estimé à 1% de la ration par jour dont le quintal est échangé à 1,5 million de centimes. Pour faire des économies l‘on sait que ces dosages ne sont pas respectés. Les conséquences sont prévisibles : le poulet n‘exprime pas ses potentialités, au lieu des deux kilos cinq cents grammes d‘un apport d‘IC, il est réduit à 1,8kg. Ceci signifie que le poulet aura mal transformé ses aliment faute de présence de tous les nutriments et donc matériaux diététiques nécessaires pour, dans ce cas, fabriquer du muscle.
Qu‘en est-il de la qualité du maïs
et tourteau de soja
Ils sont importés. Ils proviennent d‘Argentine, des Etats-Unis, d‘Ukraine et d‘Europe.
Selon vous, comment améliorer
la production ?
Il faut intervenir sur l‘ensemble des différents maillons en procédant à des mises à niveau. Par ailleurs et pour une meilleure rentabilité il devient nécessaire de former les gens au niveau des centres des formation agricole et agronomique pour redresser la barre de la production avicole, notamment en zootechnie en spécialité aviaire. En outre il est impératif d‘améliorer l‘inspection aux frontières pour vérifier la qualité des produits importés. Ces conditions réunies permettront avec certitude de récupérer les pertes de productivités et ramener le prix du poulet de 340 DA à 200DA
Quid de la fiscalité ?
Il y a trois mois le département de Benaïssa a annoncé la suppression de la TVA. Si l‘initiative a été applaudie par les aviculteurs son écho peine à ce jour à retentir du côté des finances. En plus simple les bureaux des impôts, n‘ayant reçu aucune instruction, continuent à maintenir et à faire payer cette TVA aux aviculteurs qui ont vite déchanté !


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