«Il est scandaleux et ridicule de savoir que le sable utilisé pour les systèmes de freinage du tramway d'Alger provient d'Espagne», regrette un des cadres de l'entreprise française Alstom, gestionnaire technique du tramway d'Alger. Les rames du tramway d'Alger sont dotées d'un système de freinage utilisant du sable lorsque la vitesse ne dépasse pas les 4 km/h. Il convient alors de sabler dans certains cas, c'est-à-dire d'envoyer du sable sur la voie au moyen de sablières, pour éviter le patinage des roues, garantissant ainsi au tramway un freinage en toute sécurité. Les Algérois empruntant le premier tronçon du tramway auront remarqué la présence de sable sur les voies au niveau des stations. Au Poste de commandement et de contrôle (PCC) de Bordj El Kiffan, chaque matin, les sablières des rames sont remplies de sable : «Il s'agit d'un sable ordinaire, traité d'une manière à ce qu'il réponde à la granulométrie exigée par le constructeur pour le bon fonctionnement du système de freinage», nous explique un des ingénieurs d'Alstom qui a requis l'anonymat. «C'est l'un des secrets les mieux gardés de l'entreprise», précise-t-il. Car ce sable est importé à coups de milliards d'Espagne. «Il est entreposé dans les silos à Bordj El Kiffan. Selon des informations que j'ai pu obtenir auprès de mes collègues, l'entreprise est en train de construire de gros silos à côté de la future usine de montage à Annaba, qui serviront de stock pour les futurs tramways», nous renseigne-t-il. Nous avons tenté d'approcher la direction d'Alstom, sans succès. Au ministère de l'Energie et des Mines, un des cadres crie au scandale : «Si l'information s'avère vraie, il serait ridicule d'importer du sable d'Espagne, le tiers de la surface de l'Algérie est sablonneux. S'il y a un traitement spécifique à opérer sur le sable pour répondre aux spécificités et à la granulométrie exigée par cette entreprise, je pense qu'en Algérie, nous avons et la compétence et la matière pour en fabriquer localement.» Selon un douanier au port d'Alger, ce sable est catalogué «spécifique». «L'entreprise de surcroît paie uniquement la TVA et est exonérée des droits de douane, tel que prévu dans les accords d'association avec l'Union européenne.» Alstom aurait exigé, dans les dispositions du cahier des charges signé avec les autorités algériennes, l'importation de ce sable de son partenaire espagnol. Concernant l'origine de ce sable, une source craint qu'il ne «provienne du Sahara occidental», un territoire qui connaît depuis plusieurs années un pillage sans précédent de ses richesses naturelles, notamment le sable qui est classé par l'ONG sahraouie Western Sahara Watch comme étant la principale richesse de ce territoire. Zouheir Aït Mouhoub