L'entreprise chinoise LONGI présente à l'AAPI un projet de fabrication de panneaux solaires en Algérie    Ministère de la Culture et des Arts: journée d'étude pour évaluer la performance des établissements de formation artistique    Les putschistes maliens veulent exporter leur échec cuisant en tentant de ternir l'image de l'Algérie    FAF: "Ziani va nous rejoindre à la DTN"    Mise en service de la plate-forme technologique de prototypage rapide à l'Université d'Ouzera    Ghaza connaît la pire situation humanitaire depuis le début de l'agression sioniste    Le Général d'Armée Chanegriha reçoit le Chef d'Etat-major de la Défense du Rwanda    Algérie-Russie: signature d'un accord et d'un mémorandum d'entente entre la CACI et la Safex et leurs homologues russes    Haltérophilie: Kamel Saïdi élu membre du bureau exécutif de l'UA de la discipline    Le ministère de la Justice annonce les résultats de l'épreuve écrite du Concours national d'accès à la profession de traducteur-interprète officiel    ONSC : concours national de la meilleure vidéo de sensibilisation à la lutte contre la drogue destinée aux étudiants    Tissemsilt: décès du Moudjahid Adila Salah    Un programme sportif suspendu    Feux de récoltes : lancement d'une campagne de prévention dans plusieurs wilayas du sud du pays.    Accidents de la route : 39 morts et 1526 blessés en une semaine    Attaf reçoit le vice-ministre des Affaires étrangères d'Azerbaïdjan    Constantine : M. Meziane préside l'ouverture d'une rencontre régionale réunissant journalistes et professionnels des médias    Victoire historique de CASTEL Teniet El Abed    «Les échanges commerciaux entre l'Algérie et la Turquie connaissent une hausse significative»    L'entité sioniste occupe de nouveaux territoires palestiniens    Les conditions d'un produit intérieur brut de 400 milliards de dollars et d'une production de 200 milliards de m3 gazeux 2028/2030    Ooredoo, partenaire de la 4e édition de la caravane nationale ''Un jeune, une idée''    Une épreuve pas facile à supporter    Sur les traces de l'architecture ottomane dans l'ancienne capitale du Beylik du Titteri    Convergences transcendentalement divergentes entre l'art et la religion    Archives de l'ombre : la face cachée de l'administration coloniale à Tébessa    Championnat d'Afrique de football scolaire 2025: les Algériens fixés sur leurs adversaires    Constantine : clôture de la 14e édition du Festival culturel national de la poésie féminine    Femmes et enfants, premières victimes    Diolkos, le père du chemin de fer    L'étau se resserre !    15.000 moutons accostent au port d'Alger    Les lauréats des activités culturelles organisées dans les écoles et collèges honorés    Les bénéficiaires de la cité 280 logements de Kheraissia inquiets    «Construire un front médiatique uni pour défendre l'Algérie»    Hamlaoui présente trois projets d'aide pour les femmes du mouvement associatif    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Un père fondateur de l'Algérie nouvelle
«Frantz Fanon, portrait» de Alice Cherki
Publié dans Le Midi Libre le 18 - 12 - 2008

«Pourvu que tu aies le miel dans ton bol, son abeille viendra de Bagdad» écrivait le poète turc Nazim Hikmet, citant un vieux proverbe de son pays. Le miel sécrété par le Mouvement de libération nationale devait dégager des fragrances aussi puissantes qu'irrésistibles puisque son psychiatre vient d'encore plus loin que Bagdad. De Martinique!
«Pourvu que tu aies le miel dans ton bol, son abeille viendra de Bagdad» écrivait le poète turc Nazim Hikmet, citant un vieux proverbe de son pays. Le miel sécrété par le Mouvement de libération nationale devait dégager des fragrances aussi puissantes qu'irrésistibles puisque son psychiatre vient d'encore plus loin que Bagdad. De Martinique!
«L'Algérie a été pour lui un catalyseur, un révélateur de ses réflexions. Ça devait sommeiller quelque part en lui, et il a trouvé les moyens d'extérioriser sa pensée : il a trouvé des gens qui pensent comme lui et qui partagent les mêmes idéaux et les mêmes intentions révolutionnaires.», déclarait son fils Olivier, interviewé par un confrère lors du colloque international consacré à Frantz Fanon en septembre 2004 à Alger. C'est précisément le parcours de météore de la pensée révolutionnaire de ce compagnon d'armes et ami intime de Abane Ramdane, Larbi Ben-M'Hidi, Omar Oussedik, Patrice Lumumba et Félix Moumié, entre autres, que la psychanalyste algérienne Alice Cherki retrace dans son Portrait publié en 2000 aux Editions du Seuil. De sa naissance à Fort-de-France en 1925, à son décès en décembre 1961 dans un hôpital de Washington D-C , où le FLN l'envoie se soigner, suivi de son inhumation selon ses vœux en terre algérienne à El-Kerma dans la wilaya d'El-Tarf, Alice Cherki tente de rapporter pas à pas cette courte vie portée par la dynamique d'une pensée bouillonnante, étonnamment prophétique. Très attachée à la personne et à l'enseignement de celui qui a été son professeur à l'hôpital de Blida Joinville dès 1955, Alice Cherki, Algérienne de souche minoritaire juive, fait partie de ceux qui se sont saisi à bras le corps de l'élan émancipateur de la patrie et l'ont mené à terme. La psychanalyste qui mène une réflexion continue sur les rapports entre la psychanalyse et le politique et qui a à son actif de nombreuses publications, dont la plus récente est "La frontière invisible, violences de l'immigration » publiée en 2006 explore les différents moments de la vie de Frantz Fanon, mais surtout tente de restituer le mouvement, l'élan d'une pensée qui, dès sa prise de conscience de l'exclusion des Noirs et hommes de couleur dans les Antilles de son adolescence, n'a été arrêtée que par la mort. «La mort a interrompu une vie d'homme, qui, à 36 ans, est de nos jours à son commencement, et le développement d'une pensée marquée par sa relation avec le monde environnant, sa sensibilité à l'évènement et l'intériorisation de cette expérience. Elle s'appuie sur une interrogation toujours mue par un rapport incarné à l'oppression et à la violence subie, même celle qui ne s'avoue pas comme telle. L'expérience vécue, intériorisée et réfléchie , de l'oppression raciale, culturelle et politique — à partir de l'enveloppe corporelle jusqu'au corps politique — infiniment aliénante, la découverte de la violence de cette oppression, le constat des effets de dépersonnalisation qu'elle entraîne aussi bien sur un individu que sur tout un peuple, la quête des solutions pour sortir de cette aliénation et créer des repères, tout est au cœur de la pensée et de l'action de Fanon, dans sa vie, dans ses actes, dans ses écrits, au-delà de toutes circonstances politiques.» écrit la biographe, disciple, compagne de lutte et amie du regretté dirigeant. De «Fanon avant Blida» à «Fanon aujourd'hui» en passant par «Fanon et l'Afrique», l'auteur écrit des pages palpitantes qui non seulement replongent le lecteur dans les grands rêves du tiers-monde et de l'Afrique des années soixante mais également en soulignent l'actualité. Car malgré son apport en tant que dirigeant de la Révolution et père fondateur d'une Algérie encore à venir, Fanon, comme d'autres, a été occulté et volontairement oublié par un processus qu'il décortique admirablement dans son livre testament «Les damnés de la terre». Un ouvrage qu'il écrit tour à tour brûlant de fièvre ou grelottant de froid, rongé par la leucémie et par la conscience de l'urgence de donner aux révolutionnaires un manifeste devant guider leur réflexion. C'est ainsi qu'au lieu de l'ouvrage, concernant les luttes et destinées de l'Afrique et devant s'intituler «Alger-Le Cap» qu'il a promis à son éditeur François Maspéro, Fanon change son propos. Lu avec passion par Che Guevara, il devient l'idole des mouvements contestataires noirs américains, des mouvements de libération en Afrique. Du Japon à l'Iran, à travers le monde entier, son verbe original, son écriture vivante qui échappe au conformisme des classifications sclérosées devient une source d'inspiration incontournable.
Réclamé par les Antillais qui souhaitent le ré-inhumer dans sa terre natale, défini comme psychiatre français par les dictionnaires du pays qui l'a expulsé, Frantz Fanon, le plus Africain des Algériens et le plus internationaliste des Africains, repose comme il l'a désiré, parmi d'autres héros de la guerre de Libération, dans un coin de terre algérienne humble et oubliée. Sa voix qui décrit, analyse, décortique et dénonce s'élève pourtant, tout comme celle d'Abane Ramdane, aujourd'hui plus que jamais, immédiatement audible pour les nouvelles générations. K.T.
«L'Algérie a été pour lui un catalyseur, un révélateur de ses réflexions. Ça devait sommeiller quelque part en lui, et il a trouvé les moyens d'extérioriser sa pensée : il a trouvé des gens qui pensent comme lui et qui partagent les mêmes idéaux et les mêmes intentions révolutionnaires.», déclarait son fils Olivier, interviewé par un confrère lors du colloque international consacré à Frantz Fanon en septembre 2004 à Alger. C'est précisément le parcours de météore de la pensée révolutionnaire de ce compagnon d'armes et ami intime de Abane Ramdane, Larbi Ben-M'Hidi, Omar Oussedik, Patrice Lumumba et Félix Moumié, entre autres, que la psychanalyste algérienne Alice Cherki retrace dans son Portrait publié en 2000 aux Editions du Seuil. De sa naissance à Fort-de-France en 1925, à son décès en décembre 1961 dans un hôpital de Washington D-C , où le FLN l'envoie se soigner, suivi de son inhumation selon ses vœux en terre algérienne à El-Kerma dans la wilaya d'El-Tarf, Alice Cherki tente de rapporter pas à pas cette courte vie portée par la dynamique d'une pensée bouillonnante, étonnamment prophétique. Très attachée à la personne et à l'enseignement de celui qui a été son professeur à l'hôpital de Blida Joinville dès 1955, Alice Cherki, Algérienne de souche minoritaire juive, fait partie de ceux qui se sont saisi à bras le corps de l'élan émancipateur de la patrie et l'ont mené à terme. La psychanalyste qui mène une réflexion continue sur les rapports entre la psychanalyse et le politique et qui a à son actif de nombreuses publications, dont la plus récente est "La frontière invisible, violences de l'immigration » publiée en 2006 explore les différents moments de la vie de Frantz Fanon, mais surtout tente de restituer le mouvement, l'élan d'une pensée qui, dès sa prise de conscience de l'exclusion des Noirs et hommes de couleur dans les Antilles de son adolescence, n'a été arrêtée que par la mort. «La mort a interrompu une vie d'homme, qui, à 36 ans, est de nos jours à son commencement, et le développement d'une pensée marquée par sa relation avec le monde environnant, sa sensibilité à l'évènement et l'intériorisation de cette expérience. Elle s'appuie sur une interrogation toujours mue par un rapport incarné à l'oppression et à la violence subie, même celle qui ne s'avoue pas comme telle. L'expérience vécue, intériorisée et réfléchie , de l'oppression raciale, culturelle et politique — à partir de l'enveloppe corporelle jusqu'au corps politique — infiniment aliénante, la découverte de la violence de cette oppression, le constat des effets de dépersonnalisation qu'elle entraîne aussi bien sur un individu que sur tout un peuple, la quête des solutions pour sortir de cette aliénation et créer des repères, tout est au cœur de la pensée et de l'action de Fanon, dans sa vie, dans ses actes, dans ses écrits, au-delà de toutes circonstances politiques.» écrit la biographe, disciple, compagne de lutte et amie du regretté dirigeant. De «Fanon avant Blida» à «Fanon aujourd'hui» en passant par «Fanon et l'Afrique», l'auteur écrit des pages palpitantes qui non seulement replongent le lecteur dans les grands rêves du tiers-monde et de l'Afrique des années soixante mais également en soulignent l'actualité. Car malgré son apport en tant que dirigeant de la Révolution et père fondateur d'une Algérie encore à venir, Fanon, comme d'autres, a été occulté et volontairement oublié par un processus qu'il décortique admirablement dans son livre testament «Les damnés de la terre». Un ouvrage qu'il écrit tour à tour brûlant de fièvre ou grelottant de froid, rongé par la leucémie et par la conscience de l'urgence de donner aux révolutionnaires un manifeste devant guider leur réflexion. C'est ainsi qu'au lieu de l'ouvrage, concernant les luttes et destinées de l'Afrique et devant s'intituler «Alger-Le Cap» qu'il a promis à son éditeur François Maspéro, Fanon change son propos. Lu avec passion par Che Guevara, il devient l'idole des mouvements contestataires noirs américains, des mouvements de libération en Afrique. Du Japon à l'Iran, à travers le monde entier, son verbe original, son écriture vivante qui échappe au conformisme des classifications sclérosées devient une source d'inspiration incontournable.
Réclamé par les Antillais qui souhaitent le ré-inhumer dans sa terre natale, défini comme psychiatre français par les dictionnaires du pays qui l'a expulsé, Frantz Fanon, le plus Africain des Algériens et le plus internationaliste des Africains, repose comme il l'a désiré, parmi d'autres héros de la guerre de Libération, dans un coin de terre algérienne humble et oubliée. Sa voix qui décrit, analyse, décortique et dénonce s'élève pourtant, tout comme celle d'Abane Ramdane, aujourd'hui plus que jamais, immédiatement audible pour les nouvelles générations. K.T.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.