Si l'évocation d'El-Qods, capitale de la culture arabe 2009, a été occultée, la Palestine, ses poètes femmes et hommes, ont bien été, dimanche dernier, au cœur des interrogations du rendez-vous littéraire organisé par le TNA. Si l'évocation d'El-Qods, capitale de la culture arabe 2009, a été occultée, la Palestine, ses poètes femmes et hommes, ont bien été, dimanche dernier, au cœur des interrogations du rendez-vous littéraire organisé par le TNA. C'est souriantes et détendues que Hadjer Kouidri et Nassima Bouloufa, appartenant toutes deux à la nouvelle génération des plumes arabophones, ont fait face au déferlement de questions pointues posées par une assistance composée majoritairement de journalistes. Modérés par M. Abderezzak Boukebba, journaliste, poète et écrivain, les échanges en langue arabe châtiée, ont abordé des thèmes liés à l'actualité socio-politique complexe des pays arabo-musulmans. Après avoir reçu un appel téléphonique de l'écrivaine libanaise Fadéla el-Farouk, le modérateur l'a résumé en ces termes. «Selon Fadéla El-Farouk, et cela n'engage qu'elle, les écrits de femmes sont inaudibles en raison de l'oppression que les femmes subissent dans le monde arabe.» C'est sur l'impact de ce handicap qui serait propre à ces sociétés que le débat a démarré. Les deux auteures n'ont pas manqué de confirmer cette triste réalité. Hadjer Kouidri a souligné qu'en matière de littérature arabe, l'on entend surtout parler des hommes alors que l'une des plus brillantes plumes est la Palestinienne Saher Khalifa, fondatrice du genre romanesque féminin. Elle a également souligné l'incursion du discours politique dans les œuvres littéraires alors que les deux discours devraient être autonomes. Nassima Bouloufa a rappelé le scandale que la publication en 1993 de la correspondance sentimentale que l'écrivain palestinien Ghassan Kanafani (1936/1972) adressait à l'auteure syro-libanaise Ghada Semman(1942) n'a pas manqué de déclencher. Scandale dirigé contre celle qui a alors osé un acte considéré comme un grave manquement à la bonne éducation et dirigé contre la cause palestinienne. La relation entre les deux artistes n'était pourtant un secret pour personne. Aux questions de l'auditoire sur les thèmes sentimentaux, domaine de prédilection de l'écriture féminine, Nassima Bouloufa a simplement rétorqué : «Dans ce monde où règnent la guerre et la violence, si les femmes n'écrivent pas sur les sentiments délicats, qui va donc le faire ?» Dépasser la langue de bois Les deux romancières se sont ensuite exprimées sur la notion d'altérité et le peu de curiosité dont font preuve les Algériens quant à réellement connaître «l'autre, le pays proche». «Lors des raids contre Ghaza, les jeunes se drapaient du Keffieh mais personne ne s'est jamais empressé de découvrir la littérature palestinienne», a notamment, relevé Hadjer Kouidri. «Notre attachement à la cause palestinienne revêt une forme officielle. Nous nous gargarisons de slogans et de mots creux», a ajouté Mlle Kouidri. Concernant le manque de liberté des créateurs, l'écrivaine a souligné qu'il est partagé par tous et que «dans chaque cerveau d'écrivain arabe, sommeille un policier qui censure son expression». Revenant à la question de l'altérité, Hadjer Kouidri a souligné le devoir de découvrir l'autre, même s'il cet autre est l'ennemi. «Je me sens proche humainement de l'écrivain israélien. Avant de rejeter mécaniquement les écrivains d'Israël, ne devons nous pas les étudier et les découvrir ? En nous fermant à ces découvertes nous nous fermons à la dimension universelle de la littérature». A la question de savoir quel genre de roman elle aurait écrit si elle était Palestinienne, la jeune poétesse n'a pas hésité à répondre qu'elle serait probablement une fidayîa, vu son admiration pour les jeunes résistantes palestiniennes. La littérature, arme de résistance A cette réponse qui semble avoir provoqué un choc, il a été rétorqué que Kateb Yacine et Moufdi Zacharia ont créé des œuvres majeures en pleine guerre de Libération nationale. L'art faisant partie des armes les plus puissantes de la guerre révolutionnaire. La complexité de l'époque actuelle qui marginalise le verbe poétique plus qu'elle ne le valorise a alors été évoquée. «A l'époque d'internet, le temps lui-même est objet de consommation et les écrits n'ont plus ni la même valeur esthétique ni la même signifiance qu'autrefois», a tenu à souligner Hadjer Kouidri. L'usage de la langue de bois, y compris par les écrivains, concernant la solidarité avec la Palestine a été dénoncé. «Est-ce que l'écrivain ne devrait pas avoir une autre vision que celle étroite, quasi-automatique, machinale qui est celle de la plupart de nos concitoyens aujourd'hui ? Même sur le plan littéraire nous sommes en retard», diront les deux invitées. Le mérite des écrivains Ouassini Laâredj et Yasmina Khadra, qui abordent le thème des souffrances du peuple palestinien dans leurs œuvres récentes, a été salué. La sous-estimation de la littérature en général et celle des femmes en particulier a été mise en exergue par les conférencières. L'exemple de Ahlem Mosteghanemi a été cité pour dire que sans aide extérieure, l'auteure serait encore probablement inconnue dans son pays. Pourquoi faut-il toujours passer par la reconnaissance de l'étranger pour être enfin reconnue chez soi ? C'est sur ce constat pessimiste que s'est clôturé ce débat chaleureux et sans restriction. L'hommage à El-Qods et à la Palestine sera, encore une fois, à l'ordre du jour lors de la 4e édition du festival national de théâtre professionnel qui aura lieu à la fin mai et de la première édition du festival international de théâtre professionnel prévu prochainement. K. T. C'est souriantes et détendues que Hadjer Kouidri et Nassima Bouloufa, appartenant toutes deux à la nouvelle génération des plumes arabophones, ont fait face au déferlement de questions pointues posées par une assistance composée majoritairement de journalistes. Modérés par M. Abderezzak Boukebba, journaliste, poète et écrivain, les échanges en langue arabe châtiée, ont abordé des thèmes liés à l'actualité socio-politique complexe des pays arabo-musulmans. Après avoir reçu un appel téléphonique de l'écrivaine libanaise Fadéla el-Farouk, le modérateur l'a résumé en ces termes. «Selon Fadéla El-Farouk, et cela n'engage qu'elle, les écrits de femmes sont inaudibles en raison de l'oppression que les femmes subissent dans le monde arabe.» C'est sur l'impact de ce handicap qui serait propre à ces sociétés que le débat a démarré. Les deux auteures n'ont pas manqué de confirmer cette triste réalité. Hadjer Kouidri a souligné qu'en matière de littérature arabe, l'on entend surtout parler des hommes alors que l'une des plus brillantes plumes est la Palestinienne Saher Khalifa, fondatrice du genre romanesque féminin. Elle a également souligné l'incursion du discours politique dans les œuvres littéraires alors que les deux discours devraient être autonomes. Nassima Bouloufa a rappelé le scandale que la publication en 1993 de la correspondance sentimentale que l'écrivain palestinien Ghassan Kanafani (1936/1972) adressait à l'auteure syro-libanaise Ghada Semman(1942) n'a pas manqué de déclencher. Scandale dirigé contre celle qui a alors osé un acte considéré comme un grave manquement à la bonne éducation et dirigé contre la cause palestinienne. La relation entre les deux artistes n'était pourtant un secret pour personne. Aux questions de l'auditoire sur les thèmes sentimentaux, domaine de prédilection de l'écriture féminine, Nassima Bouloufa a simplement rétorqué : «Dans ce monde où règnent la guerre et la violence, si les femmes n'écrivent pas sur les sentiments délicats, qui va donc le faire ?» Dépasser la langue de bois Les deux romancières se sont ensuite exprimées sur la notion d'altérité et le peu de curiosité dont font preuve les Algériens quant à réellement connaître «l'autre, le pays proche». «Lors des raids contre Ghaza, les jeunes se drapaient du Keffieh mais personne ne s'est jamais empressé de découvrir la littérature palestinienne», a notamment, relevé Hadjer Kouidri. «Notre attachement à la cause palestinienne revêt une forme officielle. Nous nous gargarisons de slogans et de mots creux», a ajouté Mlle Kouidri. Concernant le manque de liberté des créateurs, l'écrivaine a souligné qu'il est partagé par tous et que «dans chaque cerveau d'écrivain arabe, sommeille un policier qui censure son expression». Revenant à la question de l'altérité, Hadjer Kouidri a souligné le devoir de découvrir l'autre, même s'il cet autre est l'ennemi. «Je me sens proche humainement de l'écrivain israélien. Avant de rejeter mécaniquement les écrivains d'Israël, ne devons nous pas les étudier et les découvrir ? En nous fermant à ces découvertes nous nous fermons à la dimension universelle de la littérature». A la question de savoir quel genre de roman elle aurait écrit si elle était Palestinienne, la jeune poétesse n'a pas hésité à répondre qu'elle serait probablement une fidayîa, vu son admiration pour les jeunes résistantes palestiniennes. La littérature, arme de résistance A cette réponse qui semble avoir provoqué un choc, il a été rétorqué que Kateb Yacine et Moufdi Zacharia ont créé des œuvres majeures en pleine guerre de Libération nationale. L'art faisant partie des armes les plus puissantes de la guerre révolutionnaire. La complexité de l'époque actuelle qui marginalise le verbe poétique plus qu'elle ne le valorise a alors été évoquée. «A l'époque d'internet, le temps lui-même est objet de consommation et les écrits n'ont plus ni la même valeur esthétique ni la même signifiance qu'autrefois», a tenu à souligner Hadjer Kouidri. L'usage de la langue de bois, y compris par les écrivains, concernant la solidarité avec la Palestine a été dénoncé. «Est-ce que l'écrivain ne devrait pas avoir une autre vision que celle étroite, quasi-automatique, machinale qui est celle de la plupart de nos concitoyens aujourd'hui ? Même sur le plan littéraire nous sommes en retard», diront les deux invitées. Le mérite des écrivains Ouassini Laâredj et Yasmina Khadra, qui abordent le thème des souffrances du peuple palestinien dans leurs œuvres récentes, a été salué. La sous-estimation de la littérature en général et celle des femmes en particulier a été mise en exergue par les conférencières. L'exemple de Ahlem Mosteghanemi a été cité pour dire que sans aide extérieure, l'auteure serait encore probablement inconnue dans son pays. Pourquoi faut-il toujours passer par la reconnaissance de l'étranger pour être enfin reconnue chez soi ? C'est sur ce constat pessimiste que s'est clôturé ce débat chaleureux et sans restriction. L'hommage à El-Qods et à la Palestine sera, encore une fois, à l'ordre du jour lors de la 4e édition du festival national de théâtre professionnel qui aura lieu à la fin mai et de la première édition du festival international de théâtre professionnel prévu prochainement. K. T.