Le parti au pouvoir en Turquie va étudier la possibilité de tenir des élections présidentielle et législatives anticipées à l'été prochain, après un appel en ce sens lancé mardi par l'allié ultranationaliste du président Recep Tayyip Erdogan. Le chef du Parti d'action nationaliste (MHP) Devlet Bahçeli, l'un des principaux alliés de M. Erdogan, a secoué la scène politique turque mardi en appelant à tenir les élections le 26 août, soit plus d'un an avant la date prévue du 3 novembre 2019. «Les déclarations de M. Bahçeli seront évaluées par les organes compétents» du Parti de la justice et du développement (AKP), au pouvoir, a réagi le porte-parole du gouvernement Bekir Bozdag. «C'est une situation nouvelle et, bien entendu, nous allons évaluer cette situation nouvelle», a-t-il ajouté. Signe que le processus pourrait aller vite, M. Erdogan a indiqué qu'il allait s'entretenir avec M. Bahçeli mercredi à 13H30 , sans fournir de détail. Interrogé par des journalistes sur les déclarations de son allié ultranationaliste, le président turc a indiqué qu'il n'avait «rien à dire pour le moment». Lors d'un discours mardi devant son groupe parlementaire à Ankara, M. Bahçeli a estimé que «dans les conditions actuelles, il (était) impossible pour la Turquie d'attendre le 3 novembre 2019». «Le chemin le plus raisonnable est que le peuple turc se rende aux urnes le 26 août 2018 pour les élections présidentielle et législatives», a déclaré le chef du MHP. Le 26 août correspond au jour de la bataille de Manzikert, en 1071, qui marque l'entrée des Turcs en Anatolie après la victoire du sultan seldjoukide Alp Arslan sur les forces byzantines. Ces déclarations interviennent alors que les dirigeants turcs, dont M. Erdogan, ont plusieurs fois démenti ces dernières semaines des rumeurs persistantes d'élections anticipées. Mais nombre d'opposants de M. Erdogan l'accusent de vouloir organiser des élections anticipées pour profiter de l'état d'urgence en vigueur depuis près de deux ans et de la popularité de l'offensive d'Ankara dans le nord de la Syrie contre une milice kurde. Par ailleurs, les dirigeants turcs redoutent une dégradation de la situation économique, qui montre des signes de surchauffe. Les déclarations de M. Bahçeli ont provoqué une baisse de 0,3% e la livre turque face au dollar. Plusieurs partis d'opposition ont affirmé mardi qu'ils étaient prêts à livrer bataille dans l'optique d'un double scrutin anticipé. «Nous disons ‘'chiche !''», a lancé Bülent Tezcan, porte-parole de la principale formation d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate). Selon le calendrier, les élections présidentielle et législatives sont prévues simultanément le 3 novembre 2019. Avant cela, un scrutin municipal est prévu en mars de la même année. Le double scrutin présidentiel et législatif est crucial, car il marquera l'entrée en vigueur de la plupart des mesures renforçant les prérogatives du chef de l'Etat, adoptées lors d'un référendum constitutionnel en avril 2017. Cette révision constitutionnelle permet à M. Erdogan de briguer deux nouveaux mandats de président de cinq ans. M. Erdogan, âgé de 64 ans, est au pouvoir en Turquie depuis 2003, d'abord comme Premier ministre (jusqu'en 2014), puis comme président.