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Le ténor de la complainte Chaouie
Aissa El Djermouni El Harkati
Publié dans Le Midi Libre le 23 - 09 - 2007

Aissa El Djermouni reste le chantre, incontestable et incontesté de la chanson chaouie. Tout analphabète qu'il était, le maître de la chanson chaouie, trouvait, dit-on, seul les paroles qui composaient ses chansons
Aissa El Djermouni reste le chantre, incontestable et incontesté de la chanson chaouie. Tout analphabète qu'il était, le maître de la chanson chaouie, trouvait, dit-on, seul les paroles qui composaient ses chansons
Chantre de la chanson chaouie, Aissa El-Djermouni El-Harkati a fait vibrer l'Olympia (Paris) en 1936. Le ténor des Aures a de ce fait été le premier chanteur arabe et africain à fouler les planches de l'une des scènes les plus convoitées par les artistes à travers le monde. L'homme au 'bendir' et porte-flambeau de la chanson chaouie est né en 1885 dans une famille pauvre de la tribu des Ouled Amar entre Nemenchas et Heraktas. Enfant, le petit Aissa est placé dans une petite école coranique de la mechta. Âgé de 6 ans, Aissa quitte cette dernière pour aller, avec ses parents, s'installer dans sa tribu des Ouled Amara à Bir Smail dans la commune de M'toussa, après que son père - paysan à la voix de ténor -seul et unique soutien décède. Celui qui deviendra le chantre de la chanson chaouie quitte, alors, l'école coranique et se consacre, avec son frère aîné, à l'entretien du troupeau de la famille. Ce frère qui fredonnait déjà la chanson chaouie. Inspiré, le jeune Aissa s'engagea à en faire autant essayant, même, de surpasser son frère. Ils passaient ainsi leurs temps à fredonner les litanies connues du terroir, jusqu'à la tombée de la nuit. C'est à partir de cette période que le jeune El-Djermouni apprend à donner libre cours à sa rêverie et confier sa douleur aux complaintes chaouies. Il fit preuve de dispositions si étonnantes, qu'adolescent à peine il se fait remarquer par sa voix de ténor et devint connu dans toute la région des Nememchas et des Haraktas.
En 1901 ou 1902, l'ancien berger, qui habitait à cette époque Ain-Beida, accompagne son cousin Mohamed Ben Zine Tir, un virtuose de la flûte. L'instrumentiste devint, depuis cette date, son accompagnateur de toujours pour la mélodie. Le duo formé, les deux artistes commencèrent à se produire dans des mariages, puis sur les terrasses de cafés. Les invitations vers d'autres horizons commencèrent à pleuvoir et le périple débuta par des soirées animées à Annaba, Sétif, Guelma, Biskra. De pérégrinations en voyages initiatiques, El-Djermouni quitte le pays en 1924, transite par l'Egypte, le Maroc et s'installe en Tunisie où il enregistre son premier 78 tours. Parti pour quelques mois, il y séjournera plus de dix-huit mois. En 1927, il sort de son anonymat en réussissant à s'imposer
par sa simplicité, sa
bienveillance et sa voix claire et limpide. En 1929, "Ouardaphone'' lui enregistre un 78 tours intitulé "Ahway, Ahway Khelini Nhoum''. Faisant preuve de grandes dispositions, il se fait remarquer par sa voix et entre dans les grâces de grands poètes du genre tels Hadj El Bouarrissa, Hadj Djebbar et beaucoup d'autres qui lui composèrent des chansons, particulièrement celles patriotiques et révolutionnaires dont "Ya Hadda Khouiti ma t'gouliche ikhaf'' qu'il enregistra en Tunisie en 78 tours chez les éditions Ben Baroud en 1930, et qui fait l'apologie d'un certain Ben Zelmat, un rebelle notoire qui rejetait toutes les lois du colonisateur et retranché dans les montagnes de l'Aurès pour faire le justicier. Suivirent après "El Fouchi Nou Mesmar'' puis "Akred Anouguir'' ou encore "Wach talaou fel aguba'', toutes des chansons traitant dans le même contexte et à travers lesquelles l'artiste dénonçait l'esclavage de son peuple, sous le joug colonial.
En 1930, c'est la consécration. En France, Aissa El Djermouni El-Harkati enregistre plus de 35 chansons en 78 tours chez Haroun José Edition. Il a déjà plus de 120 chansons dans son répertoire. Ce qui permettra au dandy à la moustache portée à la turque et au regard ferme et énergique de faire son entrée à l'Olympia en 1936.
Devenant, ainsi, le premier artiste arabe et africain à fouler la scène de l'une des salles les plus convoitée du monde. "Akerr Anouguir'', "Salef dhaberkane'', "Hill li ma aandouche wail'', "Ain El Kerma'', "Ma tgoulou dhelou''» et bien d'autres titres encore, séduisent le public très nombreux venu assister à la soirée. Porté aux nues par ses fans, le mythe Jarmouni est né. Après quoi, le duo entreprit l'enregistrement de plusieurs chansons aux éditions Warda-Phone, en disques de 78 et 45 tours.
De sa vie privée, on sait que Aissa El Djermouni El-Harkati a épousé en premières noces sa cousine Fatima (1900-1926) à Ain-Beida. Elle lui donna deux filles, Rebaia née en 1914 et Aicha Baya née en 1916, avant de mourir très jeune à l'age de 26 ans. Après quoi, Il épousa par la suite Louisa Ferrari, fille d'un Européen, mécanicien de profession, converti à l'Islam et baptisé Chérif. Louisa était la cadette de ses deux frères Lalouani et Messaoud. De cette deuxième union naquirent trois autres filles, Fatima, Bellara et Dalila. Il est reconnu que Aissa El Djermouni reste le chantre incontestable et incontesté de la chanson chaouie. Tout analphabète qu'il était, le maître de la chanson chaouie, trouvait, dit-on, seul les paroles qui composaient ses chansons et les airs musicaux que reprenait aussitôt à l'aide de sa " gasba "(flûte) Mohamed Ben Zine. A l'âge de 61 ans, l'artiste contracte le typhus. Hospitalisé à Alger il décède, le 16 décembre 1946, dans un hôpital à Constantine.
Il est enterré à Sidi Rghiss dans la wilaya d'Oum El Bouaghi. Dix jours avant sa mort, affirment-on, Aissa El Djermouni avait animé un mariage qui fut sa dernière apparition en public. Le jour de la mort du chantre de la chanson chaouie, Mohamed Ben Zine, celui qui fut son flûtiste, son compagnon de route et son complice a brisé sa flûte et a juré de ne plus jouer.
Un an plus tard, il partit à la Mecque pour ratifier sa promesse avant de rejoindre son ami quelques années plus tard. Aujourd'hui, en signe de reconnaissance, les pouvoirs publics algériens consacre un festival annuel à ce grand artiste.
Chantre de la chanson chaouie, Aissa El-Djermouni El-Harkati a fait vibrer l'Olympia (Paris) en 1936. Le ténor des Aures a de ce fait été le premier chanteur arabe et africain à fouler les planches de l'une des scènes les plus convoitées par les artistes à travers le monde. L'homme au 'bendir' et porte-flambeau de la chanson chaouie est né en 1885 dans une famille pauvre de la tribu des Ouled Amar entre Nemenchas et Heraktas. Enfant, le petit Aissa est placé dans une petite école coranique de la mechta. Âgé de 6 ans, Aissa quitte cette dernière pour aller, avec ses parents, s'installer dans sa tribu des Ouled Amara à Bir Smail dans la commune de M'toussa, après que son père - paysan à la voix de ténor -seul et unique soutien décède. Celui qui deviendra le chantre de la chanson chaouie quitte, alors, l'école coranique et se consacre, avec son frère aîné, à l'entretien du troupeau de la famille. Ce frère qui fredonnait déjà la chanson chaouie. Inspiré, le jeune Aissa s'engagea à en faire autant essayant, même, de surpasser son frère. Ils passaient ainsi leurs temps à fredonner les litanies connues du terroir, jusqu'à la tombée de la nuit. C'est à partir de cette période que le jeune El-Djermouni apprend à donner libre cours à sa rêverie et confier sa douleur aux complaintes chaouies. Il fit preuve de dispositions si étonnantes, qu'adolescent à peine il se fait remarquer par sa voix de ténor et devint connu dans toute la région des Nememchas et des Haraktas.
En 1901 ou 1902, l'ancien berger, qui habitait à cette époque Ain-Beida, accompagne son cousin Mohamed Ben Zine Tir, un virtuose de la flûte. L'instrumentiste devint, depuis cette date, son accompagnateur de toujours pour la mélodie. Le duo formé, les deux artistes commencèrent à se produire dans des mariages, puis sur les terrasses de cafés. Les invitations vers d'autres horizons commencèrent à pleuvoir et le périple débuta par des soirées animées à Annaba, Sétif, Guelma, Biskra. De pérégrinations en voyages initiatiques, El-Djermouni quitte le pays en 1924, transite par l'Egypte, le Maroc et s'installe en Tunisie où il enregistre son premier 78 tours. Parti pour quelques mois, il y séjournera plus de dix-huit mois. En 1927, il sort de son anonymat en réussissant à s'imposer
par sa simplicité, sa
bienveillance et sa voix claire et limpide. En 1929, "Ouardaphone'' lui enregistre un 78 tours intitulé "Ahway, Ahway Khelini Nhoum''. Faisant preuve de grandes dispositions, il se fait remarquer par sa voix et entre dans les grâces de grands poètes du genre tels Hadj El Bouarrissa, Hadj Djebbar et beaucoup d'autres qui lui composèrent des chansons, particulièrement celles patriotiques et révolutionnaires dont "Ya Hadda Khouiti ma t'gouliche ikhaf'' qu'il enregistra en Tunisie en 78 tours chez les éditions Ben Baroud en 1930, et qui fait l'apologie d'un certain Ben Zelmat, un rebelle notoire qui rejetait toutes les lois du colonisateur et retranché dans les montagnes de l'Aurès pour faire le justicier. Suivirent après "El Fouchi Nou Mesmar'' puis "Akred Anouguir'' ou encore "Wach talaou fel aguba'', toutes des chansons traitant dans le même contexte et à travers lesquelles l'artiste dénonçait l'esclavage de son peuple, sous le joug colonial.
En 1930, c'est la consécration. En France, Aissa El Djermouni El-Harkati enregistre plus de 35 chansons en 78 tours chez Haroun José Edition. Il a déjà plus de 120 chansons dans son répertoire. Ce qui permettra au dandy à la moustache portée à la turque et au regard ferme et énergique de faire son entrée à l'Olympia en 1936.
Devenant, ainsi, le premier artiste arabe et africain à fouler la scène de l'une des salles les plus convoitée du monde. "Akerr Anouguir'', "Salef dhaberkane'', "Hill li ma aandouche wail'', "Ain El Kerma'', "Ma tgoulou dhelou''» et bien d'autres titres encore, séduisent le public très nombreux venu assister à la soirée. Porté aux nues par ses fans, le mythe Jarmouni est né. Après quoi, le duo entreprit l'enregistrement de plusieurs chansons aux éditions Warda-Phone, en disques de 78 et 45 tours.
De sa vie privée, on sait que Aissa El Djermouni El-Harkati a épousé en premières noces sa cousine Fatima (1900-1926) à Ain-Beida. Elle lui donna deux filles, Rebaia née en 1914 et Aicha Baya née en 1916, avant de mourir très jeune à l'age de 26 ans. Après quoi, Il épousa par la suite Louisa Ferrari, fille d'un Européen, mécanicien de profession, converti à l'Islam et baptisé Chérif. Louisa était la cadette de ses deux frères Lalouani et Messaoud. De cette deuxième union naquirent trois autres filles, Fatima, Bellara et Dalila. Il est reconnu que Aissa El Djermouni reste le chantre incontestable et incontesté de la chanson chaouie. Tout analphabète qu'il était, le maître de la chanson chaouie, trouvait, dit-on, seul les paroles qui composaient ses chansons et les airs musicaux que reprenait aussitôt à l'aide de sa " gasba "(flûte) Mohamed Ben Zine. A l'âge de 61 ans, l'artiste contracte le typhus. Hospitalisé à Alger il décède, le 16 décembre 1946, dans un hôpital à Constantine.
Il est enterré à Sidi Rghiss dans la wilaya d'Oum El Bouaghi. Dix jours avant sa mort, affirment-on, Aissa El Djermouni avait animé un mariage qui fut sa dernière apparition en public. Le jour de la mort du chantre de la chanson chaouie, Mohamed Ben Zine, celui qui fut son flûtiste, son compagnon de route et son complice a brisé sa flûte et a juré de ne plus jouer.
Un an plus tard, il partit à la Mecque pour ratifier sa promesse avant de rejoindre son ami quelques années plus tard. Aujourd'hui, en signe de reconnaissance, les pouvoirs publics algériens consacre un festival annuel à ce grand artiste.


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