«Le Grand Bazar» du Mozambicain Licinio Azevedo et Ali Zaoua du Marocain Nabil Ayouch , sortis respectivement en 2006 et 2001, ont comme sujet la plus profonde des détresses, celle des enfants de la rue. Qu'ils naviguent au cœur d'un grand marché pouilleux de Maputo ou sur un quai de Casa, Paito, Xano, Boubker, Kwita , Ali et Omar doivent affronter avec leur faiblesse d'enfants la pire des adversités. Pour se consoler ils ont l'ivresse au diluant et la force du rêve. «Le Grand Bazar» du Mozambicain Licinio Azevedo et Ali Zaoua du Marocain Nabil Ayouch , sortis respectivement en 2006 et 2001, ont comme sujet la plus profonde des détresses, celle des enfants de la rue. Qu'ils naviguent au cœur d'un grand marché pouilleux de Maputo ou sur un quai de Casa, Paito, Xano, Boubker, Kwita , Ali et Omar doivent affronter avec leur faiblesse d'enfants la pire des adversités. Pour se consoler ils ont l'ivresse au diluant et la force du rêve. Programmé, samedi à la dernière minute à la salle Zinet , Le Grand Bazar a tout de même eu les faveurs d'un petit public. Les spectateurs ont été captivés jusqu'au bout par la fugue de Paito, un petit garçon pauvre de Maputo. Habitué à vendre les beignets faits par sa mère devant le domicile familial, Paito développe déjà un sens commercial aigu. Lorsqu'il se fait voler l'argent qu'on lui a confié pour acheter de la farine, il décide de ne pas rentrer à la maison avant de l'avoir gagné. Il tente sa chance dans un grand marché misérable aux confins de la ville. Alors qu'il vend des gousses d'ail à l'unité et qu'il commence à se faire un joli bénéfice, il fait connaissance de Xano, un vrai petit dur qui erre dans les rues depuis qu'il a été chassé de la maison par ses tantes, prostituées. Le petit voleur et le petit marchand se lient d'amitié. Pourchassés par des bandes de racketteurs, qui les kidnappent et les torturent régulièrement, ils sont protégés par des adultes SDF. A travers le regard des enfants, on découvre un Mozambique en loques, plongé dans la misère matérielle et morale des lendemains de guerre. Véhiculant lourdement une leçon de morale, le film a un rythme très léger. Aussi aérien que la course folle des enfants poursuivis par la férocité des grands à travers les venelles et les étals poisseux. Coloré et plein d'humour, ne tombant jamais dans le pathos, le film demeure revigorant malgré le discours conventionnel qu'il charrie. Moins pudique Ali Zaoua de Nabil Ayouch, projeté le même jour à la salle Ibn-Zeydoun, décrit la situation des petits de la rue tout à fait crûment. Fils d'une prostituée, Ali Zaoua rejoint une bande d'enfants sans toit car il poursuit le rêve de devenir marin et d'aller à la recherche d'une île aux deux soleils. La question qui l'obsède est de savoir si les deux soleils se couchent en même temps. Rapidement cette problématique devient celle de la bande entière. Sous la protection d'un vieux pêcheur du port de Casa, il travaille comme mousse. Au cours d'une bataille rangée, il décède atteint d'un coup de pierre à la tête. Omar, Kwita et Boubker, ses proches amis décident alors de rompre définitivement avec la bande dont Ed-dib , un adolescent sourd-muet est le chef, abusif et cruel. Ils n'ont plus qu'un seul objectif, réunir suffisamment d'argent pour enterrer Ali «b'hel chi émir : comme un prince.» Chapardeurs et trafiquants, les petits garçons vivent dans un monde à eux, ignoré de tous. Nourris de poissons crus et ivres d'inhalations, ils refont la vie à leur manière. Subissant avec patience les agressions sexuelles des plus grands, ils ne se font aucune illusion.«La vie c'est de la merde !» clament-ils. La mort d'Ali et son enterrement deviennent pour eux l'occasion de se projeter dans un au-delà merveilleux où la famille n'est plus un cauchemar. Malgré un petit côté larmoyant, la beauté des dialogues en langage populaire de Casa et le regard lucide du réalisateur sur les détresses infantiles et féminines donnent à ce film une valeur incontestable de témoignage. K.T. Programmé, samedi à la dernière minute à la salle Zinet , Le Grand Bazar a tout de même eu les faveurs d'un petit public. Les spectateurs ont été captivés jusqu'au bout par la fugue de Paito, un petit garçon pauvre de Maputo. Habitué à vendre les beignets faits par sa mère devant le domicile familial, Paito développe déjà un sens commercial aigu. Lorsqu'il se fait voler l'argent qu'on lui a confié pour acheter de la farine, il décide de ne pas rentrer à la maison avant de l'avoir gagné. Il tente sa chance dans un grand marché misérable aux confins de la ville. Alors qu'il vend des gousses d'ail à l'unité et qu'il commence à se faire un joli bénéfice, il fait connaissance de Xano, un vrai petit dur qui erre dans les rues depuis qu'il a été chassé de la maison par ses tantes, prostituées. Le petit voleur et le petit marchand se lient d'amitié. Pourchassés par des bandes de racketteurs, qui les kidnappent et les torturent régulièrement, ils sont protégés par des adultes SDF. A travers le regard des enfants, on découvre un Mozambique en loques, plongé dans la misère matérielle et morale des lendemains de guerre. Véhiculant lourdement une leçon de morale, le film a un rythme très léger. Aussi aérien que la course folle des enfants poursuivis par la férocité des grands à travers les venelles et les étals poisseux. Coloré et plein d'humour, ne tombant jamais dans le pathos, le film demeure revigorant malgré le discours conventionnel qu'il charrie. Moins pudique Ali Zaoua de Nabil Ayouch, projeté le même jour à la salle Ibn-Zeydoun, décrit la situation des petits de la rue tout à fait crûment. Fils d'une prostituée, Ali Zaoua rejoint une bande d'enfants sans toit car il poursuit le rêve de devenir marin et d'aller à la recherche d'une île aux deux soleils. La question qui l'obsède est de savoir si les deux soleils se couchent en même temps. Rapidement cette problématique devient celle de la bande entière. Sous la protection d'un vieux pêcheur du port de Casa, il travaille comme mousse. Au cours d'une bataille rangée, il décède atteint d'un coup de pierre à la tête. Omar, Kwita et Boubker, ses proches amis décident alors de rompre définitivement avec la bande dont Ed-dib , un adolescent sourd-muet est le chef, abusif et cruel. Ils n'ont plus qu'un seul objectif, réunir suffisamment d'argent pour enterrer Ali «b'hel chi émir : comme un prince.» Chapardeurs et trafiquants, les petits garçons vivent dans un monde à eux, ignoré de tous. Nourris de poissons crus et ivres d'inhalations, ils refont la vie à leur manière. Subissant avec patience les agressions sexuelles des plus grands, ils ne se font aucune illusion.«La vie c'est de la merde !» clament-ils. La mort d'Ali et son enterrement deviennent pour eux l'occasion de se projeter dans un au-delà merveilleux où la famille n'est plus un cauchemar. Malgré un petit côté larmoyant, la beauté des dialogues en langage populaire de Casa et le regard lucide du réalisateur sur les détresses infantiles et féminines donnent à ce film une valeur incontestable de témoignage. K.T.