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Pourquoi Larbi Belkheir a-t-il choisi ce moment pour venir se soigner en France?
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 16 - 10 - 2008

Au moment de l'assassinat de A.Mecili, Larbi Belkheir était considéré comme le numéro 2 du régime, juste après Chadli Bendjedid. Dans la réalité, il était le numéro 1, puisqu'il faisait endosser à celui-ci toutes les machinations qu'il avait lui même mises au point. Cet homme, qui tient plus du maquignon roublard que de Kissinger, dont il admirait le machiavélisme, avait réussi à embobiner Chadli au point où ce dernier croyait, à chaque fois, que c'était lui qui avait eu l'idée que Belkheir lui glissait dans la tête. Et Belkheir ne tarissait pas d'éloges sur le génie de Chadli, qui venait d'avoir une telle fulgurance.
Aujourd'hui, il semble tout à fait acquis que le projet d »assassinat de A.Mecili avait germé dans le cerveau de Larbi Belkheir. L'assassinat avait été commandité au patron de la Sécurité militaire de l'époque, feu Mejdoub Lakehal Ayat. Et comme à l'accoutumée, Larbi Belkheir parvint, non seulement, à convaincre le président Chadli que l'idée venait de lui, mais que A.Mecili allait communiquer à la presse française un dossier accablant sur une grosse indélicatesse, de plusieurs millions de francs de l'époque, commise par l'entourage direct de l'épouse du président. Larbi Belkheir s'engagea, vraisemblablement, auprès de Chadli, de mettre ses « amis » français à contribution pour que le dossier qui était entre les mains de A.Mecili ne soit pas rendu public. Aujourd'hui, avec ce recul que nous permet le temps, nous pouvons aisément imaginer que cette histoire de sale affaire qui concernait l'épouse de Chadli Bendjedid, même si elle était réelle, n'avait pas été à la connaissance de A.Mecili. Ou du moins, qu'il n'en avait pas un dossier accablant. Si cela avait été le cas, personne n'aurait pu empêcher qu'elle éclate après sa mort. D'abord parce que Mecili en aurait forcément parlé à son entourage politique, et particulièrement à Hocine Aït Ahmed, et ensuite parce que, toute malléable qu'elle fut à cette époque, la presse française ne peut être muselée à ce point.
Larbi Belkheir, qui connaissait l'histoire de cette affaire, et de bien d'autres encore, puisque c'était lui même qui les rendait possibles, s'en était servi pour faire paniquer Chadli et lui faire endosser la paternité de l'assassinat. C'est du Larbi Belkheir pur laine.
Or, aujourd'hui, malgré la gravité de l'affaire Hassani, que ses amis politiciens français semblent ne plus maîtriser, Larbi Belkheir vient se faire soigner à Paris. Oui, bien sûr, il jouit d'une immunité diplomatique qui le met à l'abri d'une interpellation, mais sa présence pourrait susciter des remous, tout comme elle pourrait inciter les parties civiles à « solliciter » son « témoignage ». Cette présence inopportune, et très étrange, de Larbi Belkheir sur le territoire français a certainement dû agacer jusqu'à ses « amis » politiques français, qui ont certainement dû le prier d'aller se faire soigner ailleurs. Il ne se trouve peut-être plus en France, mais il aura réussi à passer le message. Car sa présence en France, à un moment pareil, et dans de telles circonstances, ne peut s'expliquer que par un signal qu'il voulait envoyer aux initiés. A ses ennemis surtout. Mais aussi à ses « amis » français.
Nous avions dit, dans de précédents articles, que Hassani avait été piégé par un clan du DRS. Il n'est venu en France, où il se savait sous le coup d'un mandat d'arrêt international, que parce que ses patrons des services l'ont incité à se s'y rendre. Il ne pouvait venir en France sans l'accord préalable de ses patrons des services. C'est totalement exclu. Plus que de l'avoir rassuré sur le sort qui l'y attendait, ceux qui l'ont piégé ont même dû le pousser à s'y rendre. Hassani était tout à fait certain qu'il n'allait pas être interpellé et que l'affaire avait été « arrangée » entre les services des deux pays. Comme d'habitude. Hassani n'est pas un enfant de chœur. C'est un officier du DRS, doublé d'un diplomate. Il ne pouvait se jeter ainsi dans la gueule du loup, s'il n'avait eu une totale assurance sur la question. Nous pouvons même dire que si le DRS n'avait pas été d'accord pour que cet homme vienne en France, il n'aurait même pas pu monter à bord de l'appareil qui allait l'y ramener.
Les services du DRS qui ont concocté ce coup tordu ont certainement reçu leurs ordres du plus haut niveau de cette institution. Aucun responsable subalterne n'aurait pris une telle décision. Pourquoi? Serait-on tenté de demander. Il faut savoir, d'abord, que les actuels barons du DRS, et de tous les autres services, ne peuvent, en aucun manière être inquiétés pour l'assassinat de A.Mecili. Pour la simple raison qu'il n'y ont pas pris part. Au moment de l'affaire, ils étaient encore des seconds couteaux.
Ils se sont servis de Hassani pour mettre le clan Belkheir dans la gêne. Nous savions que ce dernier était en disgrâce, que le frère du président Bouteflika avait réussi à le bouter hors du premier cercle, et qu'il l'avait fait bannir au Maroc, comme simple ambassadeur. Mais Larbi Belkheir qui vivait très mal cette dégradation, avait réussi à réactiver certains de ses réseaux, et donnait des signes de retour dans le sérail. Des rumeurs faisaient même état d'une réconciliation entre lui et l'ex-président Chadli, qu'il encouragerait à faire des déclarations publiques. Le clan adverse lui avait déjà envoyé un avertissement sans frais, lors des attentats d'avril 2007 à Alger. Un appel anonyme avait averti la police qu'un véhicule piégé était garé près du domicile de Larbi Belkheir. Une Mercedes bourrée de 500 kg d'explosifs, avec un système de commande à distance. C'était le jour où des attentats kamikazes avaient ciblé le palais du gouvernement et des arrondissements de police.
Cette affaire Hassani est un deuxième coup de semonce que le « clan » envoie au cardinal. Sa présence à Paris, pour se faire soigner, alors qu'il aurait pu aller dans l'établissement de son choix, partout dans le monde, procède d'une volonté d'envoyer une réponse à ses ennemis. Il voulait leur dire que ses relations avec ses « amis » français étaient intactes, et qu'il n'était pas n'importe quel général Nezzar qui se fait exfiltrer en catastrophe parce qu'un juge avait demandé à l'entendre à la suite d'une plainte pour crimes contre l'humanité. Cette attitude bravache est très éloquente. D'autant plus qu'elle vient en plus d'une rumeur qui fait état de l'écriture de ses mémoires. Des mémoires où il n'aurait rien oublié et qui seraient explosives. Où il serait question des crimes contre l'humanité, de l'assassinat du président Boudiaf, des valises remises à des politiciens étrangers et d'autres « petits détails » saignants. Larbi Belkheir, en stratège machiavélique qu'il est, a compris que la meilleure défense était l'attaque. Surtout lorsqu'on dispose d'une bonne assurance vie. Des mémoires truffées de preuves.


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