Vers le renforcement des relations militaires entre l'Algérie et le Koweït    «L'Algérie s'appuie dans sa politique étrangère sur une coopération internationale fondée sur la paix et la non-ingérence»    «La réforme globale de la justice constitue l'un des principaux axes du programme du président de la République»    L'Anesrif anticipe la livraison de la ligne Béchar-Gara Djebilet    Arts plastiques: Le 8e Festival international de l'Art contemporain s'ouvre à Alger    Place de l'Europe et de l'Algérie au sein de l'économie mondiale    250 colons sionistes prennent d'assaut l'esplanade de la mosquée Al-Aqsa    Josep Borrell réaffirme le soutien de l'UE à la Finul    La Ligue arabe met en garde contre les intentions de l'entité sioniste d'étendre son agression dans la région    Une graine de champion olympique    Ligue 1 Mobilis : la LFP fixe les horaires de la 11e journée    L'AGO le 30 novembre, l'AGE le 14 décembre    Un réseau de passeurs de harraga démantelé    Monoxyde de carbone : pour une année blanche    Aménagement harmonieux et respectueux des plages    Adjermaya, une agence pour le suivi des canalisations    Découverte en Syrie du plus ancien alphabet connu    Escale à Khenchela    Concert musical en hommage à Warda el Djazaïria    Foot/ Ligue des champions d'Afrique: le CRB chute d'entrée face à Orlando Pirates (1-2)    Le Général d'Armée Chanegriha se rend à l'exposition des hydrocarbures et du gaz et à la 15e Brigade blindée au Koweït    AMASA 2024 : nécessité de repenser la coopération scientifique entre les pays africains    Le ministère des Affaires religieuses appelle à l'accomplissement de Salat El Istisqa samedi prochain    Décès du journaliste Mohamed Bouzina : la Direction générale de la communication à la Présidence de la République présente ses condoléances    Attaf participe au Portugal à la 10e réunion ministérielle du Forum de l'UNAOC    50e anniversaire de la création de l'UNPA : allocution du président de la République    Une entreprise algérienne innove avec un bracelet électronique pour accompagner les pèlerins    CAN-2024 féminine: la sélection algérienne débute son stage à Sidi Moussa    Equitation: le concours national "trophée fédéral" de saut d'obstacles du 28 au 30 novembre à Tipaza    Accidents de la route: 34 morts et 1384 blessés en une semaine    Agression sioniste contre Ghaza: "Il est grand temps d'instaurer un cessez-le-feu immédiat"    Le président de la République préside la cérémonie de célébration du 50eme anniversaire de l'UNPA    Cosob: début des souscriptions le 1er décembre prochain pour la première startup de la Bourse d'Alger    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'alourdit à 44.249 martyrs et 104.746 blessés    Prix Cheikh Abdelkrim Dali: Ouverture de la 4e édition en hommage à l'artiste Noureddine Saoudi    Concert musical en hommage à Warda el Djazaïria à l'Opéra d'Alger    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les moutons de Panurge
Publié dans Le Soir d'Algérie le 04 - 09 - 2017

Visiblement, rien n'a changé depuis le 12 janvier 2006, date de publication de cette chronique sur la dénaturation de la grande fête de l'Aïd. Je peux même dire que ça a empiré ! Voici l'avant-dernière chronique des «Haltes estivales» de cette année, quinze jours avant une reprise qui s'avère laborieuse d'autant plus que nous avons épuisé toutes les cartouches de notre bande de munitions labellisées «Espoir !» Tout indique que l'oligarchie va s'appuyer sur les extrémistes religieux pour maintenir la pression sur les patriotes honnêtes et progressistes qui veulent un autre avenir pour nos enfants. Mais rien ne dit que le front des luttes citoyennes et syndicales va se laisser faire...
Quand vient l'heure du mouton, le pays se fige dans une pause barbecue prolongée qui sent les abats grillés et les arômes de la cuisine d'antan, à une époque où la viande n'était pas l'ennemie du pauvre. A l'heure du mouton, on s'oublie dans la grande bouffe et vas-y que je mange, déguste, avale et croque et vas-y que je m'empiffre à satiété ! Après avoir subi les mauvaises odeurs émanant de la cage d'escalier, après avoir valsé sur la paille souillée qui jonche les escaliers depuis quelques jours, après avoir été agressés par le spectacle de désolation qu'offrent nos villes à l'approche de cette fête, nous voilà arrivés au bout de nos peines : c'est l'heure du sacrifice.
On égorge la bête là où on peut : dans les terrains vagues, les balcons, les terrasses, les caves et même dans les salles de bains ! Il faut accepter ce sous-développement chronique sans broncher. Il faut même applaudir ce retour au moyen-âge car, si tu ne le fais pas, tu es taxé d'ennemi de la religion. Pourtant, ce que nous remettons en cause, ce n'est pas l'acte, ô combien symbolique, du sacrifice rituel en hommage au geste d'Abraham, mais la manière barbare et sauvage dont nous le faisons. Comme si 2006 n'était qu'à quelques encablures de ces époques obscures au mode de vie primaire. Des siècles où l'on ne connaissait pas encore toutes les commodités de la vie moderne et son organisation sociale qui permettent mille autres solutions ! Les Bédouins qui vivaient dans le désert avaient leurs rites et leurs habitudes. Ils ne connaissaient ni immeubles, ni égouts, ni abattoirs, ni électricité, ni gaz, ni tant d'autres conforts encore qui facilitent notre vie et la rendent moins polluée par le manque d'hygiène qui caractérisait ces époques lointaines.
En 2006, il est tout simplement aberrant de transformer des immeubles en bergeries, comme il est scandaleux d'autoriser la consommation de la viande sans contrôle vétérinaire, même si les autorités lancent des campagnes pour que les citoyens fassent examiner leurs moutons par les services spécialisés. Mais, dans la pratique, qui le fait réellement ? Et, en supposant que l'on ait envie de le faire, les moyens de transport, réduits à leur plus simple expression le jour de l'Aïd, le permettent-ils ? En discutant de tout cela avec quelques citoyens sortis faire une petite balade pour digérer la viande ingurgitée quelques heures plus tôt, j'ai eu des réponses du genre : «C'est la religion qui le veut», «il ne faut pas changer nos habitudes» et tant d'autres affirmations qui sont certainement sincères mais qui ont l'heur de me plonger dans un pessimisme profond, d'autant plus que ce sont les plus jeunes qui trouvent tout cela «normal» ! Sommes-nous réellement en train d'évoluer, et ce progrès, dont les discours officiels nous abreuvent quotidiennement via l'Unique, n'est-il pas qu'une simple poudre aux yeux cachant une réalité plus amère ?
Ces Algériens qui croient maîtriser les outils de leur siècle et progresser comme les autres peuples ne sont-ils pas finalement que de gros bébés s'abreuvant goulûment aux deux mamelles d'une fausse modernité : la télé numérique piratée et le téléphone portable «bipeur» ! Des gens qui trouvent normal de transformer les immeubles en porcheries sont-ils mentalement modernes ? Les réponses que j'ai eues lors de mon mini-sondage de rue prouvent en fait qu'un amalgame est entretenu à bon escient autour de ces questions où le sentiment religieux est convoqué en permanence pour empêcher toute réflexion libre. Le sacrifice de l'Aïd se fait dans de nombreux pays musulmans sans pour autant que cela porte atteinte à la propreté des villes. Vivre dans un milieu urbain moderne impose des règles et une discipline qui ne sont pas de rigueur dans les zones rurales. Et si la tendance générale, depuis l'indépendance, est à la «ruralisation» de nos villes, n'est-il pas temps de réagir pour stopper le désastre ? Et que l'on ne vienne pas nous raconter que l'on égorge les moutons dans les gratte-ciel de La Mecque, de Riyad ou de Dubaï ! Et sans aller jusqu'à reproduire les procédés imposés à nos émigrés dans certains pays européens, nous pouvons nous intéresser à ce qui se fait dans les pays arabes et musulmans qui protègent leurs cités urbaines contre de telles agressions ! En attendant, il ne serait pas superflu d'ajouter quelques commentaires sur cette fête de l'Aïd qui s'éloigne progressivement de ses nobles objectifs. Et ces prêcheurs qui protègent en fait les immenses intérêts des maquignons de circonstance, ces donneurs de leçons qui culpabilisent toute personne voulant vivre son Islam dans la réalité du XXe siècle, ne seraient-ils pas plus crédibles s'ils nous entretenaient de l'obligation faite au musulman de partager son mouton avec les plus démunis ? Qu'ils nous expliquent donc ce penchant moderne de nombreuses familles à congeler les morceaux de viande au fond des freezers au lieu de les distribuer, tous frais, à ceux qui ont perdu le goût de la viande ! Et c'est parce qu'une telle solidarité n'existe plus que les plus pauvres s'endettent pour offrir à leurs enfants la bête du sacrifice. Las d'attendre un geste de ces nouveaux riches, le petit ouvrier, le smicard, le chômeur, la femme de ménage n'hésitent pas à racler le fond de leurs poches ou demander des prêts ruineux à leurs patrons, juste pour dessiner ce sourire si pur sur les visages défaits de leurs enfants, juste pour apporter un peu de chaleur à ces chaumières froides et austères.
Alors, au lieu de jouer les gars scandalisés par des propos dénonçant la grande porcherie qui s'installe lors de ces fêtes, qu'ils dénoncent l'indifférence de l'individualisme, plaies ouvertes dans le corps de l'Aïd ! Et puis, ce pays qui nous offre un spectacle si désolant en ces premiers jours de l'année 2006, n'est-il pas aussi celui où la pensée rationnelle et scientifique recule chaque jour au profit du charlatanisme, du maraboutisme et d'une nouvelle mode de mystification qui réinstalle tous ces fléaux combattus par le réformateur Ben Badis et sévèrement réprimés par la Révolution ? Pour peu que l'on comprenne la nécessité de se ressaisir avant qu'il ne soit trop tard, il est possible de vivre son Islam dans la tolérance et la modernité, comme des citoyens d'un pays ancré dans son siècle. Loin des bigoteries des nouveaux politiques qui, après avoir perdu la bataille de la terreur, s'incrustent dans les pores d'une société sujette aux plus folles bouffonneries, avec la complicité et le soutien d'anciens politiques qui tirent les ficelles du jeu.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.