Le Hirak, mouvement de protestation pacifique lancé en 2019 pour réclamer un changement politique radical en Algérie, s'est poursuivi au début de l'année, mais les manifestations ont été interrompues en mars par les mesures de restriction liées à la pandémie de COVID-19. En réponse à la pandémie, un confinement national a été instauré du 4 avril au mois de juin ; les mesures ont ensuite été assouplies. En décembre, le Syndicat national des médecins libéraux a annoncé qu'au moins 139 porfessionnel.le.s de la santé étaient morts du COVID-19. Le Parlement a adopté en avril la Loi relative à la prévention et à la lutte contre la discrimination et le discours de haine, qui prévoyait des peines pouvant aller jusqu'à 10 ans d'emprisonnement pour les contrevenant.e.s. Cependant, cette loi ne mentionnait pas la discrimination fondée sur la religion, la sexualité ou l'identité de genre. En novembre, une nouvelle Constitution a été adoptée à la suite d'un référendum marqué par un très faible taux de participation, en raison de la controverse suscitée par ce processus. Le texte apportait des améliorations en ce qui concerne les droits des femmes et les droits sociaux et économiques, mais maintenait la peine de mort et ne respectait pas les normes internationales relatives à la liberté d'expression, à la liberté de réunion et à l'indépendance de la justice LIBERTE D'EXPRESSION ET DE REUNION Les manifestations du Hirak se sont poursuivies jusqu'en mars. Les protestataires ont ensuite décidé de les suspendre pour limiter la propagation de la maladie à coronavirus 2019. Les autorités ont libéré plus de 70 manifestant.e.s en janvier 2020, mais au moins 93 personnes, parmi lesquelles des journalistes et des militant.e.s politiques et de la société civile, étaient toujours en détention à la fin de l'année pour avoir partagé des publications en ligne ou participé au Hirak, d'après le Comité national pour la libération des détenus. Les pouvoirs publics ont utilisé la pandémie de COVID-19 comme prétexte pour multiplier les arrestations de militant.e.s, de journalistes et de blogueurs et blogueuses qui critiquaient les autorités en ligne, s'appuyant dans la plupart des cas sur des dispositions du Code pénal pour engager des poursuites à leur encontre. Les autorités ont profité du fait que la pandémie monopolisait l'attention de la communauté internationale pour adopter des modifications du Code pénal rendant la diffusion de fausses nouvelles passible d'une peine maximale de trois ans de prison. En mars, la cour d'appel de la capitale, Alger, a condamné Karim Tabbou à une peine d'un an de prison assortie d'une amende. Chef de l'Union démocratique et sociale, un parti d'opposition non reconnu par les autorités, cet homme était accusé d'avoir publié sur Facebook des vidéos dans lesquelles il critiquait le rôle de l'armée dans la sphère politique. Il a bénéficié d'une libération conditionnelle le 2 juillet, après neuf mois de détention. Le 15 avril, les autorités ont reconnu avoir bloqué deux médias en ligne indépendants, Maghreb Emergent et Radio M, dans l'attente des résultats de la procédure judiciaire engagée contre leur directeur pour diffamation à l'égard du président de la République. En décembre, ces deux sites étaient toujours bloqués. Le 21 juin, un tribunal de Chéraga, dans la banlieue d'Alger, a condamné Amira Bouraoui, médecin et militante, à un an d'emprisonnement pour des publications en ligne critiquant le président, avant de la remettre en liberté provisoire dans l'attente de son procès en appel. Le 8 novembre, un autre tribunal l'a condamnée en son absence à trois ans de prison pour une publication en ligne à propos du prophète Mahomet. En août, le journaliste Khaled Drareni a été condamné en appel à deux ans d'emprisonnement pour « incitation à un attroupement non armé » et « atteinte à l'intégrité du territoire national », en raison de sa couverture indépendante du Hirak. Un tribunal d'Alger a également condamné les militants Samir Benlarbi et Slimane Hamitouche à un an de prison, dont huit mois avec sursis, pour leurs publications en ligne et leur participation aux manifestations. Le 8 octobre, plus de 20 personnes ont été arrêtées à Oran, dans le nord-ouest du pays, pendant une manifestation organisée par des groupes de défense des droits de femmes afin de dénoncer la fréquence des violences liées au genre et le viol et le meurtre d'une jeune femme de 19 ans. Toutes les personnes arrêtées ont été libérées le jour même sans avoir été inculpées. En octobre également, 42 manifestant.e.s pacifiques ont été arrêtés à Alger alors qu'ils commémoraient les manifestations de jeunes de 1988. Trente-trois d'entre eux, dont au moins cinq femmes, ont bénéficié d'une libération provisoire. Les neuf autres ont été incarcérés à la prison d'El Harrach, dans la banlieue d'Alger, avant d'être à leur tour libérés. En novembre, un tribunal de première instance de Relizane, dans le nord-ouest du pays, a condamné le militant politique Abdallah Benaoum à un an d'emprisonnement pour la publication sur Facebook de messages dans lesquels il critiquait les autorités et affirmait son opposition à la tenue de l'élection présidentielle. LIBERTE D'ASSOCIATION Une disposition du Code pénal introduite en avril prévoyait une peine maximale de 14 ans de prison pour les membres d'associations qui recevraient des financements de l'étranger en vue de mener des activités jugées préjudiciables pour la sécurité de l'Etat et les « intérêts fondamentaux de l'Algérie ». Ces termes vagues risquaient de restreindre les activités légitimes des associations déplaisant aux autorités. Les pouvoirs publics ont maintenu dans un vide juridique de nombreuses associations, dont Amnesty International Algérie, en n'accusant pas réception de leur demande d'enregistrement soumise en application de la Loi relative aux associations, extrêmement restrictive.