Tribune des lecteurs 30 décembre 2009 Mouloud Mammeri, écrivain et anthropologue algérien d'expression française, est né le 28 décembre 1917 à Taourirt Mimoune en Haute Kabylie. Il a fait ses études primaires dans son village natal. Cependant, en 1928, il part vivre chez son oncle à Rabat «Maroc », où ce dernier était alors le précepteur de Mohammed V. Quatre ans après, il revient à Alger et poursuit ses études au lycée Bugeaud (actuel lycée Emir Abdelkader, à Bab-El-Oued, Alger). Il part ensuite au lycée Louis le Grand, à Paris, en ayant l'intention de rentrer à l'école normale supérieure. Il a été mobilisé en 1931 et libéré en octobre 1940. Plus tard, Mouloud Mammeri s'inscrit à la faculté des Lettres d'Alger. Il est également remobilisé en 1942 après le débarquement américain, il participe aux campagnes d'Italie et de la France. À la fin de la guerre, il avait préparé à Paris un concours de professorat de Lettres et rentre en Algérie en septembre 1947. Il enseigne à Médéa puis à Ben Aknoun et publie son premier roman, La Colline oubliée en1952. Et puis sous la pression des événements il doit quitter Alger en 1957. De1957à 1962, Mouloud Mammeri reste au Maroc et rejoint l'Algérie au lendemain de son indépendance. De 1965 à 1972, il enseigne la langue berbère à l'université dans le cadre de la section d'ethnologie, la chaire de Berbère ayant été supprimée en 1962. Il n'assure des cours dans cette langue qu'au gré des autorisations, animant bénévolement des cours jusqu'en 1973 tandis que certaines matières telles l'ethnologie et l'anthropologie jugées sciences coloniales doivent disparaître des enseignements universitaires. De 1969 à 1980, il dirige le Centre de recherches anthropologiques, préhistoriques et éthnographiques d'Alger (CRAPE). Il fait également un passage éphémère à la tête de la première Union nationale des écrivains algériens qu'il abandonne pour discordance de vue sur le rôle de l'écrivain dans la société. Mouloud Mammeri meurt le soir du 26 février 1989 des suites d'un accident de voiture, qui eut lieu près d'Ain Defla à son retour d'un colloque à Oujda. Et le 27 février, sa dépouille est ramenée à son domicile, rue Sfindja (ex-Laperlier) à Alger. Mouloud Mammeri est inhumé, le lendemain, à Taourirt Mimoun. Ses funérailles furent spectaculaires : plus de 200 000 personnes assistèrent à son enterrement. Aucun officiel n'assista à la cérémonie alors qu'une foule compacte scandait des slogans contre le pouvoir en place. Parmi ses œuvres se trouvent la « Colline oubliée» publiée en 1952, « Le Sommeil du juste” » 1952, « L'opium et le bâton » 1965 et enfin « La Traversée en 1982. Son œuvre la plus connue est la Colline oubliée qui a même donné un film en 1996. Ce dernier relate d'une façon réaliste la difficulté de la vie des Algériens pendant l'occupation. La Colline oubliée résume une histoire réelle vécue en 1939, au cœur des montagnes de Haute Kabylie. Dans un village gouverné par les valeurs et les coutumes ancestrales, les existences se déroulent au rythme des saisons. Morane y est né, y a grandi et y vit dans l'alternance des douleurs, des espoirs, et des vengeances. Au moment de la guerre, la mobilisation et le départ des hommes engendrent un désarroi confusément ressenti comme une malédiction sur le village. Les habitudes et les mentalités changent, l'ordre colonial commence à ébranler l'harmonie séculaire d'un monde enchanté sentant sa fin prochaine. Un écrivain engagé Mouloud Mammeri, par son roman, est considéré comme un écrivain d'expression française engagé. Il vit le même souffle que son peuple pour décrire sa respiration opprimée. L'occupation, pour lui, est vécue comme un haut lieu d'horreur, une souffrance insupportable et une douleur térébrante. Le temps n'est plus chronométrique, cependant historiquement pérenne. En effet, Mammeri, qui n`a pas trouvé mieux que de recourir à la prise de position avec sa plume, en tant que humaniste, n'a pas passé sous silence l`horreur dont fut le théâtre son pays, par conséquent, il met en valeur, définit, construit l'histoire d'un peuple engendré, marginalise, sans doute, par la colonisation française. La revendication de Mammeri dans son œuvre intitulée la Colline oubliée, et peu en étrave explicite, cependant, il dénonce d'une façon implicite l`hostilité du dominateur, autrement dit, il révèle l'histoire villageoise de son peuple dédaigné bien évidemment par une force coloniale. Ainsi, Mammeri témoigne par sa seule plume, puisque le rôle de l'écrivain est incontestablement la défense de sa société qui l'a vu naître. Mammeri dans son roman parle de la Kabylie, mais il parle aussi de l`Algérie raison identique de tous les Algériens. Une telle littérature est une lecture de l'histoire qui témoigne, mais aussi considérée comme une littérature de combat où l'homme algérien aiguise sans cesse sa personnalité pour lutter de sa propre force contre la force coloniale. Elle est engagée, c'est-à-dire, elle revêt d'une orientation idéologique, politique et sociale explicite dans le mouvement de la lutte de libération. Elle favorise l'éveil de la conscience pour l`inciter enfin à l`action. En outre, on peut dire que l`écrivain, en somme, joue un rôle primordial dans sa société. Il écrit en français, parce que c'est la seule langue qu'il a apprise à l'école, son message s'adresse aux Français et la langue française était ‘l'esprit de son âme, mais la culture arabo-islamique est l'âme de son esprit. C.H.