Le Soir d'Algérie, 18 juillet 2010 Le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Djamel Ould-Abbès, a ordonné l'ouverture d'une enquête exhaustive et immédiate au sujet de tous les contrats passés par tous les établissements hospitaliers. C'est ce que nous révèle une source sûre au niveau du ministère. Kamel Amarni – Alger (Le Soir) -«Mercredi dernier, l'ensemble des directeurs des 270 hôpitaux que compte le pays ont été saisis dans ce sens. Ils sont sommés de remettre leurs rapports détaillés au plus tard demain lundi», précise notre source. Cette décision a été prise, selon notre source, «à la suite de nombreuses informations, non confirmées toutefois, parvenues au ministère et faisant état d'éventuelles transactions douteuses, s'agissant de certains marchés contractés au nom de certains hôpitaux». L'enquête ordonnée par le ministre concerne aussi bien «l'acquisition de matériels de produits divers que des services». Particulièrement, les contrats avec des fournisseurs étrangers. Et comme a tenu à le préciser notre source, ce type de contrats se chiffre parfois en dizaines de millions de dollars. Ce sont d'énormes enveloppes financières qui sont engagées dans ce genre de transactions, notamment pour l'acquisition de matériels et équipements médicaux qui coûtent effectivement très cher. «Dès lundi, avec la réception des rapports, il sera procédé au cas par cas. Chaque rapport sera passé au peigne fin. L'on saura alors qui a contracté avec qui, qui a acheté quoi et pour combien, l'achat est-il réellement opportun ? etc. C'est en fonction de tout cela que seront prises les décision appropriées.» Et, par «décisions appropriées», l'on entend, bien sûr, «les autorisations de conclusion des marchés pour ceux répondant aux normes ou, en revanche, la prononciation de certaines sanctions et, naturellement, la justice sera saisie si des cas de malversations sont découverts. Mais dans tous les cas de figure, tous les marchés seront gelés jusqu'à nouvel ordre». Il va sans dire que les derniers scandales de corruption qui ont éclaboussé bien des secteurs ont grandement inspiré Djamel Ould- Abbès. Manifestement, le ministre de la Santé anticipe avec des mesures préventives lui qui hérite, depuis fin mai 2010, d'un secteur traditionnellement réputé pour être fortement gangrené par «les affaires», c'est-à-dire la corruption et des trafics en tout genre. Programme d'urgence contre les pénuries Autre sujet brûlant dans le secteur et qui pénalise des millions de citoyens, la pénurie chronique de médicaments. Depuis des années, ce phénomène persiste tant, que les Algériens finissent par céder à une sorte de fatalité. Produit hautement stratégique et commercialement géniteur de gros profits, le médicament a fini par se faire de véritables parrains, qui font et défont le marché allant même jusqu'à organiser et planifier des pénuries pour influer sur les prix du produit. Entre le souci du gain rapide et facile et la santé de millions d'Algériens, ces barons du médicament ont vite fait leur choix, bien sûr. D'où, certainement, l'importance de la dernière décision de Bouteflika de mettre fin au phénomène, au dernier Conseil des ministres. Jeudi dernier d'ailleurs, et lors d'une descente surprise au siège de la Pharmacie centrale des hôpitaux, sa deuxième du genre en moins d'un mois, le ministre de la Santé a tenu à inspecter les stocks. «Et figurez-vous, cette simple inspection paraissant tout à fait ordinaire et anodine prend parfois des allures de véritable prouesse ! Pour des raisons qui nous échappent encore, les responsables de la Pharmacie centrale font tout, et réussissent d'ailleurs, à l'éviter. Ils redoublent à chaque fois de ruses pour détourner le regard du ministre des hangars réservés au stockage des médicaments. Ils l'ont déjà fait avec Barkat et même, tout récemment, encore avec Ould-Abbès lors de sa première visite surprise», nous confie notre source. Mais pas cette fois-ci. Jeudi donc, et avant de se rendre à Tlemcen pour une visite officielle, le ministre de la Santé «débarque» à la surprise générale dans la forteresse de la PCH et, cette fois, se il se dirigera directement vers l'essentiel : «les bijoux de famille» ! Et après un premier constat visuel, il ordonne l'établissement d'une liste précise des médicaments dont la pénurie est réelle. «Une quarantaine de médicaments ont été recensés. Mais on attend la liste détaillée pour ce début de semaine. La PCH doit donc fournir la liste des produits, déterminer les quantités ainsi que les montants nécessaires pour mettre définitivement fin aux pénuries», indique notre source qui nous révèle aussi que «tous les besoins en médicaments seront couverts en entier, d'ici la fin juillet au plus tard. D'ailleurs, les premières commandes seront passées au courant de cette semaine». Avec cette précision de taille : «Seule la Pharmacie centrale est autorisée à importer ces médicaments et les fonds nécessaires seront débloqués dans les plus brefs délais par le ministère. » Reprise du dialogue avec les syndicats Par ailleurs, on apprend au niveau du ministère de la Santé que le deuxième round de dialogue, entamé la semaine dernière avec les neuf syndicats du secteur, est prévu pour la fin de la semaine en cours. «La première rencontre était collective et s'est tenue avec l'ensemble des représentants des syndicats concernés. Il s'agissait plus d'une prise de contact et surtout d'écouter les doléances des uns et des autres.» Des doléances jugées «globalement légitimes» par notre source. Quant au second round, «il va voir les syndicats défiler séparément au ministère pour des rencontres et des séances de travail bilatérales entre le ministre, ses collaborateurs et les représentants de chacun de ces syndicats. Toutes les questions seront abordées, sans tabous», rassure notre source. Rappelons, à ce propos, que le secteur avait connu il y a quelques mois, d'incessantes et très longues grèves ayant sérieusement paralysé les établissements hospitaliers relevant notamment du secteur public.