Cette expression serait-elle en passe d'être réhabilitée au sein de l'opposition algérienne? En tout cas, les acteurs du boycott de l'élection présidentielle du 17 avril et leurs partisans, réunis à la salle Harcha ont donné un petit indice quant à cette précieuse option de compromis, longtemps absente dans la culture politique. Voilà assurément une nouvelle donne dans le paysage morcelé de cette opposition. Et ce n'est pas rien, quand on sait l'ampleur des préjudices, que la démission et/ou division dans les rangs de l'opposition, ont causés dans le tissu social et politique de l'Algérie. Certains considèrent que les partis et les personnalités engagés dans cette démarche ne font pas l'unanimité pour diverses raisons. Un message clair sur l'ampleur de la tâche qui attend les animateurs du mouvement dont l'ambition est la constitution d'un front représentatif des forces du changement sur le terrain. Le plus important défi est la mobilisation, qui reste l'handicap principal de l'ensemble des mouvements et actions menés jusque-là contre le régime. Certes, cela s'explique par le travail de sape que les forces de ce dernier exercent sans relâche sur l'opposition depuis des décennies. Mais pas seulement. Car il y a aussi cette image écorchée de l'opposition au regard des populations, notamment à cause de la compromission de certains de ses membres avec le régime, et aussi de son incapacité chronique à converger vers un idéal commun pour la nation algérienne. S'adapter ou disparaître En fait, on peut dire sans se tromper que l'absence de cette culture du compromis a non seulement miné les forces d'opposition en les divisant face au régime, les disqualifiant du même coup de toute alternative viable, mais également favorisé la rupture de confiance entre le « politique » et le peuple. C'est pourquoi, ce premier pas, franchi à la salle Harcha, aussi modeste soit-il, représente une rupture dans les mœurs politiques des uns et des autres. C'est donc un signe fort pour dire au peuple que son message pour le changement politique a été reçu et qu'à charge des « représentants » de l'opposition au régime de s'adapter aux nouvelles réalités de la société algérienne. Celle des populations qui ont fait de la contestation leur moyen de défier le régime et défendre leurs droits. Sans tuteur. Ni tutelle. Par conséquent, les partisans du boycott présents à la salle Harcha doivent impérativement s'allier les différents acteurs (groupes et personnalités) qui militent sur le terrain du changement politique. Ce faisant, la mobilisation sera à la hauteur des attentes, et le rapport de force ainsi obtenu, forcera le régime à abdiquer. Ils ont le devoir d'y croire et de rendre leur passion contagieuse à l'échelle du pays. Les laïcs et les islamistes sur le même bateau Désormais, les discours et les slogans ne suffiront pas à vaincre le scepticisme des gens, éprouvés par les mensonges d'une classe politique marquée par la corruption et l'impunité. Aussi les initiateurs du boycott devront nécessairement faire preuve d'une volonté hors de tout doute, qu'ils sont capables non seulement de transcender leurs divergences idéologiques, pour travailler ensemble au projet commun d'une nouvelle république, mais également de faire preuve d'ouverture et d'esprit rassembleur pour donner primauté aux valeurs de la coalition sur les ambitions des individus. C'est seulement dans cette optique que les acteurs du changement politique contribueront à réaliser cet Etat de droit qui scellera la cohésion des Algériens pour un vivre-ensemble où les droits de chacun seront respectés. Ils devront s'appuyer sur des exemples probants où les principes démocratiques ont été mis de l'avant pour construire un projet de société, qui ne brime les droits d'aucune partie. Et à ce chapitre, l'expérience tunisienne est en passe de démontrer qu'il est possible à des politiciens, dont les conceptions et idées politiques sont diamétralement opposées, de converger par la voie d'un compromis historique au service de l'intérêt suprême de leur pays. L'Algérie n'en attend pas moins de ses enfants en cette période charnière de son histoire. Un compromis qui mette fin au régime de l'arbitraire et de la gabegie. Un compromis politique historique digne de celui qui a mis fin à 130 ans de colonialisme et permis aux Algériens de recouvrer la lumière et la dignité que confère l'indépendance. Un compromis qui assure une transition pacifique et éloigne le spectre d'une rupture brutale entre la base et le sommet, faisant de nous des victimes ou des spectateurs effrayés. Le pays n'a pas besoin d'une autre tragédie.