Abdallah CHEBBAH Août, 2019 La notion de pouvoir n'est pas uniquement un mode de gestion ou de gouvernance mais beaucoup plus un rapport de force entre un gouverné et un gouvernant dans un cadre dont les règles du jeu sont les lois légiférées par les législateurs qui émaneraient d'un peuple. Cet exercice peut prendre plusieurs formes. Il peut s'exercer légitimement par suffrage universel. On l'appelle le pouvoir démocratique. Il peut l'être aussi, illégitimement, par usurpation. On l'appelle le pouvoir unique, totalitaire, détenu par une personne ou un groupe de personnes faisant fi de ces règles. En théorie, un peuple ne peut décider d'une désobéissance civile que si le pouvoir en place viole délibérément et injustement les principes de la démocratie, c'est a dire les lois décrétées par les législateurs, la constitution et les contre-pouvoirs tels que la liberté de la presse et l'indépendance de la justice. La désobéissance peut alors prendre la forme d'une véritable «insurrection pacifique» des citoyens qui se donnent pour but, non pas de changer telle ou telle loi, mais de changer le pouvoir lui-même pour reprendre leur destin en main. La légitimité de la désobéissance civile se fonde alors sur le droit du peuple de résister à l'oppression par l'immobilisme de toutes les institutions publiques ou étatiques du pays. Depuis l'indépendance, les Algériens ont été formatés pour obéir à une armée illégitime qui a confisqué le pouvoir sur tout ce qui bouge. La désobéissance les mènerait à une sanction, une punition, au cachot, une exécution. Depuis, ils ont intériorisé cette menace de la punition qui sanctionnerait leur désobéissance et ont obéit pour ne pas connaître d'ennuis. L'obéissance passive est apparue comme une garantie de sécurité, ce qui a renforcé le régime totalitaire et arbitraire. Cette junte militaire a ainsi instaurée une dictature dissimulée par un pouvoir civil de technocrates corrompus faisant offices de vrais démocrates civils bafouant les lois, la constitution, les droits, les libertés et muselant la justice et les médias. Nous sommes ainsi tous devenus des subordonnés. Il ne peut y avoir un pouvoir que s'il y a obéissance et obédience. Pour désapprendre à obéir, les Algériens devraient avoir le courage de contourner la dissuasion exercée par la menace de la sanction. La désobéissance civile est-elle l'ultime recours pour satisfaire les exigences d'un peuple sans conséquences désastreuses sur le pays? Un 22 février, les Algériens, en masse, grands et petits, sont sortis dans la rue pour signifier au pouvoir son mécontentement quant à la gouvernance de son pays. Ils ont finalement soulevé, après tant d'années d'observations, de constatations et de patience, tout ce qui n'allait pas. Tout ce qui était contraire aux lois et à la constitution et dont le pouvoir lui-même les transcendaient au vu et au sus de tout le monde. Se sentant visé directement, le pouvoir réel, en l'occurrence l'armée, promet d'y remédier par de nouvelles élections présidentielles. Le peuple a compris que le problème ne se résume pas à une personne mais à un système implanté par une oligarchie et des hommes en tenue militaire qui ont ruiné la vie de tout un peuple. Le peuple veut changer le système et non uniquement les hommes. Où va mener cette confrontation? Pendant 24 semaines, le peuple n'arrête pas de crier haut et fort TROUHOU GAÂ. Ce peuple veut un changement radical. Il veut changer les hommes, les lois, le régime et la constitution. Il veut tout reprendre et le changer dans un cadre démocratique sincère et honnête. Le pouvoir en place s'obstine à vouloir dialoguer. Le peuple veut par contre négocier le retrait de l'armée des affaires politiques du pays. Il ne veut plus de régime militaire mais d'un régime civil. La désobéissance civile serait-elle l'ultime recours pour satisfaire les exigences d'un peuple sans conséquences désastreuses sur le pays? Avant d'aller à cette désobéissance civile, il est impératif d'user de toutes les solutions. La solution la plus avantageuse pour ce régime réside dans la négociation de voie de sortie des détenteurs réels du pouvoir, impliqués jusqu'au cou dans cette mascarade. Leur crainte est dans l'effet de représailles. Là est véritablement le nœud gordien, l'imbroglio. Trouhou Gaâ est facile à dire, mais dans la faisabilité ça reste impossible, car la réaction est imprévisible. Dans ces conditions, la désobéissance civile aura, probablement, des conséquences majeures pour le pays? Encore une fois, le peuple veut dialoguer, il veut négocier. Qui va mener les négociations? Qui sont les représentants du peuple qui négocieront? Un panel de personnes courageuses et honnêtes sans précédents, issu du peuple, devraient immerger dans les prochains jours et mener des négociations avec les détenteurs du pouvoir. A mon humble avis, ce serait l'unique solution si on veut éviter le pire, car le passif de notre pays est très lourd et politiquement très divergent pour autant que les mentalités et les doctrines des uns et des autres ne changent pas. IL serait plus raisonnable d'entreprendre des discussions sur la forme et le font d'un état civil dont nous n'avons aucune expérience uniquement des clichés que nous envoient les pays occidentaux dont les démocraties reposent beaucoup plus sur le civisme, les droits et les libertés qui nous manquent, que sur le pouvoir réel. Les risques d'une désobéissance civile pour notre peuple pourraient être désastreux pour son quotidien, son pouvoir d'achat et par conséquent son économie. Nous sommes dépendants de beaucoup de pays qui risquent de nous isoler. Pour le citoyen Lambda, le dilemme est cornélien. La raison devrait prémunir en usant de concessions comme moyen de résoudre le problème ou le seul gagnant sera l'Algérie. Dans tout conflit, la négociation semble être la meilleure des solutions.