Algérie – Les « fuites » sur le déclin de Hassi R'mel embarrassent les autorités Maghreb Emergent, Salam Hairouz Samedi, 02 Octobre 2010 Les responsables algériens du secteur de l'énergie ont eu pour la première fois, lors de la présentation du 3ème appel d'offres de Alnaft, à s'expliquer sur le « cas Hassi R'mel », le gisement géant de gaz naturel étant annoncé dans la presse en déplétion rapide. Le ministre Youssef Yousfi s'est montré évasif sur le sujet alors que le PDG de Sonatrach a tenté d'amortir l'impact du « risque volume ». Hassi R'mel est devenu en quelques jours la plus grande bombe à retardement laissée par Chakib Khelil. L'expression du visage du ministre algérien de l'énergie et des mines, Youssef Yousfi, a subitement changé lorsqu'un journaliste l'a interpellé, jeudi 30 septembre dernier à l'hôtel Sheraton, au sujet des difficultés du gisement gazier de Hassi R'mel, rapportés par la presse les jours précédents. « Il n'y a aucun problème dans l'exploitation de gaz à Hassi Rmel » a-t-il sommairement déclaré visiblement contrarié par la question. Le ministre a même refusé sèchement de reparler de ce sujet, lorsqu'il a été relancé par des journalistes restés sur leur faim. Ce sont deux articles, l'un publié début août dans le supplément économique de Liberté et l'autre la semaine dernière dans le supplément économique d'El Watan qui ont introduit dans la discussion publique, indirectement puis nominalement, le thème, plus ou moins tabou, d'un déclin rapide de la production de Hassi R'mel. Le gisement géant exploité par Sonatrach aurait connu de graves envahissements d'eaux les années précédentes qui rendraient « très difficiles » voire parfois « impossible » la récupération d'importantes quantités de gaz naturel, comptabilisées comme récupérables dans le plan de développement du gisement. En marge de la cérémonie de la présentation du troisième appel à la concurrence d'Alnaft (gence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures), une source proche de Sonatrach qui a requis l'anonymat a confirmé, à l'inverse du ministre de l'énergie et des mines, ce qui se dit depuis plusieurs mois au sujet de la déplétion précoce du principal gisement de gaz algérien : « On va bientôt entendre parler de ce qu'on appellera le scandale Hassi Rmel assure notre sources auprès de Sonatrach ». « Pour remplir les engagements de l'Algérie envers ces partenaire, l'équipe de Chakib Khelil a voulu jouer aux apprentis sorciers en surexploitant l'un des plus importants gisements gazier en Algérie. Les conséquences ont été dramatique sur les réserves qui se trouve maintenant difficiles d'accès voir impossible ». Nourredine Cherouati rassure La réaction du staff de Sonatrach est plus réaliste que celle du ministre de l'énergie et des mines. Personne ne nie vraiment qu'il existe des problèmes dans l'exploitation du gisement de Hassi Rmel mais on préfère rassurer. « Il y a toujours eu des problème dans ce gisement » a lancé à la presse, Noureddine Cherouati, PDG de Sonatrach jeudi dernier à l'hôtel Sheraton à l'occasion de la même cérémonie. Selon ses explications, il ne s'agit en fait que d'un problème technique qui concerne la manière d'exploiter les ressources du gisement de Hassi Rmel. « On va remplir le gazoduc italien, celui qui passe par le Maroc, le GNL, le Medgaz aussi et il y aura assez de gaz pour les algériens également » a assuré Noureddine Cherouati. Il dira même que « Dieu seul sait ce qu'il y a dans les réservoirs ». Pour appuyer ses dires Cherouati rappelle qu'il s'agit de gaz qui se trouve à 2800 mètres en sous-sol. « Personne n'est descendu pour voir savoir ce qui s'y passe » a-t-il déclaré. Pour le premier responsable de l'entreprise pétrolière nationale, Hassi Rmel n'est pas le seul gisement aux grandes capacités en Algérie. Il citera Al Ghar, Gassi Touil et Aïn Salah. « Tout les périmètres Sud-Ouest et sud-est sont nouveaux » a-t-il estimé. Pour convaincre davantage, Cherouati annoncera que sur la région sud-est il y aura un troisième gazoduc car il y a du nouveau gaz à transporter. La même chose pour la région sud-ouest. D'ici trois quatre ans, Sonatrach va doubler l'effort d'exploration » assure Noureddine Cherouati. Le plus grand scandale de l'ère Khelil ? L'arrivée sur la scène médiatique de cette « affaire Hassi R'mel » se déroule à un moment charnière ou le bilan des années Chakib Khelil (1999-2010) est inévitablement convoqué dans les débats. La surexploitation du gisement de Hassi R'mel, en dehors du plan d'exploitation initial, pourrait devenir rapidement, le plus grand scandale de son ère, au delà de tous les autres. L'Algérie risque de perdre sa place de partenaire énergétique fiable et stratégique de l'Europe s'il s'avère qu'elle ne peut plus remplir ses engagements en matière de volume de gaz. D'après des experts pétroliers, l'Algérie doit rapidement éclaircir la situation autour de ses réserves. Principalement à Hassi Rmel. Pour le moment les pouvoir publics algériens réagissent par la seule manière possible pour contrer d'éventuels problèmes de non disponibilité des volumes engagés : l'investissement dans l'exploration pour trouver de nouveaux gisements. « L'Algérie en a vraiment besoin » affirme l'expert pétrolier Mourad Preure. « L'investissement dans les domaines gazier et pétrolier a sensiblement diminué ces dernières années et ce a cause de l'instabilité des prix des hydrocarbures sur les marchés internationaux ». C'est aussi l'explication donnée par Sonatrach pour justifier la baisse – moins de 55 milliards de m3 au lieu de 65 milliards - des exportations de gaz algérien ces deux dernières années. Les « marchés spot ne sont pas rémunérateurs ». Quarante cinq sociétés étrangères se sont montrées intéressées par la recherche et l'exploration d'hydrocarbures en Algérie. Les autorités du secteur parlent de succès pour ce 3ème appel à la concurrence (dix blocs répartis sur cinq bassins) national et international lancé en septembre dernier.