Ces désignations interviennent en application de la nouvelle loi sur les hydrocarbures. MM. Bitata et Cherouati seront à la tête d'agences qui vont collecter l'argent du pétrole, contrôler les compagnies étrangères dont la part sur le pétrole et le gaz algériens est appelée à s'accroître substantiellement. Le ministre de l'Energie vient de nommer après sélection Sid-Ali Bitata, patron de l'Agence nationale chargée de la valorisation des hydrocarbures Alnaft, Djillali Takherist, directeur du domaine minier au sein d'Alnaft, Noureddine Cherouati premier responsable de l'Autorité de régulation, a-t-on appris de source sûre. Ces deux entités prévues par la nouvelle loi sur les hydrocarbures entrée en vigueur en juillet dernier vont gérer la rente pétrolière. Sonatrach va s'effacer au profit de ces deux agences. M. Bitata était directeur de l'exploitation et de la conservation des gisements au ministère de l'Energie, Noureddine Cherouati à la tête de la société algéro-italienne chargée de l'exploitation du gazoduc Transmed basée à Milan après avoir occupé les fonctions de secrétaire général du ministère de l'Energie et de directeur général de Naftal, tandis que M. Takherist était responsable de l'exploration à Sonatrach. Pour comprendre l'importance de ces nominations, il convient de situer les fonctions de ces deux agences. Alnaft jouit d'une série de prérogatives. C'est elle qui dès le début de l'an prochain va collecter l'argent du pétrole, à savoir la fiscalité pétrolière auprès de Sonatrach et des compagnies étrangères présentes dans le domaine minier national, en particulier la redevance qui s'assimile en partie à la rente pétrolière. Actuellement, c'est Sonatrach qui la collecte et la verse au Trésor public. Alnaft se charge également de lancer les appels d'offres pour l'attribution de blocs d'exploration ou de gisements non exploités ou en exploitation et nécessitant un nouveau développement. Sonatrach participera à la sélection comme les autres soumissionnaires. Actuellement, c'est cette dernière qui lance les appels d'offres et attribue les contrats aux partenaires. Alnaft a également pour mission, d'élaborer et de mettre à jour les banques de données sur les ressources hydrocarbures du pays, de promouvoir les investissements dans le secteur. Elle signe et gère les contrats de recherche et/ou d'exploitation avec Sonatrach ainsi qu'avec les partenaires étrangers. Elle approuve les plans de développement des gisements et facilite l'accès à l'information sur le marché du gaz. L'Agence de régulation, elle, veille à l'application de la réglementation en matière de tarification, de transport et de stockage, le libre accès aux réseaux de transport et de stockage. Elle contrôle l'application des normes et standards. C'est elle qui va fixer les prix des carburants suivant une méthodologie déterminée par décret et sur feu vert du Chef du gouvernement. Cette prérogative relève aujourd'hui uniquement du Premier ministre. En résumé, Alnaft est le gérant par délégation de la rente pétrolière. L'Agence de régulation est le gendarme en matière d'application de la réglementation, avec des pouvoirs étendus en matière de détermination des prix des carburants et du gaz. En fin de compte, c'est elle qui à partir de l'an prochain va décider de l'augmentation des prix des carburants. N'oublions pas cependant de signaler que Sonatrach ne tirera pas sa révérence définitivement. Elle a d'importants atouts à faire valoir : elle détient des titres sur environ 40% du domaine minier. Elle continuera à disposer des plus importants gisements tels que Hassi-Messaoud et Hassi-R'mel. Mais elle devra verser la redevance et les différents impôts pétroliers à Alnaft qui les reverse au Trésor. Sonatrach soumettra ses plans de développement des gisements à cette dernière. Qui va ainsi jouir de puissantes prérogatives et devenir l'interlocuteur principal des compagnies pétrolières étrangères dont les intérêts en Algérie vont s'accroître à travers une plus large ouverture du secteur des hydrocarbures. En mot, leur part dans le pétrole et le gaz algérien, va augmenter en contrepartie d'investissements et de paiements d'impôts. Comment le chef de l'Etat continuera à contrôler le secteur ? Ces nominations chamboulent-elles le rapport de force au sein du secteur ? Pas fondamentalement. Le ministre de l'Energie, M. Chakib Khelil, en nommant de jeunes cadres fidèles, en fait des exécutants continuera à contrôler d'une main de fer le secteur, au profit du président de la République. Ce qui inquiète, c'est que la nouvelle loi sur les hydrocarbures ne prévoit pas de garde-fous en cas de détournement de cette réforme au profit des intérêts du clan au pouvoir, ou du nouveau régime institué à la suite d'un changement politique. À noter que l'installation de ces responsables par probablement le Chef de gouvernement aura lieu en novembre prochain. Les agences pourront disposer de leurs nouveaux sièges à Hydra très prochainement, à savoir dans les tours appelées Chabani, objets de vives polémiques dans la presse, à la veille de l'élection présidentielle d'avril 2004. N. Ryad